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La tourmente qui secoue la Fifa depuis une semaine, avec en point d'orgue la démission de son président Joseph Blatter annoncée mardi, jette le doute sur la Coupe du monde 2022 au Qatar bien plus que sur celle de 2018 en Russie.
. Menace protéiforme
Michel Platini , président de l'UEFA en pointe dans la fronde anti-Blatter et perçu comme un candidat possible à sa succession, a déjà dit que "s'il y a des preuves de corruption, il faudra revoter".
La menace planant sur les deux prochaines Coupes du monde, attribuées le 2 décembre 2010 par un vote du comité exécutif de la Fifa, provient de plusieurs fronts.
Il y a l'enquête interne à l'instance consignée dans le rapport Garcia. La chambre de jugement de la commission d'éthique y a relevé en novembre dernier "des comportements douteux" mais pas de quoi remettre en cause le processus d'attribution.
L'enquêteur Michael Garcia avait alors tonné contre la présentation "erronée et incomplète" de son rapport, et réclamé sa publication intégrale. Devant le refus de la Fifa, l'Américain a démissionné avec fracas. Blatter s'est ensuite engagé à le publier à l'avenir "sous une forme appropriée"; son successeur pourrait en décider autrement et ainsi précipiter d'éventuelles révélations.
Les justices suisse et américaine enquêtent en disposant de moyens légaux et coercitifs autrement plus puissants. La justice helvétique a saisi mercredi dernier des documents électroniques au son siège zurichois de la Fifa dans le cadre d'une procédure pénale contre X pour soupçon "de blanchiment d'argent et gestion déloyale" entourant les attributions des deux Coupes du monde.
. Mondial-2018 en Russie : statu quo ?
L'attribution de la prochaine Coupe du monde à la Russie, au nez et à la barbe des candidatures de l'Angleterre et des duos Portugal/Espagne et Belgique/Pays-Bas, a suscité une surprise mesurée. La Russie semble dimensionnée pour l'événement par sa taille, son histoire footballistique et l'organisation des jeux Olympiques à Sotchi en 2014.
Le dossier russe passe au second plan par rapport au dossier qatari, et le calendrier protège de fait son Mondial : il se déroule dans trois ans seulement, un délai qui pourrait être trop court pour le réattribuer. D'autant que les groupes de qualifications seront tirés au sort dès le 25 juillet, à Saint-Pétersbourg et que la Coupe des Confédérations doit se tenir dès l'été 2017.
"La Russie poursuit les préparatifs du Mondial-2018", a d'ailleurs indiqué le Kremlin mercredi, alors que Vladimir Poutine en personne a ostensiblement soutenu Blatter, dès le déclenchement du scandale de la semaine dernière, accusant notamment la justice américaine d'outre-passer son périmètre. La question géopolitique, sur fond de tensions russo-occidentales dans le conflit ukrainien, incite au statu quo pour le Mondial-2018.
. Mondial-2022 au Qatar : nouveau vote ?
La désignation du minuscule émirat gazier (devant les candidatures des Etats-Unis, de l'Australie, de la Corée du Sud et du Japon) avait provoqué une énorme surprise et aussitôt déclenché des accusations de corruption.
Si les doutes persistent, aucune preuve formelle n'a été apportée, même si le fameux e-mail du N.2 de la Fifa Jérôme Valcke, écrivant "ils ont acheté le Mondial", a jeté le trouble, avant que le Français ne se retranche derrière un "ton léger".
Mais 2022 est encore loin, et l'activisme du Qatar dans le sport international et la diplomatie n'a pas empêché les ombres de s'accumuler, entre le déplacement du tournoi en hiver et les accusations d'esclavage sur les chantiers des stades.
Qu'il le veuille ou non, le Qatar est ainsi devenu le symbole écornant l'image de la Fifa et de son produit phare, la Coupe du monde. De nombreuses voix dans le foot s'élèvent pour appeler à réattribuer ce tournoi, à l'image de Theo Zwanziger, l'ex-président de la Fédération allemande qui a carrément traité le Qatar de "cancer pour le football mondial".
Doha répond sans cesse en faisant le bon élève, assurant avoir respecté les "plus hauts standards éthiques" pour obtenir l'organisation du Mondial-2022. Et mercredi, la Fédération qatarie s'est estimée "blanchie de toute irrégularité" par l'enquête Garcia, et dite "prête à accueillir" les équipes de la justice suisse.
Avant de se reprendre, la Bourse du Qatar a fortement baissé à l'ouverture mercredi au lendemain de la démission de Blatter, signe d'une incertitude grandissante.
Mais le Qatar dispose aussi d'atouts dans son jeu : il compte de nombreux relais politiques, et Platini avait voté en sa faveur pour ouvrir le foot à d'autres horizons.