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Longtemps menacés par la modernité, les pavés de PARIS-ROUBAIX sont redevenus la fierté d'une région, le Nord, mobilisée pour assurer la protection de son patrimoine et la renaissance d'une classique qui fête dimanche sa 112e édition.
Le bitume a cessé d'avancer sur le parcours, au même rythme que l'urbanisation de la grande banlieue lilloise (TGV, routes, lotissements).
Bon an mal an, une cinquantaine de kilomètres de pavés, sur un total de quelque 75 à 80 kilomètres recensés dans le département, entretiennent la légende. Biseautés, pointus, tranchants, ils font la difficulté de l'épreuve et lui donnent son caractère unique.
En début de semaine, un envoyé spécial du New York Times est venu découvrir la réalité de ces sentes d'un âge désormais lointain, en même temps que la poésie bucolique des lieux. Hormis la trouée d'Arenberg, site qui relève de l'Office national des forêts, les voies pavées sont empruntés seulement par les habitués, des voisins ou des agriculteurs juchés sur leurs gros tracteurs.
L'Enfer du Nord, une appellation héritée des lendemains de la Grande guerre quand les chroniqueurs découvrirent les paysages ravagés par le premier conflit mondial, appartient au passé. Aujourd'hui, les pavés sont "une marque de civilisation", selon la formule de Jean-Marie Leblanc, pendant longtemps à la tête d'une course qui fut sienne en tant que coureur, journaliste puis organisateur.
- Chirurgie esthétique -
Le virage date du début des années 1990. Jean-Claude Vallaeys, à la tête des Amis de PARIS-ROUBAIX, multiplie les initiatives. L'éventualité d'un classement (une fausse bonne idée, qui bloquerait tout aménagement) est envisagée puis abandonnée.
Par-dessus tout, les mentalités changent. Dès 1995, Jean-Marie Leblanc se réjouissait: "Le syndrome de l'Enfer du Nord est surmonté. Maintenant, tout le monde dans le Nord admet que les pavés sont nécessaires, qu'ils font partie du patrimoine de la région."
Les festivités du Centenaire aidant -la course a été créée en 1896-, les politiques prennent conscience de l'intérêt de la "Pascale", l'ancien surnom de PARIS-ROUBAIX à cause de sa date proche de Pâques. Les collectivités, la région (devenue partenaire principal de la course) en premier lieu, s'impliquent. A l'exemple modèle de la Communauté des communes de Pévèle, que PARIS-ROUBAIX traverse dans sa partie décisive après Orchies et jusqu'au carrefour de l'Arbre.
Au-delà du financement des travaux de rénovation, qui s'assimile à de la chirurgie esthétique pour les pavés, l'opération se double d'une dimension éducative, culturelle, quasi-affective. Chaque année, des élèves de lycées horticoles viennent s'exercer sur un ou deux secteurs à réhabiliter.
Ils apprennent leur futur métier d'une filière qui ne demande qu'à prospérer. Car la mode est au minéral, à la fois élégant et fonctionnel, dans l'aménagement urbain.
Enlever les pavés, nettoyer, drainer, terrasser, repaver, élargir la route. Ils sont chaque année quelque 150 élèves à réhabiliter un ou deux secteurs parmi les plus abîmés. Le proviseur du lycée horticole de Raismes a calculé qu'en dix ans, les lycéens avaient posé "environ 50.000 pavés". A raison d'un poids moyen de 7 kilos, le total représente... 350 tonnes.