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L'Espanyol Barcelone et Sochaux rachetés par des groupes chinois, Valence géré par un magnat de Singapour, un milliardaire indonésien à la tête de l'Inter Milan : l'appétit des investisseurs asiatiques pour le football européen est grandissant.
"Il y a un très fort potentiel de croissance dans l'industrie du football et le gros du marché se trouve en Europe, pas en Asie", analyse Raffaele Poli, directeur de l'Observatoire du football au CIES (Centre international d'étude du sport à Neuchâtel, en Suisse).
L'Inter Milan mis à part, les clubs sur lesquels les Asiatiques jettent leur dévolu disposent tous d'une histoire riche et d'une assise populaire, mais ne sont pas des premiers couteaux de leur championnat, lesquels sont inaccessibles.
L'annonce mardi par le chinois Rastar, spécialisé dans les jouets, les jeux vidéos et les modèles réduits, d'un accord avec plusieurs actionnaires de l'Espanyol pour le rachat d'une partie du capital est en tout cas le dernier exemple d'un phénomène qui va croissant.
Rastar devrait se porter acquéreur de 45,1% à 56% des actions et injectera jusqu'à 45 millions d'euros dans l'Espanyol, ce qui portera le montant total de l'opération à environ 64 millions d'euros. Avec à terme la volonté de posséder "plus de 80% du club", selon Yang Nong, secrétaire exécutif du conseil d'administration du groupe chinois.
L'arrivée de Rastar est une bouffée d'oxygène pour l'Espanyol, l'autre club de Barcelone avec le mythique Barça. Le club, qui a terminé 10e du Championnat d'Espagne 2014-2015 et occupe cette même place cette saison, est en proie à de graves problèmes économiques, la presse espagnole faisant état de dettes auprès du Trésor public espagnol et de fournisseurs.
Pour l'économiste français Bastien Drut, ce n'est pas un hasard si l'essentiel des investissements venus d'Asie se fait en Espagne ou en Italie, où "la situation financière des clubs est mauvaise avec un fort endettement".
- L'Angleterre moins accessible -
"C'est beaucoup plus difficile d'avoir accès aux clubs anglais qui ont des revenus très importants grâce à l'augmentation des droits TV alors que les clubs espagnols et italiens font peu de bénéfices", explique-t-il. En Premier League anglaise, seul Leicester est possédé par des capitaux asiatiques (Thaïlande).
"L'intérêt en provenance de l'Extrême-Orient est grandissant mais étant donné le caractère contraignant du fair-play financier, je ne pense pas que ces investissements en Angleterre atteindront une échelle massive", analyse Rob Wilson, expert des questions financières liées au football à l'Université de Sheffield.
Les choses sont différentes en Espagne et en Italie. L'acquisition de l'Espanyol par Rastar suit de peu l'arrivée d'un autre groupe chinois dans le football espagnol. Le conglomérat chinois Wanda a acquis en mars dernier 20% des parts de l'Atletico Madrid pour environ 45 millions d'euros.
En 2014, le magnat singapourien Peter Lim a pris le contrôle du club de Valence, lui aussi lourdement endetté, pour un investissement estimé par la presse à au moins 300 millions d'euros.
En Italie, l'homme d'affaires indonésien Erick Thohir dirige l'Inter Milan depuis 2013 alors que son homologue thaïlandais Bee Taechaubol a confirmé fin septembre son intention de racheter une partie de son grand rival, l'AC Milan, propriété de l'ancien chef du gouvernement Silvio Berlusconi.
- 'Folie des grandeurs' -
En France, le FC Sochaux (Ligue 2), associé depuis sa création en 1928 au constructeur automobile Peugeot/PSA, est passé sous pavillon chinois avec son rachat par le groupe Ledus.
"On peut avoir quelques doutes sur la rationalité économique de certains investissements. Il peut y avoir des questions d'image pour ces figures locales très riches, une sorte de folie des grandeurs à vouloir investir dans un secteur très populaire en Asie", estime M. Poli.
Bastien Drut insiste de son côté sur la volonté de certains grands investisseurs de contrôler toute l'économie liée au football et "toute la structure des revenus", des clubs eux-mêmes aux droits TV et marketing.
A l'image de l'engagement du Qatar, propriétaire du Paris SG et de la chaîne de télévision beIn Sports, détentrice d'une partie des droits TV de la Ligue 1, Wanda a ainsi racheté en début d'année l'agence de marketing sportif Infront, également convoitée par le fonds souverain... qatari.