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© AFP/JEAN-PIERRE CLATOT
Jeannie Longo et son mari et ancien entraîneur Patrice Ciprelli, le 27 octobre 2011 aux Six jours cyclistes de Grenoble
Un an d'emprisonnement avec sursis comme l'a requis le ministère public ou relaxe pure et simple sur un point de droit comme le plaide la défense ? Patrice Ciprelli, mari et entraîneur de la légende du cyclisme Jeannie Longo, jugé jeudi pour importation d'EPO, sera fixé le 9 mars sur son sort.
C'est une audience sportive où la métaphore n'a cessé d'être filée qui s'est tenue au tribunal correctionnel de Grenoble, cinq ans et demi après le début de l'enquête. Et où planait l'ombre de "Mme L.", comme l'a qualifiée le ténor du barreau Eric Dupond-Moretti, venu assurer une défense-éclair de M. Ciprelli.
Ce dernier, col roulé noir et veste sombre, comparaissait à 62 ans pour avoir acheté à l'étranger et importé "en contrebande" de l'érythropoïétine (EPO). Cette hormone est utilisée illégalement pour accroître le volume d'oxygène dans le sang par la stimulation des globules rouges, augmentant ainsi l'endurance des sportifs.
M. Ciprelli est poursuivi pour la commande de 33 boîtes ou flacons pour un montant de 3.110 dollars (2.920 euros) entre le 14 septembre 2008 et le 14 septembre 2011, celles passées antérieurement étant prescrites. Ces paquets arrivaient chez sa mère ou chez un ami.
Des faits contestés d'abord, reconnus une fois en garde à vue au motif d'un usage personnel pour "accélérer sa guérison suite à différentes chutes de vélo", puis systématiquement niés, M. Ciprelli parlant de "piratage informatique" de ses courriels et de ses cartes bancaires ainsi que d'un "complot destiné à atteindre son épouse".
- 'Peste des sportifs' -
Une version que cet ancien champion de ski a maintenue à l'audience, mettant aussi en cause la probité des gendarmes enquêteurs. Ou s'attaquant à la constitution de partie civile de la Fédération française de cyclisme (FFC) que "nous (avec Jeannie Longo, ndlr) avons connue pendant 35 ans prévenir des contrôles anti-dopage et ne pas mettre de sanction aux athlètes contrôlés positifs". C'était l'époque, dit-il, où des coureurs avaient "des fesses comme des passoires".
"Si M. Ciprelli est un champion, c'est bien en matière de mauvaise foi", a déclaré le procureur Olivier Royer, pour qui le prévenu "place tout le monde en position d'accusé pour échapper à ses responsabilités".
Contre Patrice Ciprelli, au casier judiciaire vierge, expert en ski actuellement suspendu par le ministère de Sports et retiré des circuits, le procureur a requis un an de prison avec sursis, "une peine d'avertissement" pour qu'il n'ait "pas le bénéfice de faire traîner" son dossier en utilisant tous les recours possibles.
Pour l'administration douanière, Corine Blanchard a requis une amende de 5.800 euros, soit le double de la valeur des produits importés, rappelant au passage que M. Ciprelli avait été - "ironie de l'histoire" - sous contrat avec les douanes quand il était skieur de haut niveau.
Au nom de la FFC, le bâtonnier du barreau de Grenoble Jean-Yves Balestas a tancé Patrice Ciprelli: "cet EPO, ce n'est pas bien; on sait à quoi ça sert dans le cyclisme. C'est la peste des sportifs". L'avocat a reproché à l'ancien entraîneur de ne "pas avoir la loyauté sportive de dire +j'ai fait un faux pas+", notamment pour ne pas entacher "le talent" de son épouse de championne.
Mais pour Me Dupond-Moretti, qui a promis et tenu de ne plaider que cinq minutes, l'affaire est entendue: "Vous vous êtes tous plantés, je suis navré de vous le dire: nous sommes devant une infraction sans fondement juridique". Pour lui, l'EPO n'est pas une marchandise prohibée au sens du code des douanes car l'exigence de produire une ordonnance médicale date de 2012, soit après les faits poursuivis.