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Dopage, corruption et maintenant conflit d'intérêts? Une nouvelle polémique touche la Fédération internationale d'athlétisme (IAAF): son président Sebastian Coe est soupçonné par la BBC d'avoir usé de son influence dans l'attribution des Mondiaux-2021 à Eugene, berceau de l'équipementier Nike, dont il est l'ambassadeur.
La BBC affirme avoir eu accès à un courriel de Nike de janvier dernier suggérant un lobbying de Coe auprès de son prédécesseur à l'IAAF, le Sénégalais Lamine Diack, pour confier l'organisation des Mondiaux-2021 à la ville américaine. "Je n'ai pas fait de lobbying auprès de qui que ce soit", s'est défendu l'Anglais sur le site de l'IAAF.
Mais ces accusations tombent mal, juste avant la réunion du conseil de l'IAAF, vendredi à Monaco, et moins de trois semaines après le scandale de dopage organisé en Russie. Elles ternissent l'image de Coe: cet ancien champion olympique, élu en août pour succéder au controversé Diack et toujours sous contrat avec Nike, est censé être le chevalier blanc qu'attendait l'athlétisme.
Plus largement, elles jettent le doute sur la probité des grandes instances mondiales du sport, supposées porter des valeurs morales fortes mais dont la crédibilité a été largement entamée par le scandale Fifa.
"Il y a un extraordinaire parallélisme entre la Fifa et l'IAAF, Sepp Blatter et Lamine Diack, ou encore Michel Platini et Sebastian Coe ", analyse auprès de l'AFP Michael Tapiro, fondateur de Sports Management School, une école internationale (Paris et Lausanne) spécialisée en management du sport.
"Platini et Coe appartiennent à une nouvelle génération, ont tenté une mini révolution mais subissent tous deux un retour de boomerang incroyable de la part du système dont ils sont issus", avance-t-il. Selon lui, "c'est un drame pour le sport car ça veut dire que le système est plus fort que les hommes".
- Courriel -
Coe, qui ne touche pas de rémunération comme président de l'IAAF, a toujours joué la transparence à propos de ses rapports avec Nike, qui le rétribue à hauteur de 100.000 livres (142.000 euros) par an.
Mais les circonstances amenant au succès de la candidature du fief historique de Nike ne plaident pas en sa faveur.
Eugene - battue sur le fil par Doha pour l'organisation des Mondiaux-2019 - s'est vu attribuer en avril dernier les Mondiaux-2021, avant que les candidatures ne soient analysées. Cette procédure exceptionnelle avait déjà été utilisée par le passé, permettant à la ville japonaise d'Osaka de recevoir les Mondiaux-2007.
Le courriel cité par la BBC, daté du 30 janvier dernier, est signé de Craig Masback, directeur des affaires commerciales pour le marketing de Nike, et adressé à des responsables de la candidature d'Eugene. "Il (Coe) m'a clairement dit qu'il soutenait Eugene pour 2021 mais, tout aussi clairement aussi, qu'il avait abordé le sujet avec Diack, qui lui a répondu: +je ne vais rien faire lors de la réunion d'avril (à Pékin) quant au choix du site pour 2021+", écrit Masback.
C'est pourtant lors de la réunion d'avril que le conseil attribuera ces Mondiaux à Eugene, alors que la ville suédoise de Göteborg était également candidate et que le vote était attendu en novembre 2016.
- 'Pas de lobbying' -
L'instance a pris la défense de son président, assurant que Coe "ainsi que beaucoup d'autres membres du conseil de l'IAAF, pensaient que le processus habituel d'attribution serait respecté".
"Sollicité par Göteborg, il (Coe) a demandé des éclaircissements au président Diack et avait reçu l'assurance qu'aucune décision ne serait prise à la réunion du conseil en avril", écrit l'instance.
"Je suis furieux à l'idée que nous n'ayons même pas eu la possibilité de candidater et d'être évalués", a déclaré à la BBC Bjorn Eriksson, à l'époque président de la Fédération suédoise d'athlétisme et responsable de la candidature de Göteborg.
L'IAAF se serait bien passée de cette nouvelle polémique. Vendredi lors de la réunion de son conseil -son gouvernement-, elle doit avancer sur le dossier du dopage en Russie, après avoir suspendu provisoirement ce pays de toutes compétitions à neuf mois des jeux Olympiques de Rio.
Et le scandale ne fait que débuter: dans un entretien à The Independent, le président de la commission d'enquête de l'AMA (Agence mondiale antidopage), Dick Pound, promet de nouvelles révélations début 2016.
"Quand nous rendrons publiques ces informations, il y aura un effet de sidération. Je pense que les gens se demanderont comment cela a pu être possible. C'est une trahison complète de ce que les gens en charge du sport devraient faire", a-t-il assené.