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L'Anglo-canadien Martin Parnell, 60 ans, lors d'un marathon à Bamiyan en Afghanistan, le 4 décembre 2016
Son premier marathon, à 48 ans, relevait comme souvent d'un défi personnel. Depuis, Martin Parnell a empilé les records et couru 338 marathons, dont 250 en une seule année au bénéfice des enfants d'Afrique.
Mi-novembre, cet Anglo-canadien désormais sexagénaire a pris le départ d'une course atypique, au c?ur de l'Afghanistan à près de 3.000 m d'altitude, relançant une quête qu'un accident vasculaire cérébral l'an passé avait failli arrêter net.
Plongé dans le coma puis cloué cinq mois dans son canapé, il s'était promis de courir ce marathon au pied de la falaise qui abritait les bouddhas géants de Bamiyan, dynamités par les talibans en 2001.
Déployant sa longue silhouette sèche sur ce paysage de roche rose, Martin raconte comment il en était venu à courir 10.550 km en 2010, à organiser des parties de hockey et de foot de plusieurs jours pour soutenir l'accès au sport des jeunes déshérités.
- 'Ultra runner' -
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L'Anglo-canadien Martin Parnell (g), 60 ans, lors d'un marathon à Bamiyan en Afghanistan, le 4 décembre 2016
"J'ai toujours aimé le sport sans jamais y exceller", confie cet ingénieur des mines en s'étirant. "Enfant, j'étais gros. Puis à 14 ans je suis passé de +Fatty Parnell+ (le grassouillet) à +Skinny Parnell+", le longiligne, ce qu'il est toujours.
S'il existe un physique de marathonien, sûr qu'il le tient. Pourtant la rencontre fut tardive avec ces parcours d'endurance, liée à une suggestion de son frère après le décès de son épouse.
En mai 2003, Peter et Martin s'alignent pour le marathon de Calgary. Bilan: "3 heures et 54 minutes. Pas si mal!", se souvient Martin. Il rempile à Toronto, puis à Boston: "3h22. Je me testais".
Il passe ensuite au triathlon, c'est-à-dire 4 km à la nage + 130 km à vélo + un marathon, le tout en 17 heures. Puis aux Iron Man, épreuve ultime qui empile un marathon sur 4 km de nage et 180 km de vélo.
Martin Parnell devient un "Ultra Runner", il enchaîne des courses aux noms prometteurs, la Blackfoot de l'Alberta (100 km en 13 heures), la Canadian Death Race (Course de la Mort, 125 km), la Sinister Seven (146 km dans les Rocheuses), la Big One et The Lost Souls (Les Ames perdues), chacune 160 km en 35 heures.
A ce stade, courir devient une addiction presque aussi forte que l'héroïne afghane... "Courir, c'est ma séance de méditation, ça me vide l'esprit, je n'écoute jamais de musique pour ne pas me distraire, je regarde autour de moi, j'admire et je pense aux oeufs au bacon que je vais manger après".
- Courir, au nom de l'accès au sport -
Début 2005, lors d'une course à vélo à travers l'Afrique, "quatre mois du Caire à Johannesburg, 100 km par jour six jours par semaine, l'équivalent de trois Tours de France", il découvre un continent et surtout ses enfants.
"Une partie de foot au Soudan, un ping-pong en Ethiopie, en cinq minutes vous avez 100 gamins hilares autour de vous. J'ai réalisé combien le sport pouvait être important pour eux", dit-il.
Martin Parnell rencontre alors l'ONG "Right to Play", le Droit de jouer, fondée par un quadruple champion olympique de patinage de vitesse, le Norvégien Johann Olav Koss, pour promouvoir l'accès au sport partout dans le monde.
A l'été 2009, il s'entraîne pour les 160 km des "Lost Souls" en courant trois marathons par semaine. "Ça laisse le temps de penser".
Il a alors l'idée d'un "Marathon Quest": courir 250 marathons en un an pour lever 250.000 dollars canadiens (190.000 dollars US et 175.000 euros). Au départ, il visait 365 courses, une par jour. Mais Sue, épousée en 2005, a mis son veto.
En 2010, Martin Parnell court ainsi sept marathons officiels en Amérique du Nord et, le reste du temps, il enregistre ses parcours sur son GPS à raison de cinq marathons hebdomadaires du dimanche au jeudi - relâche les vendredi et samedi.
- 'J'étais leur jouet mécanique' -
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L'Anglo-canadien Martin Parnell (g), 60 ans, lors d'un marathon à Bamiyan en Afghanistan, le 4 décembre 2016
"Le jeudi, je courais sur les terrains de foot des écoles, à la récré les élèves venaient m'apporter leur argent de poche, 1 ou 2 dollars, m'offraient du chocolat: j'étais leur jouet mécanique, ils m'adoraient et finissaient toujours les derniers tours avec moi".
Pour tenir, il s'entoure - médecin de famille, kiné, nutritionniste et entraîneur. "Sur un marathon, on n'a pas le droit à l'erreur: mauvais entraînement, mauvais rythme, manque d'hydratation ou de nutriments, au 32e km c'est crampes, vertiges et risque d'abandon".
Comme ingénieur, avoue-t-il, cette mécanique humaine l'a toujours intéressé.
"Le 31 décembre 2010 à 15h00", précise-t-il, "j'avais couru 10.550 km - 12,9 millions de foulées - deux fois la traversée de l'Amérique du Nord".
Depuis, Martin Parnell accumule les records, dont cinq inscrits au Guinness Book. Entre autres, la plus longue partie de Lacrosse, dérivé amérindien du hockey (24 heures), de foot (42 heures), une maxi-partie de hockey à 374 joueurs, et une autre en pleine rue avec 103 gamins.
Les fonds récoltés grâce aux dons et sponsors sont reversés à Right to Play.
A Bamiyan, entre les villages, les ânes et les moutons, il n'a cessé d'encourager Kupra, une jeune Afghane qui hésitait à prendre le départ. "Je lui ai dit d'oublier la course, de se concentrer sur les dix prochaines minutes. Mon meilleur souvenir est d'avoir franchi la ligne d'arrivée en lui tenant la main".