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© AFP/Leon Neal
Les anneaux olympiques en février 2013 à Sotchi
Indemnités d'expropriation non versées, enquêtes pour détournements de fonds publics: les milliards alloués par l'Etat russe pour les jeux Olympiques d'hiver à Sotchi en 2014, déjà les plus coûteux de l'histoire, alimentent la corruption qui gangrène le pays.
Les gigantesques travaux en cours dans cette zone située entre la mer Noire et les montagnes du Caucase, ont entraîné l'expropriation de nombreux habitants à Sotchi pour lesquels l'Etat a débloqué des fonds de compensation.
"Nous avons répertorié des situations où les habitants n'ont tout simplement pas reçu d'indemnisation", a cependant déclaré à l'AFP une responsable de l'ONG Human Rights Watch en Russie, Ioulia Gorbounova.
Un habitant de Sotchi, Evgueni Mzokov, a raconté à l'AFP avoir été expulsé manu militari de sa maison ensuite rasée par des bulldozers en septembre, sans percevoir la moindre compensation.
"Tous nos papiers étaient en règle, mais le tribunal a ordonné l'expropriation et la démolition de la maison. Le lendemain, tout a été rasé, nous n'avons même pas pu prendre nos affaires", explique M. Mzokov devant le terrain boueux où se trouvait la maison.
Elle se trouvait dans un virage et a été détruite officiellement pour fluidifier la circulation pendant les JO, alors que les virages sont nombreux le long de cette route qui serpente dans la montagne, dit-il.
Cette maison de 300 mètres carrés habitables et le terrain de 500 mètres carrés ont été estimés à "environ un million de dollars" par un organisme indépendant, "mais nous n'avons pas reçu un kopeck", tempête M. Mzokov.
"L'argent a été versé par l'Etat à la région de Krasnodar (dont dépend Sotchi) mais ils l'ont empoché", affirme-t-il en accusant le vice-gouverneur responsable de ce quartier de Sotchi.
Les services du gouverneur n'ont pas souhaité répondre aux questions de l'AFP.
Alexandre Mzokov, le père d'Evgueni qui habitait aussi dans la maison, est en colère contre les autorités, après avoir déjà perdu tous ses biens quand il a fui la guerre civile en 1991 dans l'ex-république soviétique du Tadjikistan pour s'installer à Sotchi.
"J'ai tous les papiers qui prouvent que nous sommes en règle", lance-t-il.
"Nous avons fait appel de la décision du tribunal mais l'affaire n'a jamais été examinée et les autorités ne répondent à aucune de nos sollicitations", dit-il chez des amis qui l'ont relogé.
© AFP/Natalia Kolesnikova
Le village olympique de Sotchi en construction le 11 février 2013
"C'est un raid" contre les biens de la famille, ajoute-t-il en référence à certains cas où des hommes armés font irruption dans un bâtiment ou une entreprise pour en prendre le contrôle -- des pratiques qui ne sont pas rares en Russie.
La famille Mzokov dénonce une affaire montée de toutes pièces, illustrant les dérives d'une justice corrompue au service d'intérêts privés ou des autorités, pour détourner des fonds d'indemnisations alloués par l'Etat russe.
La corruption est un mal endémique en Russie, et les sommes astronomiques dépensées pour les préparatifs et infrastructures de Sotchi -- 36 milliards d'euros dont 24 milliards de fonds publics -- alimentent ce fléau.
Des dizaines d'enquêtes ont été ouvertes pour corruption au sein des structures publiques et des entreprises de Sotchi. Plusieurs concernent la société publique russe Olympstroï, qui gère l'ensemble des travaux sur les sites olympiques.
Depuis l'attribution en 2007 à la Russie des JO de Sotchi, les dépenses prévues pour l'organisation de cet événement, dont le président Vladimir Poutine a fait une priorité, ont presque quintuplé.
Les travaux de construction d'un complexe de saut à ski dans les montagnes de Kranaïa Poliana, qui accusent deux ans de retard mais surtout une facture passée de 1,2 milliard de roubles (30 millions d'euros) à 8 milliards (200 millions d'euros), ont valu au vice-président du comité olympique, Akmed Bilalov, responsable du site, d'être limogé par Vladimir Poutine le 7 février, à un an jour pour jour de l'ouverture des JO.