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C'est l'un des nombreux paradoxes de la Formule 1 actuelle: la catégorie-reine du sport automobile, en pleine révolution technologique, produit en 2014 des courses animées, voire même excitantes, mais n'a plus assez de spectateurs pour financer son train de vie.
Le Grand Prix d'Allemagne, ce week-end à Hockenheim, a parfaitement illustré la situation: des tribunes vides vendredi et samedi, pour les essais, puis à moitié pleines dimanche, pour une course disputée par quatre pilotes allemands (Rosberg, Vettel, Hülkenberg, Sutil), dont un leader du championnat du monde et un quadruple champion du monde en titre, et huit monoplaces à moteur Mercedes.
Il n'y a eu que 52.000 spectateurs dimanche dans le Stadium d'Hockenheim, alors qu'il y en a deux fois plus quand le grand cirque du DTM, parfaitement géré par Mercedes, Audi et BMW, plante son chapiteau multicolore sur n'importe quel circuit du seul pays européen où la voiture est encore considérée comme un objet de valeur.
Certes, il n'y a plus d'effet Schumacher, comme quand le Stadium se levait à chaque passage du Baron Rouge, dans sa Ferrari, mais ça ne suffit pas à expliquer la désaffection du public, déjà constatée dans d'autres pays où le ticket d'entrée, pour l'organisateur comme pour les spectateurs, est devenu hors de prix. Surtout par rapport à d'autres sports moins chers et mieux vendus.
Le modèle économique imaginé par Bernie Ecclestone est en fin de cycle. La F1 en tant que sport haut de gamme, qui fait rêver les foules, n'est plus qu'une distraction "corporate" pour quelques privilégiés invités par des grandes sociétés et regroupés dans le Paddock Club, au dessus des stands, pour papoter et siroter du champagne.
- Enfin une prise de conscience ? -
La F1 n'est plus un grand sport populaire, comme à l'époque des duels entre Alain Prost et Ayrton Senna qui incitaient des millions de fans à se réunir chaque dimanche, un peu comme à la messe, devant leur télé. C'est aussi la faute de Formula One Management (FOM) qui préfère vendre ses droits à des chaînes cryptées, comme Canal Plus en France, Sky Sport en Angleterre et en Italie.
Rien qu'en France, le passage de TF1 à Canal+ a divisé par trois l'audience de la F1, et donc la visibilité des sponsors indispensables à l'équilibre financier des écuries. Comme par hasard, la moitié des écuries sont dans le rouge et se demandent comment elles vont terminer cette saison 2014. Alors si les fans ne se déplacent plus sur les circuits, ça va devenir compliqué.
Bien sûr, il y a des exceptions, comme quand 100.000 Autrichiens, privés de F1 pendant 20 ans, se massent autour du circuit de Spielberg, rénové par Red Bull et son mécène aux idées longues, Dietrich Mateschitz. Ou quand 120.000 Britanniques pur jus viennent assister à Silverstone, le temple moderne de la F1, à une victoire de Lewis Hamilton .
Ce sont des exceptions, car le mal est profond. Le commentateur vedette de la RTBF, Gaëtan Vigneron, s'inquiète chaque année pour le GP de Belgique et espère que les tribunes vides d'Hockenheim vont provoquer "une prise de conscience", que les maîtres de la F1 vont enfin réagir à la menace et prendre les décisions qui s'imposent. Car l'agenda sportif est surchargé.
La bagarre se joue sur la piste, mais aussi dans les journaux, à la télé et sur internet. La F1 a encore quelques atouts dans son jeu (champions, circuits), mais ses rivaux sont puissants. Il y a le football, le rugby, le basket, l'athlétisme, le tennis et le golf, dont les pratiquants se comptent par millions. Ça joue aussi, forcément.
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