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© AFP/JEAN-PIERRE CLATOT
Des supporteurs massés le long des routes du rallye Monte-Carlo, ici le passage du pilote Citroën Gabin Moreau à Gap, le 18 janvier 2017
Hétéroclite, gouailleur, parfois indiscipliné, mais uni par une même passion, le peuple du rallye s'est une nouvelle fois déplacé en masse pour suivre la 85e édition du Monte-Carlo.
Pour le "shakedown" de mercredi après-midi, dernière séance d'essai chronométrée, au moins un millier de personnes, au vu des centaines de voitures garées en trois colonnes sur la D994, ont réalisé une transhumance impromptue.
Sous un ciel azur, elles ont gravi un flanc de montagne, laissant leurs traces sur le paysage, pour s'agglutiner sur les hauteurs de Gap.
"Il y a encore plus de monde que l'an dernier", assure Mickaël, la vingtaine, venu en stop depuis Aubagne. "Cette fois, j'ai de la chance je suis en arrêt maladie, je n'ai pas eu besoin de poser des congés!", plaisante-t-il avec son accent marseillais.
A 1.000 mètres d'altitude, chapkas et bonnets supplantent les traditionnelles casquettes d'écurie.
Beaucoup ont revêtu des combinaisons de ski. Certains, vite réprimandés, font un feu en bord de route. "Mais on est des pompiers, monsieur!", plaident-ils en vain.
Les riverains, au balcon de leur chalet, assistent impuissants et résignés au piétinement de leur pelouse à demi blanchie.
On massacre les arbustes des haies pour mieux voir, en équilibre sur un talus, quand d'autres se juchent carrément en haut des hêtres.
Et il y a ceux qui sont en safari, leurs appareils photos grand angle posés sur des trépieds à la sortie d'une courbe, et déclenchés à distance au passage des fauves.
Installés sur des chaises pliantes, debout ou assis dans la neige fondue, les fans prennent d'assaut les meilleurs "spots" dès midi.
Las, ceux-ci sont menacés par les nouvelles règles de sécurité liées à la puissance accrue des voitures, que tentent de faire laborieusement respecter les stewards de la sécurité.
Avec leur anorak jaune, répartis tous les 100 mètres, ce sont les têtes de turcs idéales.
- 'Pour le bruit!' -
Repousser les spectateurs à distance raisonnable de l'asphalte et éviter l'anarchie est un véritable travail de Sisyphe lorsqu'on dispose seulement de quelques piquets et rubans.
Tout déplacement est interdit 30 minutes avant le premier passage, mais on passe allègrement de part et d'autre de la route.
A un de leurs coups de sifflet de réprimande répond un "Arbitre enculé!" ou un "Dégagez les Simpsons!"
"Le +shakedown+ a des chances de ne pas démarrer, vous êtes tous très mal placés", avertit le directeur de course à 15h36.
"Ils disent toujours ça", tempère un fan avec sa corne de brume.
En 2015, lors du duel d'anthologie Loeb-Ogier, les organisateurs avaient toutefois mis leur menace à exécution en annulant une spéciale entre Prunières et Embrun.
"Si c'est ça, le Monte Carl' il vaut mieux le regarder à la maison", se plaint Nicolas, à nouveau repoussé dans un champ. "Avec ce tracé-là, c'est sûr", opine son compère, Jean-Louis. Pourquoi être venu alors? "Pour le bruit", répondent-ils en choeur, alors que le pilote belge Thierry Neuville fait justement pétarader sa Hyundai.
On trouve aussi Wolfgang, Otto et Stefan, trois retraités de Bavière. Coiffés de leurs casquettes Volkswagen, ils sont venus soutenir Ogier malgré le retrait du constructeur pour cause de "Dieselgate".
Pour eux, aucun doute, le Gapençais, marié à une présentatrice TV allemande, est "le Schumacher du rallye" et tant pis pour Loeb et ses neuf titres de champion du monde.
La multitude de drapeaux fait penser à un col du Tour de France. "En cas de doute, à fond sur les gaz!", est-il écrit sur un étendard espagnol.
"La foule était impressionnante" confiera ravi Jari-Matti Latvala (Toyota) à l'issue du "shakedown", avant d'ajouter: "Qui a dit que le rallye était mort?".