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Trente ans après sa retraite sportive, Bernard Hinault quitte le Tour pour de bon. Le quintuple vainqueur du Tour, dernier lauréat français en 1985, vit ses derniers jours comme chef de protocole de l'organisation. Pour pouvoir, enfin, se consacrer à sa famille.
Mercredi matin à Berne, au village départ, Bernard Hinault a le coeur gros. Il vient d'apprendre le décès de son ancien coéquipier Dominique Arnaud. Mais accepte tout de même de répondre aux nombreuses sollicitations. "Tu prends le rythme", dit-il en habitué.
Hinault, c'est le Tour. Huit comme coureur entre 1978 et 1986, dont cinq gagnés (1978, 79, 81, 82 et 85), puis 29 années au sein de l'organisation. En 1977, avant même sa première participation, "je donnais déjà mon avis sur le parcours à TF1", se rappelle-t-il.
Soit quatre décennies consacrées à l'épreuve reine du cyclisme. "J'ai bien vécu pendant 42 ans, je vais essayer de me reposer un peu", doit encore se justifier le Costarmoricain, qui fêtera son 62e anniversaire en novembre.
Dimanche, après le 8e et dernier passage du peloton sur les Champs-Élysées, tout cela sera derrière lui. "Je n'y pense même pas", affirme le champion breton, en paix avec sa décision. "On va tourner la page et on va faire autre chose. Ce n'est pas ça qui me chagrine".
Adieu le Tour, bonjour la famille: Hinault veut consacrer plus de temps à sa femme Martine et à son petit-fils Armand, 20 mois, en attendant l'arrivée d'un deuxième petit-enfant à la fin de l'année.
"Ça fait 42 ans que je suis parti de la maison, c'est le moment de prendre ma retraite. Pour moi, le Tour, c'est 140 jours par an. Les présentations à droite à gauche, ça ne finit jamais".
Sa nouvelle vie aura pour nom Calorguen, bien sûr, le village des Côtes-d'Armor où il vit depuis des années et possède "une vallée et 5 hectares de forêt". Le Blaireau veut se racheter: "J'espère pratiquer un peu plus le vélo avec ma femme, partager des moments que je n'ai pas partagés avec elle, la faire voyager, l'emmener dans des endroits que, moi, j'ai pu voir et qu'elle n'a pas vus."
Et il y aura Armand, son petit-fils qui grandit à 30 kilomètres de son domicile. "Je vais refaire ce que mon grand-père a fait avec moi", anticipe le natif d'Yffiniac, qui a grandi dans une ferme. "Il m'a appris plein de choses: observer la nature, les oiseaux, les animaux. J'espère pouvoir retransmettre ça à mon petit-fils".
Hinault s'éloigne définitivement d'un peloton où les Français peinent toujours à s'imposer, et au sein duquel sa notoriété s'estompe avec les années. "C'est tout à fait logique. Presque 80% des coureurs qui sont aujourd'hui dans le peloton n'étaient pas nés quand j'ai arrêté", calcule-t-il.
-'Irremplaçable'-
Pas question pour autant de tourner le dos au sport qui l'a fait roi. Mardi, comme à chaque jour de repos sur le Tour, Hinault en a profité pour rouler trois heures. En Bretagne, il participe en couple aux sorties du club de sa femme, Saint-Carné. Quant au Tour, il suivra peut-être les étapes à la télévision. "Mais que la dernière heure parce qu'il n'y a pas de course avant", pique-t-il.
Christian Prudhomme garde la surprise de ses adieux au Blaireau, sur lequel il ne tarit pas d'éloges: " Bernard Hinault est irremplaçable. C'est un immense champion, un homme de caractère et un soldat totalement au service du collectif."
Le directeur du TOUR DE FRANCE a su tirer profit du pouvoir d'attraction de Bernard Hinault , notamment dans ses discussions avec les élus. "On va quelque part, Bernard est là, les yeux s'illuminent", s'émerveille Prudhomme, qui vante "l'extraordinaire curiosité" de son fidèle collaborateur.
Une mercière, un crêpier, Hinault est à l'aise partout, distillant ses conseils autant qu'il en reçoit. "Il apprend, il ne cesse d'apprendre tout le temps en se nourrissant des gens qui viennent", admire Prudhomme.
Jeudi, le Blaireau aura peut-être un petit pincement au coeur en apercevant la côte de Domancy, que les coureurs franchiront lors du contre-la-montre entre Sallanches et Megève. Le lieu de son seul sacre mondial, en 1980.
Il a tout de même promis au maire de Düsseldorf, ville du départ du Tour 2017, de faire le voyage en Allemagne. Pour transmettre, évidemment.