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Propriétaire de biens immobiliers, d'entreprises, de journaux... l'ex-vice-président de la Fédération internationale du football Jack Warner, homme-clé du scandale de corruption au sein de la Fifa, est à la tête d'un empire sur sa petite île caribéenne de Trinité-et-Tobago.
Mais à l'image de toute sa carrière au coeur du football mondial -il a été membre du comité exécutif de la Fifa dès le début des années 80-, obscur parcours émaillé d'irrégularités, la taille de cet empire reste mystérieuse.
"Assurément, je ne sais pas combien vaut M. Warner", reconnaît le procureur général de Trinité-et-Tobago, Garvin Nicholas, qui estime qu'il serait très difficile de compter "chaque centime, chaque compte bancaire et chaque entreprise" de l'ancien responsable de la Fifa et influent homme politique local.
L'écheveau est si difficile à démêler que même la justice américaine, qui vient d'accuser 14 hiérarques du football planétaire de corruption, a mis des années à monter son dossier contre lui.
Selon Camini Marajh, journaliste d'investigation qui a suivi le sulfureux Warner de près pour le quotidien local Trinidad Express, sa fortune pourrait s'élever à 160 millions de dollars. Mais cela ne tient pas compte des entreprises inscrites aux noms de tiers.
- Litanie d'accusations -
"Il est propriétaire de nombreux immeubles, il détient une soixantaine d'entreprises et aussi des entreprises fantômes et d'autres biens liés à d'autres personnes, explique Mme Marajh à l'AFP. Il compte parmi les habitants les plus riches de Trinité-et-Tobago."
Et les affaires se gèrent en famille: son épouse et ses deux fils, tous deux en détention aux Etats-Unis où ils ont collaboré avec la justice, sont à la tête de plusieurs propriétés.
La fortune de Jack Warner, 72 ans, libéré sous caution en attendant la décision des autorités trinidadiennes sur la demande d'extradition de la justice américaine, a crû proportionnellement à son influence dans le football mondial, affirment analystes et journalistes.
Pots-de-vin en échange de votes pour la désignation des pays-hôtes de la Coupe du monde, détournements de fonds destinés à des programmes sportifs ou pour Haïti après le tremblement de terre, reventes d'entrées pour les Mondiaux... le flot d'accusations contre Warner ne tarit pas.
Les Etats-Unis lui reprochent principalement d'avoir perçu 10 millions de dollars de l'Afrique du Sud pour favoriser l'attribution du Mondial-2010.
Le plus grand symbole du "système Warner" est probablement le Centre d'excellence du football, un complexe de plus de 20 millions de dollars érigé à Trinité-et-Tobago grâce aux fonds de la Fifa et destiné à former les footballeurs des Caraïbes mais que Warner s'est approprié et qu'il loue aujourd'hui pour accueillir des banquets de mariage ou des meetings politiques.
Grâce à son influence sur l'île, où cet ancien ministre est toujours parlementaire, il a pour l'heure systématiquement échappé aux scandales qui fleurissent dans son sillage.
"Il y a trop de gens qui estiment que ce qu'il a fait n'est pas fondamentalement mauvais. Jack Warner peut être un criminel pour le reste du monde, mais ici, Jack est celui que (les gens) auraient été s'ils en avaient eu la possibilité", résume Sunity Maharaj, éditrice de la revue Trinidad and Tobago Review, du centre d'analyses Lloyd Best Institute of the West Indies.