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Chaque jour apporte son lot de révélations sur la corruption au sein de la Fifa, les procédures judiciaires se multiplient dans le monde et les confessions de Chuck Blazer, l'ancien haut responsable repenti, évoquent des pratiques mafieuses.
. De combien d'affaires parle-t-on ?
Il y a d'abord deux branches principales dans l'arbre judiciaire, une américaine et une suisse. La justice américaine est partie des aveux du millionnaire américain à la barbe de père Noël, Chuck Blazer, ancien membre du comité exécutif de la Fifa, qui a plaidé coupable en novembre 2013 de racket, virements frauduleux, blanchiment d'argent et évasion fiscale. De ces confessions découlent les arrestations du 27 mai dans un luxueux hôtel zurichois de sept dirigeants de la Fifa qui dorment toujours en prison en Suisse. Au total, la justice nord-américaine a inculpé 14 responsables de la Fifa et du marketing sportif dans un dossier comptabilisant 150 millions de dollars de malversations.
Le parquet suisse a lui saisi des documents électroniques au siège de la Fifa à Zurich, le 27 mai également, dans le cadre d'une procédure pénale contre X pour soupçon "de blanchiment d'argent et gestion déloyale" entourant les attributions des Coupes du monde 2018 et 2022 à la Russie et au Qatar. C'est la Fifa qui est à l'origine de cette dernière procédure: elle avait porté plainte le 18 novembre.
De ces deux branches partent ensuite les ramifications mondiales. En marge de l'enquête américaine, la police sud-africaine s'intéresse à de présumés pots-de-vins versés par l'Afrique du Sud pour obtenir le Mondial-2010, et la justice vénézuélienne a perquisitionné le siège de la Fédération (dont le président est retenu en Suisse) à Caracas. La police australienne se penche elle sur un détournement de fonds présumé, au profit du sulfureux Jack Warner, ancien vice-président de la Fifa, dans le cadre de la candidature de l'Australie à l'organisation du Mondial-2022.
. Combien de Coupes du monde sont concernées ?
Les procédures d'attribution de quatre Coupes du monde sont désormais passées au crible. Celle de 2018 en Russie a surtout le tort de s'être produite le même jour, le 2 décembre 2010, et par le biais du même corps électoral, le comité exécutif de la Fifa (une vingtaine de membres), que celle du Qatar pour 2022. Le choix de la Russie pouvait relever d'une certaine logique: le pays est dimensionné pour l'événement par sa taille, son histoire footballistique et l'organisation des jeux Olympiques d'hiver à Sotchi en 2014. Celui du Qatar a tout de suite soulevé des interrogations, toutes balayées jusqu'ici par le riche émirat gazier.
Les aveux de Blazer, rendus publics, jettent un autre pavé dans la mare, avec des pots-de-vins versés par le Maroc -- à une personne non identifiée -- qui tentait d'obtenir l'organisation du Mondial-1998, finalement attribuée à la France. Blazer fait aussi froid dans le dos quand il parle du Mondial-2010: "A partir de 2004 et jusqu'en 2011, moi et d'autres membres du comité exécutif de la Fifa, nous avons accepté des pots-de-vin en vue de la désignation de l'Afrique du Sud comme pays organisateur de la Coupe du monde 2010".
. Comment la justice américaine a-t-elle procédé ?
On est ici en plein film policier, comme dans les "Affranchis" de Martin Scorsese, avec Robert De Niro. "C'est un travail de longue haleine, mais il n'y a pas d'urgence (...) Ils réunissent des données, ici et à l'étranger, pour corroborer les accusations et ils avancent de plus en plus vers le sommet", détaille détaille l'avocat David Weinstein, qui met en avant des similarités avec les enquêtes contre les syndicats du crime organisé conduites par le célèbre ministre de la Justice Robert Kennedy à la fin des années 1960.
D'anciens membres de la Fifa ont plaidé coupable, d'autres inculpés arrêtés aux Etats-Unis collaborent déjà avec les autorités judiciaires tandis que les sept responsables interpellés en Suisse sont sous le coup d'une procédure d'extradition, soit pour les inciter à coopérer à leur tour, soit pour qu'ils rendent des comptes devant la justice américaine.
"La pression pèse sur eux pour collaborer ou apporter des preuves qui les disculperont ou allègeront leur peine", expose l'avocat David Weinstein, ancien procureur à Miami.
. Quelle seront les suites ?
Toute l'enquête a "pour but ultime" de faire tomber toutes les têtes et "d'engager des poursuites en haut lieu", explique à l'AFP John Lauro, ancien procureur de New York.
Et la démission mardi de Joseph Blatter de la présidence de la Fifa le prouverait. Selon les médias américains, tout porte à croire que le Suisse de 79 ans a été informé directement qu'il était la cible principale.
Dans ses 47 chefs d'accusation, la justice américaine délivre en tout cas un état des lieux impitoyable d'une corruption "endémique et profondément enracinée", dans l'instance suprême du foot mondial.