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© AFP/Dani Pozo
Le Dr Eufemiano Fuentes arrive au tribunal de Madrid, le 28 janvier 2013
La justice espagnole a condamné mardi à un an de prison le docteur Fuentes, principal accusé de l'affaire de dopage Puerto, mais a une fois encore frustré les parties civiles sportives en leur refusant l'accès aux poches de sang du médecin.
L'Agence antidopage espagnole a annoncé son intention de faire appel. "Pour moi, l'affaire Puerto n'est pas terminée. Je vais demander à la juge (Julia Patricia Santamaria) de me fournir toutes les preuves de quelle nature que ce soit, y compris les poches (de sang), afin qu'elles puissent être jugées par des autorités compétentes", a réagi sa directrice Ana Munoz au cours d'une conférence de presse.
Sept ans après l'arrestation d'Eufemiano Fuentes et la saisie à son domicile de plus de 200 poches de sang et de plasma, l'affaire Puerto, dont le procès pénal s'était tenu de janvier à mars à Madrid, n'a pas tout à fait accouché d'une souris.
Le médecin canarien a bien été condamné à un an de prison et à quatre ans d'interdiction d'exercice de la médecine sportive pour un "délit contre la santé publique" et le préparateur physique Ignacio Labarta a écopé de quatre mois d'incarcération.
Mais Fuentes ne devrait pas aller en prison, la jurisprudence espagnole stipulant qu'en cas de sentence inférieure à deux ans, l'accusé, s'il n'a pas d'antécédents pénaux, ne passe pas par la case prison. L'ancien gynécologue, cerveau d'un réseau de dopage sanguin démantelé en 2006, peut en outre faire appel.
La juge Julia Patricia Santamaria a estimé avoir assez d'indices pour conclure que Fuentes avait pu porter atteinte à la santé de dizaines de sportifs au début des années 2000, en leur pratiquant des autotransfusions sanguines.
"Les prélèvements et réinjections de sang pratiqués aux cyclistes sur indication de Fuentes avaient pour but exclusif d'élever leur niveau d'hématocrite (...) ce qui supposait un important danger pour la santé des cyclistes", a-t-elle argumenté.
Jesus Manzano, ex-cycliste de l'équipe Kelme et ancien client de Fuentes venu témoigner contre lui au procès, a donc obtenu gain de cause, mais il ne recevra pas les 180.000 euros d'indemnisation qu'il demandait en compensation des dommages causés par le dopage sur son organisme.
"Je me doutais un peu que rien ne se passerait", a-t-il déclaré au journal AS.
"L'Espagne a ce qu'elle mérite. Quand le CIO (comité international olympique) vient, nous nous la jouons, mais nous ne sommes pas capables de faire le ménage. Nous ne méritons pas les Jeux, j'espère que nous ne les aurons pas", a-t-il ajouté en référence à la candidature de Madrid pour les JO-2020 attribués en septembre.
Par ailleurs, les trois autres accusés, les ex-directeurs sportifs d'équipes cyclistes Manolo Saiz et Vicente Belda, et Yolanda Fuentes, la soeur d'Eufemiano, aussi médecin, ont eux été acquittés.
Après l'énoncé des sanctions, l'ex-directeur de ONCE et Liberty Seguros Manolo Saiz, seul accusé présent, a déclaré: "L'opération Puerto est terminée. J'espère qu'on ne m'en parlera plus jamais".
Mais le verdict du procès Puerto ne suffit pas à redorer le blason d'une Espagne à la réputation très laxiste en matière de lutte antidopage.
La juge a en effet refusé l'accès aux 211 poches de sang et de plasma saisies chez Fuentes en 2006 et qui avaient été réclamées par l'Agence Mondiale Antidopage (AMA) et d'autres parties civiles.
"Sont ordonnés la saisie et la postérieure destruction des poches de sang, plasma et autres concentrés sanguins saisis lors des perquisitions réalisées à l'époque", a décidé la juge, tout en précisant que la destruction ne s'effectuerait qu'avec "la résolution définitive".
L'AMA, le Comité olympique national italien (CONI), la Fédération cycliste internationale (UCI) et la Fédération cycliste espagnole (RFEC) peuvent en effet faire appel de cette décision.
L'enjeu? Obtenir par un croisement entre ces échantillons et l'ADN de certains sportifs soupçonnés l'identité d'une partie des clients du médecin, qui a déclaré au début du procès qu'il travaillait "à l'époque avec des sportifs à titre individuel, de tous types". "Ce pouvait être des athlètes, des boxeurs, tel ou tel footballeur", avait-il ajouté, en se disant prêt à donner des noms que la juge ne lui a jamais demandés.
Jusqu'à présent, seuls six sportifs -tous des cyclistes- ont été identifiés parmi les clients du sulfureux médecin, mais en marge du procès, le quotidien "El Pais" a notamment publié des programmes de dopage saisis chez Fuentes en 2006 mettant en cause l'ex-sprinteur italien Mario Cipollini et l'athlète espagnole Marta Dominguez.
Sept ans après les faits, les 211 poches qui dorment dans le laboratoire de Barcelone pourraient bien ne jamais livrer leur vérité.