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Francis Joyon et Yann Guichard se tenaient prêts jeudi à larguer les amarres à Brest pour partir sur les traces de Phileas Fogg et boucler un tour de la planète en mode TGV, sans escale et en équipage, le Trophée Jules-Verne.
Leurs montures respectives sont deux des plus belles machines de course océanique au monde: Idec Sport et Spindrift 2.
Les deux "monstres" tirent sur leurs aussières, impatients d'en découdre, et leurs routeurs scrutent les fichiers météo, guettant un possible créneau samedi. Il n'est pas exclu qu'ils partent en même temps mais ce n'est pas une obligation.
D'un côté, Idec Sport (30 m), avec un skipper emblématique, Joyon, et un commando international de seulement cinq personnes: le Suisse Bernard Stamm , l'Espagnol Alex Pella, l'Allemand Boris Herrmann ainsi que les Français Gwénolé Gahinet et Clément Surtel, le Néerlandais Marcel Van Triest assurant le routage à terre.
De l'autre, Spindrift 2 (40 m), avec un skipper talentueux, Guichard, et la Suissesse Dona Bertarelli comme co-skipper, accompagnés d'un groupe de Français expérimentés et beaucoup plus nombreux: Sébastien Audigane, Antoine Carraz, Thierry Duprey du Vorsent, Christophe Espagnon, Jacques Guichard, Erwan Israël, Loïc Le Mignon, Sébastien Marsset, François Morvan, Xavier Revil, Yann Riou et Thomas Rouxel. Le routage à terre sera la responsabilité du "sorcier" français Jean-Yves Bernot.
Le record est de 45 j 13 h et 42 min, détenu depuis janvier 2012 par Loïck Peyron et ses 13 équipiers de Banque Populaire V (aujourd'hui... Spindrift 2).
Une fois passée la ligne de départ (et d'arrivée) fictive entre le phare de Créac'h, sur l'île d'Ouessant, et le cap Lizard (sud-ouest de l'Angleterre), il faut laisser les caps de Bonne Espérance (Afrique du Sud), Leewin (Australie) et Horn (Chili) à bâbord, puis rentrer à la maison.
Peyron et ses gaillards ont mis la barre très haut. Pour s'emparer du précieux trophée, il faudra maintenir une moyenne supérieure à 19,75 noeuds (36,5 km/h) sur un parcours de quelque 21.600 milles (environ 40.000 km), et ce pendant six semaines.
- "Une mobylette" -
Pas évident, même si les deux multicoques ont un potentiel de vitesse impressionnant (47 noeuds -87 km/h- pour Spindrift 2).
Deux maxi-trimarans et deux approches très différentes, mais des points communs: ils ont tous deux été dessinés par le cabinet vannetais VPLP et construits par des chantiers bretons (CDK Technologies et Multiplast).
Chaque bateau a ses propres atouts. Déjà très performant, Spindrift 2 a été allégé (de 24 tonnes tout de même) et a encore gagné en puissance. Le "châssis" n'a pas été modifié par rapport à 2012 mais il dispose d'un nouveau mât et les voiles ont été retaillées pour améliorer le comportement du bateau dans les petits airs, potentiellement son point faible.
Idec Sport (17 tonnes) a également été optimisé en vue du record et possède déjà un sacré palmarès: un Trophée Jules-Verne (avec Franck Cammas en 2010) et deux Route du Rhum (2010/Cammas et 2014/Peyron). Rapide, moins extrême que son adversaire - une "mobylette", selon ses architectes - et donc plus facile à manoeuvrer, il sera plus à l'aise dans les phases dites de transition (descente et remontée de l'Atlantique).
Mais dans la longue houle des mers du sud, la plus grande longueur de Spindrift 2 sera un gage de vitesse... et de sécurité, souligne-t-on chez VPLP.
Le Grand Sud, royaume des albatros et des glaces, Joyon connaît bien. Il détient déjà le record du tour du monde en solitaire et sans escale (57 j 13 h et 34 min) et possède une formidable expérience de ces mers énormes, des Quarantièmes Rugissants et autres Cinquantièmes Hurlants.
Dans les moments difficiles, ce sera un atout précieux. Difficile, donc, de dire qui est le favori. "Battre le record serait un exploit", estime Jean-Yves Bernot, et "il n'y a plus grand chose à gratter". On ne saurait mieux dire...