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La délégation kényane, lors de la cérémonie d'ouverture des Jeux de Rio, le 5 août 2016
Avec des coureurs de fond élevés au rang de héros nationaux, le Kenya pensait sans doute oublier les vieux démons du dopage et de la corruption aux jeux de Rio, mais la délégation kényane se sera au final distinguée par des frasques aussi étincelantes que ses performances athlétiques.
Six médailles d'or, dont un doublé inédit sur les marathons masculin et féminin, six d'argent et une de bronze ne suffiront pas à faire oublier les faux-pas à Rio de cette nation est-africaine, dont l'athlétisme est déjà affaibli depuis plusieurs années par de nombreuses accusations de dopage.
En tête des controverses kényanes, le renvoi au beau milieu des jeux du manager de l'équipe d'athlétisme, Michael Rotich, accusé d'avoir réclamé en janvier un pot-de-vin en échange d'informations sur des tests antidopage, suivi par celui d'un entraîneur soupçonné de s'être présenté en lieu et en place d'un de ses athlètes à un contrôle antidopage.
Arrêté à son retour au pays puis libéré sous caution, M. Rotich fait l'objet d'une enquête mais n'a pas encore été inculpé en vertu d'une nouvelle loi antidopage adoptée dans l'urgence avant les jeux à la demande de l'Agence mondiale antidopage (AMA).
Mais au-delà du dopage, c'est toute la gestion de la délégation olympique qui est pointée du doigt, les dérapages allant de vols présumés de tenues sportives officielles au voyage à Rio de dizaines de délégués aux fonctions obscures, vraisemblablement désireux de passer quelques jours tous frais payés du côté de Copacabana.
- Cafouillages administratifs -
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Le ministre kényan des Sports Hassan Wario en conférence de presse le 13 mai 2016 à Nairobi
Les cafouillages administratifs ont aussi été au rendez-vous: lors du départ de l'équipe olympique depuis l'aéroport de Nairobi, aucun billet d'avion n'avait été réservé pour le champion du monde du lancer du javelot Julius Yego , qui s'est paré d'argent aux jeux de Rio.
Le sprinter Carvin Nkanata a quant à lui failli être privé des séries du 200m: aucune accréditation ne lui avait été fournie, entraînant son retour forcé aux Etats-Unis, où il vit, avant qu'il ne soit finalement autorisé à concourir.
Lors de la cérémonie d'ouverture, les athlètes kényans ne portaient pas tous les mêmes tenues, car une partie d'entre elles n'aurait jamais été remise aux sportifs. L'équipementier Nike s'en est plaint auprès de Nairobi, qui a ensuite ordonné l'ouverture d'une enquête sur la gestion de l'équipe olympique.
"Ces histoires à Rio sont une honte, il est choquant de voir que des responsables vendaient des tenues de course", a notamment commenté le député Isaac Mwaura.
De nombreux athlètes sont finalement rentrés de Rio par leurs propres moyens au Kenya pour ne pas s'afficher avec certains responsables lors d'un retour officiel. "Au vu de la manière dont on nous a traité, nous ne voulons pas que certaines personnes obtiennent cette publicité", souffle l'un d'entre eux au quotidien Daily Nation.
- 'Des têtes doivent tomber' -
"Il faudra répondre de certains actes", a lui averti lundi le président kényan Uhuru Kenyatta. "Nous ferons en sorte d'apprendre de ces erreurs, de trouver des réponses, de prendre des mesures".
Déjà sous pression au parlement, où certains députés réclament sa démission, le ministre des Sports Hassan Wario a été convoqué mercredi au Département des enquêtes pénales (DCI).
"Il lui a été demandé d'expliquer ce qui s'est passé exactement à Rio, et plus spécifiquement comment l'équipe a été traitée, qui a voyagé au sein du contingent envoyé à Rio ainsi que d'expliquer les allégations de l'équipementier Nike sur la distribution des tenues", a indiqué à l'AFP une source bien informée au sein du DCI.
"Il est évident que des têtes doivent tomber", a ajouté la même source.
© AFP/Jewel SAMAD
Le demi-fondeur vedette kényan David Rudisha
, vainqueur du 800 m des Jeux de Rio, le 15 août 2016
M. Wario a semblé jeudi vouloir détourner les foudres le visant en annonçant la dissolution du Comité national olympique (NOCK). "Les allégations à l'encontre du Comité national olympique sont une menace immense envers la stabilité et la réputation des jeux Olympiques dans le pays".
Mais le NOCK a aussitôt rappelé que M. Wario n'en avait pas le pouvoir, car l'organisation dépend du Comité international olympique et non du gouvernement.
Reste à savoir si le tollé provoqué par les frasques des officiels kényans à Rio donnera lieu à des poursuites ou si les récentes déclarations comminatoires de l'exécutif s'ajouteront à longue liste des promesses de lutte contre la corruption restées lettre morte.