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40, 41, 42... a bord de Sodebo Ultim', le trimaran géant (31 m) de Thomas Coville , le speedo s'affole et enregistre même une pointe à 43 noeuds (79,6 km/heure) au cours de cette sortie d'entraînement derrière Belle-Ile.
Friser les 80 km/heure à la voile avec un multicoque océanique de 16 tonnes, dans deux à trois mètres de creux, ce n'est pas banal. Après tout, les catamarans AC72 de la dernière Coupe de l'America, graciles mais fragiles araignées d'eau, n'allaient pas beaucoup plus vite.
Et la baie de San Francisco, l'été dernier, était autrement moins agitée que l'Atlantique lors de cette navigation musclée, destinée à valider un certain nombre de paramètres avant le départ de La Route du Rhum, le 2 novembre à Saint-Malo.
Il y a 25 noeuds de vent à l'anémomètre et nous sommes sous voilure réduite, avec trois ris dans la grand-voile et un tourmentin à l'avant. La coque centrale déjauge légèrement mais le bateau, très large (21,20 m), dégage une formidable impression de sécurité.
"Le gros danger, c'est le chavirage", confie toutefois Coville, 46 ans, qui va disputer son 5e "Rhum", une course qu'il a remportée en monocoque en 1998.
"Je fais un bon binôme avec mon bateau, je suis vraiment en confiance, ajoute-t-il. Mais pour naviguer sur une telle machine, il faut avoir de l'appréhension. Il faut anticiper sans arrêt".
- 'Jeu de lego' -
Sodebo Ultim', mis à l'eau le 19 mai, est l'ancien Geronimo d' Olivier De Kersauson , un plan VPLP tristement abandonné sur un quai de Brest et racheté par Sodebo. Une solution jugée plus économique que la construction d'un nouveau bateau.
Problème: Geronimo n'était plus qu'"une épave", lâche Coville, et il a fallu presque tout reconstruire. La coque centrale a été changée, les étraves des flotteurs ont été refaites et les bras de liaison renforcés. Les architectes de VPLP ont bien travaillé et le bateau, qui a maigri de 6 tonnes dans l'opération, marche comme un avion de chasse.
Les foils, la dérive et les safrans proviennent du trimaran USA17 ("Godzilla") d'Oracle Racing, vainqueur de la Coupe de l'America en 2010.
"Le jeu de Lego s'est bien passé mais c'est ce que j'ai fait de plus compliqué", sourit Coville, 3e du dernier "Rhum" en 2010, derrière Franck Cammas (1er) et Francis Joyon (2e).
- 20 minutes pour un ris -
"Nous avons déjà atteint 46 noeuds (85 km/heure) sous pilote", affirme-t-il, manifestement conquis par sa nouvelle monture. Soit "10 noeuds de plus qu'avec mon ancien Sodebo", un plan Irens/Cabaret de même taille mais beaucoup plus étroit et moins puissant.
"J'ai parcouru 10.000 milles avec Sodebo Ultim' et effectué deux transats, dont une en solo. Ca donne confiance, poursuit-il. Le plus dur, finalement, c'est de ne pas se laisser griser par la vitesse".
Nous "arrondissons" Belle-Ile et revenons maintenant vers la côte bretonne. Les accélérations et le sillage sont toujours impressionnants mais nous ne sommes plus qu'à 32-33 noeuds. "Vitesse de croisière", sourit le skipper.
Sur ces machines surpuissantes, chaque manoeuvre est épuisante tant les poids et les surfaces sont démesurés. Pour larguer un ris dans la grand-voile, Coville s'échinera pendant une vingtaine de minutes, ahanant comme un malheureux sur le "moulin à café" installé dans le cockpit.
Le 2 novembre, Coville fera partie des favoris de cette 10e Route du Rhum, la transat de référence, avec Joyon (Idec Sport), Loïck Peyron (Banque Populaire VII), Lionel Lemonchois (Prince de Bretagne), Yann Guichard (Spindrift 2) et quelques autres.
Et pour la suite, le skipper a plein de projets. Comme celui d'installer des plans porteurs en T majuscule inversé sur chaque safran. Histoire de voler au-dessus de l'eau et d'aller encore un peu plus vite...