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© AFP/Kawamoto Manabu
Christophe Lemaitre
devant des chaussures de sprint à l'Institut Asics sport et sciences de Kobé le 8 janvier 2013
Christophe Lemaitre et ses confrères sprinteurs jouent souvent leur carrière sur quelques centièmes de seconde: une infime fraction de temps qui distingue les champions des autres et se cache peut-être dans les chaussures.
Du sur-mesure à l'autre bout du monde !
Depuis près de deux ans, le sprinteur savoyard bénéficie d'un modèle de pointes sur mesure. Un concentré de technologie, réalisé au centre de recherche et développement de son équipementier, Asics, installé dans un austère bâtiment de huit étages des faubourgs du nord de Kobe, au Japon.
La conception de ces chaussures de sprint a débuté en janvier 2011.
Quelques mois après son doublé européen à Barcelone (100 et 200 m), à l'été 2010, Lemaitre fait le voyage vers Kobe, où il est soumis pendant trois jours à une batterie de tests, physiques, techniques et physiologiques.
Le corps couvert de capteurs, il enchaîne les sprints sur une piste où sont enregistrés la force et l'impact de ses appuis au sol. Ses mouvements sont filmés par des caméras à fréquence rapide. Son corps est scanné en 3D. Ses pieds sont mesurés avec une précision scientifique.
Un premier prototype lui est proposé début 2011. Puis une équipe d'experts japonais fait le déplacement à Aix-les-Bains, en juillet de la même année.
"Un modèle sur-mesure doit intégrer les particularités morphologiques de l'athlète mais aussi sa technique de course", explique Kimiya Tasaki, le responsable du secteur au sein d'Asics.
Dans le cas du sprinteur français, doté d'un grand gabarit (1,91 m) mais d'un manque relatif de puissance et de souplesse, l'effort a été porté sur la rigidité de la semelle, la légèreté du produit et l'implantation des pointes.
Les deux pieds sont quasiment identiques, mais la chaussure gauche est plus longue de cinq millimètres, 29,5 cm contre 29 cm à la droite.
"Il ne fait pas la même pointure aux deux pieds", précise Kimiya Tasaki.
Christophe Lemaitre se souvient d'avoir cassé le premier prototype.
Aux Mondiaux-2011 à Daegu, en Corée du Sud, il en a également détruit une paire avant la finale du 100 m.
© AFP/Kawamoto Manabu
Christophe Lemaitre
lors des mesuures d'essai d'une nouvelle paire de chaussures de sprint à l' Institut ASICS de sport et des sciences à Kobé le 8 janvier 2012
La version actuelle, la sixième du nom, fabriquée pour les JO de Londres, pèse 150 grammes. Sa semelle est faite d'un assemblage de dix épaisseurs de carbone. Elle compte sept pointes moulées. Le reste de la chaussure est constitué pour l'essentiel de cuir synthétique.
"Elle allie rigidité et confort ", explique le Français.
La prochaine, celle testée cette semaine à Kobe, devrait avoir une semelle relevée de quelques degrés. Le Français pourrait les utiliser aux Mondiaux de Moscou, en août 2013.
Quatre semaines sont nécessaires, depuis la prise des données, à la fabrication d'un modèle de pointes sur-mesure. Les pièces sont assemblées à la main et cousues à la machine.
Au total, une trentaine de personnes sont impliquées dans la réalisation du produit. Le modèle utilisé par Christophe Lemaitre a été dessiné par l'ancien designer des motos du pilote français Olivier Jacques chez Kawasaki.
"Il est impossible de déterminer avec précision le gain apporté par un modèle sur-mesure sur la performance d'un sprinteur", suggère Norihiko Taniguchi, un docteur en mécanique en charge des produits spécifiques chez l'équipementier japonais. "Mais Christophe portait l'une des dernières versions du produit lors de son record de France du 100 m" (9.92 le 29 juillet 2011 à Albi).
Le Savoyard estime à "2 ou 3 centièmes" l'apport de ses chaussures. Mais il nuance: "Ces quelques centièmes sont importants, ils peuvent faire la différence. Mais je sais que je peux aussi les gagner en travaillant dur à l'entraînement."