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© AFP/KHALIL MAZRAAWI
L'équipe jordanienne des -17 ans lors d'une séance d'entraînement à Amman, le 27 septembre 2016 à 3 jours du Mondial Cadet
"Je n'ai pas assisté aux cours depuis un mois. La proviseure (du lycée) m'a dit +Ne pense à rien. Seulement à la Coupe du monde+" : à Amman, à 24 heures du match d'ouverture du Mondial des -17 ans, premier tournoi féminin mondial jamais organisé au Moyen-Orient, Anoud Gazi brûle d'impatience.
"Nous avons travaillé dur", insiste auprès de l'AFP cette lycéenne jordanienne, qui doit passer son baccalauréat en fin d'année. Mais pour l'instant, la défenseure centrale a mis ses études entre parenthèses, et place à ce qui a toujours été "un rêve" pour elle : "jouer une Coupe du monde !"
Avec ce Mondial, la Jordanie et la Fifa, la Fédération internationale, veulent laisser un héritage durable et ancrer le football féminin dans un pays et une région où voir des jeunes femmes courir derrière un ballon est encore rare.
Elles sont pour l'instant 13.890 licenciées seulement dans les 19 pays de la zone Moyen-Orient et Afrique du Nord, majoritairement musulmans, selon les chiffres de la Fifa.
"Il reste encore beaucoup à faire, mais les premières graines ont été plantées", souligne-t-on au Comité d'organisation, en ajoutant que cet événement est le "point d'orgue d'un long programme de développement du football féminin" en Jordanie.
- 'Briser les stéréotypes' -
Comme dans les autres pays du Moyen-Orient, le football est certes le sport roi dans le royaume conservateur. Mais il reste avant tout un sport d'hommes, comme le regrette Amjad al-Fakhouri, le père de Zina, présent au bord du terrain.
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Les cadettes jordaninnes lors d'un entraînement à Amman, le 27 septembre 2016
"Depuis trois ans, j'emmène ma fille à l'entraînement et je l'attends jusqu'à la fin", témoigne-t-il. "Je lui paie des cours particuliers pour qu'elle rattrape les cours qu'elle rate au lycée. Et je l'encourage pour qu'elle devienne une bonne footballeuse et brise les stéréotypes de notre société orientale qui refuse le fait de voir une fille en short et qui joue au football."
Pour inciter les Jordaniens à se rendre en masse au stade pour encourager leurs cadettes, une campagne a été lancée depuis plusieurs mois à travers le pays : "Un seul coeur, un seul but, une seule équipe", lit-on ainsi sur des affiches dans la capitale, Amman, avec les portraits de cinq joueuses souriantes invitant les Jordaniens à assister au "match historique" contre l'Espagne vendredi.
Pour ce match d'ouverture, les organisateurs tablent sur un stade comble, avec 13.000 spectateurs au rendez-vous. Et les joueuses font l'objet de toutes les attentions à l'approche de la compétition, arrivant à l'entraînement dans un bus flambant neuf escorté par plusieurs voitures de police, gyrophares enclenchés.
- Foot et diplomatie touristique -
En accueillant cette compétition, les autorités veulent promouvoir le sport au féminin. Mais le but est aussi de faire émerger l'image d'un "pays ouvert", d'un "havre de paix" au milieu des conflits du Proche-Orient qui ont terni la réputation du royaume en tant que destination touristique, faisant chuter les recettes.
La Coupe du monde "est une occasion qu'il faut exploiter pour promouvoir (l'image de) la Jordanie", a insisté la ministre du Tourisme, Lina Annab, précisant qu'une campagne promotionnelle a été lancée et que des visites des sites touristiques seront organisées pour les délégations sportives participantes et les supporters.
Au niveau sportif, les Jordaniens ne se font pas d'illusion. Leur sélection aura du mal à rivaliser avec d'autres équipes plus aguerries. En match amical, une semaine avant le début du Mondial, les Jordaniennes se sont ainsi inclinées face au Brésil sur le score sans appel de 7 à 0.
Mais les joueuses restent optimistes. Sarah Abu Sabbah, avant-centre de la sélection et du club allemand du Bayer Leverkusen rappelle que "le football est plein de surprises". "Qui aurait imaginé que l'Allemagne allait battre le Brésil 7 à 1 chez lui" en demi-finale de la Coupe du monde 2014 ?, fait-elle remarquer.