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© AFP/Benoit Doppagne
Richard Pound, alors président de l'Agence mondiale antidopage (AMA), en conférence de presse le 21 janvier 2005.
La Fédération internationale de cyclisme (UCI) a fermé les yeux sur les pratiques dopantes de Lance Armstrong et certains de ses coéquipiers, assure dans un entretien à l'AFP Richard Pound, ancien directeur de l'Agence mondiale antidopage (AMA) entre 1999 et 2007.
"Ce n'est pas crédible de dire qu'ils ne savaient pas ce qu'il se passait. Je me suis plaint auprès de l'UCI pendant des années", affirme M. Pound, quatre jours après la publication d'un rapport de l'Agence américaine antidopage (Usada) accablant pour Armstrong.
Le Canadien, ancien vice-président du Comité international olympique, a notamment stigmatisé les méthodes de contrôle de l'UCI, déplorant que rien ne fût effectué avant les courses.
"La course partait à 13H00 ou 14H00 et aucun test n'était effectué avant pour voir s'ils étaient chargés", souligne-t-il, ajoutant que les coureurs bénéficiaient d'une heure sans surveillance après leur arrivée: "Il suffisait alors d'une solution saline ou d'un autre moyen de cacher les effets de l'EPO ou de quelqu'autre substance dopante, explique-t-il. C'est à se demander si les contrôles n'étaient pas délibérément voués à l'échec?"
Mercredi, l'Usada avait détaillé dans un rapport de 202 pages accompagné de quelque 1.000 pages de documents le système de dopage mis en place par le champion texan, s'appuyant sur les témoignages de 26 personnes dont 11 de ses anciens coéquipiers. Selon l'Agence américaine, le septuple vainqueur du TOUR DE FRANCE avait mis en place "le programme de dopage le plus sophistiqué de l'histoire du sport" afin de se procurer et d'utiliser entre autres de la testostérone, de l'hormone de croissance, de l'EPO.
"Là où cela clochait vraiment, c'était avec l'UCI", estime M. Pound, qui s'est souvent montré critique envers Hein Verbruggen, l'ancien patron de l'UCI (1991-2005). "S'ils continuent à nier, alors ils mettent leur sport en danger", insiste-t-il, évoquant la poursuite potentielle des enquêtes dans le cyclisme espagnol et italien.
Selon lui, Armstrong, qui a toujours nié s'être dopé, devra cette fois se rendre à l'évidence.
"Je ne pense pas qu'Armstrong puisse dire: +ces 26 personnes sont toutes des menteuses, des tricheuses et crachent dans la soupe+. Je pense qu'il a fait son temps désormais", a-t-il estimé.
"Le meilleur des pires"
"Ce qui serait une surprise, c'est qu'après tout cela Lance persiste à dire qu'il ne s'est jamais dopé. Il a déjà perdu la bataille auprès de l'opinion publique", a renchéri M. Pound, appelant le Texan à s'adresser aux enfants pour leur expliquer: +vous n'avez pas besoin de faire cela pour être un bon coureur+".
"Il faut espérer qu'il va admettre et dire: "J'étais le meilleur des pires".
Cependant, M. Pound a admis que certains supporters d'Armstrong continueront à contester le rapport de l'Usada, surtout aux Etats-Unis: "Il y a beaucoup de personnes qui ont un fort attachement affectif à Armstrong. Ils ne veulent pas savoir que c'était un tricheur. Mais si le piédestal sur lequel il trône s'est construit en trichant, ce n'est plus un piédestal", a-t-il souligné.
L'UCI doit faire face à d'importants remous à la suite de la publication du rapport de l'Usada, qui la soupçonne de complaisance envers l'Américain.
Vendredi, le cycliste britannique David Millar avait demandé à l'UCI de se séparer de M. Verbruggen, qui y conserve encore d'importantes fonctions.
"La première étape pour l'UCI est d'écarter Verbruggen", a assuré Millar, un ancien dopé repenti. "L'actuel président Pat McQuaid doit prendre ses distances. Cela s'est passé sous la présidence de Verbruggen et il y a pourtant eu (à l'époque) de nombreux démentis de l'UCI", a-t-il ajouté.
De son côté, M. McQuaid s'est voulu rassurant auprès de l'AFP, admettant "un grand préjudice pour l'image" du cyclisme, qui va toutefois "très bien".