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Même sa mère pense qu'il est "dingue": le Suisse Yvan Bourgnon a bouclé mardi à Ouistreham (Calvados) son tour du monde en catamaran de sport sans habitacle, en solitaire et en naviguant à l'ancienne... vingt mois après son départ des Sables-d'Olonne (Vendée).
Entré dans le port normand à 10h57, il lui a encore fallu près de 2 h 30 min pour mettre pied à terre.
Sous un beau soleil, il a été accueilli par les vivats de centaines de personnes, dont 150 enfants des écoles de la ville scandant "Yvan! Yvan!" au rythme d'une cornemuse.
Après avoir copieusement arrosé journalistes et proches avec son magnum de champagne, il a étreint sa mère, Suzanne, les larmes aux yeux.
"C'est dur d'être une maman avec un fils qui même à cet âge-là (43 ans) fait encore le dingue sur la mer", a-t-il confié aux journalistes présents à son arrivée.
Il est vrai que "dingue" décrit assez bien ce projet de naviguer avec sextant et cartes en papier, sans aucune aide électronique, sur un catamaran de 6,20 m de long, sans habitacle, pour faire 55.000 km en vingt étapes.
En 220 jours de navigation, Bourgnon aura tout connu sur sa "Louloutte", comme il surnomme affectueusement son bateau.
"Entre la Martinique et Sumatra, ce n'était que du bonheur... Des alizés, des vents stables, je me suis éclaté. Je sais pourquoi j'ai fait ce tour du monde, c'est pour ces moments-là", s'est-il souvenu le sourire aux lèvres.
Mais il a aussi eu des moments de découragement, comme lors de son naufrage au Sri Lanka en août.
"Quand je m'échoue, que mon bateau est disloqué, que j'ai une hernie discale, que certains sponsors arrêtent, je me suis dis l'aventure est terminée", a-t-il raconté.
- 'Envie de faire demi-tour' -
Grâce à un élan de mobilisation autour de son projet, l'aide de la ville de Ouistreham et une campagne de financement participatif, il a réussi à payer les 2.000 heures de réparations dans trois chantiers différents pour repartir.
Malheureusement pour lui, la suite n'a guère été plus reposante.
"La partie la plus difficile du défi c'est clairement la Mer Rouge et la Méditerranée (...) des vents contraires permanents, des grosses vagues, des tempêtes, des cargos dans tous les sens, j'ai failli en heurter cinq", a-t-il détaillé.
Mais maintenant qu'il est à terre, il ne veut garder que le positif.
"J'ai beaucoup appris sur le plan médical, physique, mental, des choses incroyables rien qu'au niveau des sens", a-t-il raconté.
"Quand tu es sur ton bateau, que tu arrives à entendre un pétrolier avant même de le voir à l'horizon, tu arrives à sentir la terre avant de la voir, à sentir le vent avant même qu'il souffle dans tes voiles, tu arrives à une espèce d'alchimie avec ton bateau qui est phénoménale", a précisé Bourgnon.
Une relation quasiment organique favorisée par son mode de navigation dépouillé, aux antipodes des navires actuels bardés d'électronique.
Son programme des prochains jours est simple: retrouver les siens, "faire la fête" et "partager", notamment par le biais d'un documentaire de 90 minutes qui sera diffusé sur la chaîne Voyages en septembre.
Mais pour ce spécialiste des raids extrêmes, les envies d'ailleurs ne sont jamais loin.
Déjà, lors des dernières heures de son périple, la tentation de repartir pour un tour s'est fait pressante. "Je peux te dire que j'avais envie de mettre le clignotant à gauche et de faire demi-tour", a-t-il confié.
Mais le Suisse a déjà deux autres projets sous le coude: l'achat d'un maxi-multicoque pour faire le tour du monde contre les vents en solitaire et faire le tour de l'Antarctique sur sa "Louloutte".
Manifestement, sa maman n'a pas fini de se faire du soucis.