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© AFP/FRANCK FIFE
Sonia Souid, agent de joueurs de football, le 16 mars 2016 à Paris
"Les portes sont fermées, parfois à double tour". Sonia Souid s'est fait un nom et une place chez les agents de footballeurs, mais les femmes sont moins d'une quinzaine, sur les 400 représentants recensés en France, et la situation reste difficile dans un milieu réputé machiste et conservateur.
"Il a fallu du temps pour en arriver là. C'est un milieu très concurrentiel", expose cette jeune femme de 31 ans, très médiatisée en raison de son parcours entre titre de miss Auvergne en 2003, immobilier, avant d'arriver au foot.
Agent depuis sept ans, elle vit désormais tout à fait correctement de son métier "sans faire partie de la dizaine d'agents multimillionnaires" qui entourent les stars du ballon rond, sourit-elle.
Elle a notamment accompagné Rachid Ghezzal à Lyon, suit l'une des vedettes de l'équipe de France Amandine Henry , ou emmené l'entraîneur Guy Lacombe prendre les rênes d'un club de Dubaï.
Dans le foot, "ça continue à être difficile pour les femmes, mais les choses bougent un peu", explique-t-elle à l'AFP. " Corinne Diacre a beaucoup fait en étant la première femme à entraîner un club de Ligue 2 (Clermont). Il y a aussi la première arbitre Stéphanie Frappart. Et quelques noms chez les agents. J'ai récemment rencontré une agente en Turquie. Et une autre qui s'occupe de Fernando Torres en Espagne. Ça fait du bien".
- "remarques macho" -
Les femmes sont encore très peu nombreuses parmi les centaines de candidats qui vont tenter d'obtenir la licence d'agents sportifs fin mars. A Neuilly, à l'EAJF, l'une des écoles privées qui préparent à cet examen réputé difficile, il n'y en a que deux, Hermina Siassia et Mélodie Reboul, 24 et 27 ans.
Toutes deux ont grandi dans un milieu de passionnés de foot, surtout des hommes, et ont eu droit parfois à des commentaires "un peu désobligeants", reconnaissent-elles. Mais elles se disent prêtes à en découdre.
"Les remarques macho, j'en ai entendues", raconte ainsi Hermina Siassia. "Ce qui m'inquiète plus, ce n'est pas forcément ça, c'est le fait de ne pas être prise au sérieux. On est obligé d'être plus pro, on a moins le droit à l'erreur" que les garçons.
"J'aimerais bien que ça change et qu'il y ait beaucoup plus de femmes", abonde sa camarade. Mais comme on est peu nombreuses cela peut aussi être un atout", nuance-t-elle. "Forcément, on se fait tout de suite plus remarquer. On s'intéresse à nous plus facilement".
- "être plus maligne" -
Quand l'école a ouvert ses portes en 2009, il n'y avait tout simplement aucune candidate féminine, se souvient le directeur Sidney Broutinovski. "Les premières sont arrivées à partir de 2013. C'est là qu'elles ont commencé à se dire +ce n'est pas un métier qui m'est interdit+".
"C'est un milieu très conservateur, masculin et majoritairement blanc", confirme l'universitaire Stanislas Frenkiel, auteur d'"Une histoire des agents sportifs en France". "Il y a souvent un mélange des genres: des liens familiaux qui facilitent la conquête de la profession et des positions dominantes, avec beaucoup de +fils de+ comme Stéphane Courbis", le fils de Rolland Courbis , l'ancien entraîneur de Marseille.
Pour trouver sa place, "il faut essayer d'être un peu plus maligne que les autres, aller vers des marchés nouveaux et moins concurrentiels", recommande Sonia Souid.
C'est ce qu'elle a fait pour se lancer dans la profession en partant un an aux Emirats arabes unis, où son père exerçait comme préparateur physique. "Il n'y avait pas grand monde pour faire le pont entre les pays du Golfe et l'Europe. Et j'ai signé le premier joueur émirati dans un club de Ligue 1, Hamdan Al-Kamali à Lyon (pour un prêt en 2012). Ça m'a fait connaître aux Emirats", explique la jeune femme.
"Dans dix ans, le monde des agents aura changé, espère-t-elle. C'est comme pour les autres métiers. Il y a cent ans, une femme médecin ça paraissait inimaginable, aujourd'hui c'est courant".