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© AFP/Yuri CORTEZ
Un garçon brandit une photo de la star du Real Madrid et du Portugal, Cristiano Ronaldo
, lors du match de la Coupe des Confédérations contre le Mexique, le 18 juin 2017 à Kazan
Amour, haine. Pour les "socios" du Real Madrid, supporters-actionnaires du club, personne n'est plus grand que l'institution, pas même Cristiano Ronaldo . Et cette relation n'en est que plus orageuse avec les menaces de départ de l'ombrageux attaquant, inquiété par la justice espagnole.
Alors que la rumeur d'un transfert enfle depuis quelques jours, l'amertume domine chez ces piliers du Real, géant planétaire qui conserve une structure associative et dont le capital est détenu par ses 90.000 membres.
Depuis vendredi "il n'a rien dit" pour démentir et calmer les esprits, se plaint l'un d'entre eux sur le fil de discussion de la "peña" Capote et Montera (association de supporters, NDLR) du sud de Madrid, à Vallecas, tandis qu'un autre dénonce une "tactique pour gagner de l'argent".
Ce risque de départ plane depuis l'annonce le 13 juin du dépôt d'une plainte visant Ronaldo pour une fraude fiscale présumée de 14,7 millions d'euros. Mardi, le Portugais a été convoqué par la justice le 31 juillet, cette fois aux fins de mise en examen.
Selon le président du club Florentino Perez, Ronaldo se serait senti "injustement traité" par la presse dans cette affaire. Et selon certains médias, le joueur en veut aussi au club et aux supporters qui n'ont pas affiché un soutien public aussi net que celui dont a bénéficié son grand rival du FC Barcelone, Lionel Messi , condamné pour fraude fiscale en 2016.
- 'Le socio est le maître' -
D'autres enfin y voient un chantage pour obtenir que le Real Madrid compense son éventuelle amende.
"Si ce qu'il recherche c'est que le Real Madrid paye son amende, et que nous les +socios+ allons le permettre... eh bien il est mal barré", déclare à l'AFP Nabil Alturek, qui fréquente le stade Santiago-Bernabeu depuis l'âge de 12 ans.
Nabil, 44 ans, propriétaire d'une agence de voyage et "socio" depuis 20 ans verse 500 euros par an de cotisation, en plus des entrées pour les matches.
Il explique que Ronaldo, meilleur buteur de l'histoire du club et quadruple Ballon d'Or, n'a pas forcément conquis tous les supporters merengues. Ses "gestes pour faire taire" le public quand il siffle, source de polémique depuis son arrivée en 2009, ne sont pas appréciés, poursuit le fan.
Au Real Madrid "le socio est le maître", assène-t-il, et il est légitime de pouvoir siffler un joueur, fût-il une icône de mode, à l'origine d'immenses revenus en produits dérivés. D'autres figures du Real ont d'ailleurs subi les foudres du Bernabeu, de Raul à Iker Casillas .
"Ce que l'on ne va pas faire, c'est lui demander à genoux qu'il reste", ajoute fièrement Nabil.
Ces socios "sont une minorité", tranche pour sa part un autre supporter, Gerardo Tocino, de la peña "La grande famille". "Ces gens-là sont tellement exigeants qu'ils ne réalisent pas que c'est du sport, parfois ça marche, parfois pas. (...) et si les choses vont mal et bien il faut encourager".
- Chantage émotionnel -
Mais tout chantage émotionnel pourrait nuire à l'image du sportif le mieux payé du monde. "Si Ronaldo croit qu'il est innocent, il devrait se défendre devant les tribunaux (...) et pas avec des menaces de départ", a écrit un éditorialiste du quotidien El Pais, Manuel Jabois, en refusant que l'image du Real soit "compromise".
"Les supporters sont beaucoup plus exigeants avec leur club... En comparaison ceux du Barça sont plus masochistes, moins critiques", note l'historien Eduardo Gonzalez Calleja, qui a écrit sur les deux clubs. Cristiano Ronaldo "n'est pas aussi chéri que d'autres joueurs, comme (le capitaine) Sergio Ramos ", estime-t-il encore.
Les réactions du Bernabeu sont en réalité "identitaires", analyse-t-il car l'identité merengue se dilue: "Le business est à l'étranger, les joueurs viennent d'ailleurs, la compétition est extérieure". "C'est une manière de dire: +nous sommes encore les patrons du stade+", ajoute l'historien.
Cette contestation ne semble pas du goût du président Florentino Perez, fraîchement reconduit lundi pour un cinquième mandat. Le dirigeant a promis de s'attaquer au problème, après avoir déjà chassé les ultras.
"Il n'est pas normal de jeter des pierres sur notre propre toit", a-t-il déclaré à Marca dans un entretien. "Ce n'est pas normal de siffler un membre de ta propre famille."