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Une semaine après le début des Jeux, la Chine n'occupe toujours pas la tête du classement des médailles, mais les médias comme les supporters en ont pris leur parti, estimant que gagner des titres olympiques n'était plus une priorité.
La Chine n'a pas remporté la moindre médaille le jour de l'ouverture des JO pour la première fois depuis 2000, mais supporters et officiels tempèrent les attentes, huit ans après la moisson exceptionnelle des JO-2008 à Pékin.
Le pays communiste occupe la deuxième place au tableau des médailles, avec seulement 30 médailles dont 11 en or, loin derrière les Etats-Unis, leurs 38 médailles et 16 titres. Au même stade à Londres en 2012, les Chinois avaient déjà accumulé 18 titres et trônaient à la première place.
Mais plutôt que d'accabler ses athlètes, la presse officielle opte pour une philosophie inédite. "Les médailles ne représentent pas l'alpha et l?oméga des Jeux", a écrit à la Une le quotidien China Daily, soulignant qu'une "majorité" de supporters chinois apprenaient à apprécier les sports eux mêmes plutôt que la lutte aveugle pour satisfaire la fierté nationale.
"Bien sûr, nous voulons voir nos athlètes gagner le plus de médailles possible, surtout en or. Mais nous devrions applaudir et apprécier les performances de tous nos sportifs, hommes et femmes, dès lors qu'ils donnent le meilleur d'eux-mêmes."
Un revirement spectaculaire, dans un pays où l'Etat a longtemps considéré l'or comme un outil indispensable de l'édification de la gloire nationale et offrait voitures, appartements et grosses sommes aux champions méritants.
- Mendiants et dames pipi -
Les cadres et dirigeants sportifs étaient évalués en fonction du nombre de médailles remportées aux jeux Olympiques, comme dans les compétitions asiatiques, alors que les athlètes incapables de ramener une récompense pleuraient à chaudes larmes et devaient faire acte de contrition.
Même le quotidien d'Etat Global Times, creuset du sentiment nationaliste, souligne que la quête de breloques importe peu. "La confiance du peuple chinois n'a plus besoin d'être nourrie par davantage de médailles".
Ce changement de perception survient alors que la classe moyenne, en constante augmentation, rechigne à envoyer ses jeunes enfants vers des académies sportives ultra exigeantes dans l'espoir de les voir accéder aux podiums.
Les exemples d'anciens champions réduits à faire la manche dans le métro ou reconvertis en "dame pipi" ont choqué les Chinois, soulevant des interrogations sur l'intérêt de prendre ce genre de risques pour l'avenir de leurs enfants.
Les revenus des éphémères champions olympiques sont maigres, car les athlètes ne peuvent accepter tous les parrainages, et nombre d'entre eux doivent partager leurs revenus avec l'Etat.
- La nageuse aux 'bras trop courts' -
D'autres s'interrogent sur les investissements du pays dans le système sportif, alors que le budget de l?administration des sports atteint 3,24 milliards de yuan (500 million de dollars, 450 M EUR) en 2016, selon son site internet.
Mais quand le nageur vedette Ning Zetao, 23 ans, adulé après son titre mondial en 2015, a raté sa qualification pour la finale du 100 m nage libre, il a quand même reçu des témoignages d?idolâtrie dans les médias d'Etat qui ont souligné l'immensité de ses efforts. Une chronique de l'Agence de presse Chine Nouvelle a même félicité les fans, qui "ont dépassé leur fétichisme étroit pour les médailles d'or".
De fait, la mascotte chinoise de ces Jeux n'est pas une star sur-médaillée mais Fu Yuanhui, une jeune nageuse de 20 ans, charmeuse et un peu chien fou. Sa manifestation de joie après avoir battu son record personnel en demi-finale, puis avoir décroché le bronze sur 100 m dos, lui a valu des millions de supporters.
Et quand elle réalisa qu'elle avait manqué l'argent pour un centième de seconde, elle a regretté en riant d'avoir "les bras trop courts".
"Elle a été rigolote et vivante et les gens aiment ça dans le monde entier. Cela va à l'encontre de l'image du chinois-robot", explique à l'AFP Mark Dreyer, rédacteur-en-chef du site China Sports Insider.
Depuis, ses mimiques sont devenues virales sur les réseaux sociaux et ont attiré 4,9 millions de "followers" sur son micro-blog.
"Ca tranche radicalement avec la précédente génération d'athlètes pleurnicheurs qui versaient une larme aux premières notes de l'hymne national, ou qui ne répondaient pas aux attentes de la nation toute entière", souligne un commentaire du Shanghai Daily.