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Vincenzo Nibali , vainqueur du TOUR DE FRANCE, est le nouveau héros d'un cyclisme italien en crise, dont il revendique l'héritage offensif et romantique tout en s'affranchissant de son sulfureux passé.
En remportant le Tour 2014 après le Giro en 2013 et la Vuelta en 2010, le "Squale de Messine" entre dans une caste très fermée aux côtés des Anquetil, Gimondi, Merckx, Hinault et Contador.
Depuis la dernière victoire italienne de Marco Pantani sur le Tour 1998, l'Italie du cyclisme se cherchait un "fuoriclasse". Elle avait vu tous ses enfants chéris emportés par les affaires de dopage de Pantani à Ricco en passant par Savoldelli, Pellizotti, Di Luca, Scarponi et Basso.
Avec Nibali, elle a retrouvé un cyclisme d'attaque et de panache.
Le Sicilien l'a encore montré sur le Tour, il court à l'instinct. "J'ai toujours aimé attaquer. Je ne suis pas rapide au sprint, je n'ai pas d'autre choix", explique souvent ce coureur de 29 ans qui a pour devise: "risquer de perdre une course est parfois la meilleure façon de la gagner."
"Il n'y a pas que les données scientifiques, l'instinct est important. Comme disait Leonard de Vinci: la théorie ne suffit pas, il faut aussi mettre du coeur et du courage".
- "Laisser mon empreinte" -
Ce coureur "à l'ancienne", bercé des grands exploits du cyclisme qu'il regardait sur les cassettes vidéo du magasin de location tenu par ses parents Salvatore et Giovanna, compte tout de même quelques résultats de prestige: une victoire sur Tirreno-Adriatico 2013, une deuxième place sur Liège-Bastogne-Liège en 2012 et une 3e à Milan-SanRemo 2012, auxquelles il faut ajouter une 3e place sur le Tour en 2012 et une 2e place de la Vuelta en 2013.
A l'heure de la spécialisation, lui s'attache à un cyclisme complet dont il a fait étalage durant trois semaines: solide sur les pavés du Nord, irrésistible dans les ascensions, fiable en descente, bon rouleur de contre-la-montre...
Quand certains multiplient les impasses pour ne viser qu'un objectif, lui rate peu des courses "monuments" qui ont fait l'histoire de son sport. Après sa victoire à Hautacam, il n'a d'ailleurs pas caché qu'il avait voulu "laisser son empreinte dans les Pyrénées" comme ses glorieux aînés.
Ses héros étaient Francesco Moser et Marco Pantani . La mère de ce dernier lui a remis un des maillots jaunes gagnés par son fils. "Je lui donnerai un des miens si tout se passe bien", confiait-il à mi-Tour.
Succéder au "Pirate" de Cesenatico, mort il y a dix ans d'une overdose, "sera un honneur" pour lui même s'il se distingue de son idole en se posant en héraut de l'antidopage.
- "Sans les contrôles, je ne serai peut-être pas là" -
Son ascension patiente et linéaire depuis ses débuts professionnels à 20 ans, à l'opposé des trajectoires aussi fulgurantes que douteuses, lui accordent du crédit auprès du public et des journalistes.
Sa carrière est pourtant jalonnée de rencontres qui alimentent les doutes. Son directeur sportif chez Astana Giuseppe Martinelli a dirigé Pantani chez Mercatone Uno et le responsable de la formation kazakhe, Alexandre Vinokourov , a été suspendu deux ans pour dopage.
Martelé de questions durant le Tour, il a répondu sans détour. "J'ai une bonne relation avec Martinelli. C'est grâce à lui si j'ai pu me rapprocher d'Astana, une équipe qui a beaucoup investi sur le groupe italien pour donner de la crédibilité, a-t-il expliqué, en rappelant qu'il a gardé son entraîneur de toujours Paolo Slongo.
"Dans le passé, des erreurs ont été commises, et par beaucoup de gens. Il faut laisser le passé, donner de la place aux jeunes qui ont la volonté de changer. Il y a les contrôles inopinés, le passeport biologique... On ne peut pas dire que le cyclisme n'a pas changé, on est dans un cyclisme meilleur. Sans tout ça, je ne serai peut-être pas là."
En acceptant en 2013 la lucrative offre de la formation kazakhe (près de 4 millions d'euros par an), cet Italien fédérateur -né en Sicile avant de faire carrière en Toscane- avait fait pleurer les "tifosi". Quelques mois plus tard, il a ranimé leur passion.