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Au pays du football roi, la justice espagnole doit décider jeudi si elle laisse les joueurs entamer une grève illimitée samedi ou si le Championnat d'Espagne va se terminer normalement.
Cette grève sans précédent aurait un tel impact dans le public que le syndicat des joueurs, qui a déposé le préavis, et la Ligue de football professionnelle (LFP), qui a demandé à la justice de le suspendre, poursuivent parallèlement des négociations pour éviter l'irréparable.
"Je ne sais pas s'il y aura un accord, je suis toujours en faveur de pactes mais nous ne pouvons pas nouer un accord qui nous ferait hara-kiri", a lancé jeudi matin à la presse le président de la LFP, Javier Tebas.
En cas de grève, les pertes s'élèveraient à 50 millions d'euros par journée perdue, selon la Liga.
Si la justice décide de la suspendre, il s'agira d'une mesure conservatoire dans l'attente d'une décision sur le fond, attendue plus tard.
"Nous continuerons à travailler pour parvenir à un accord", a déclaré le président du syndicat AFE Luis Rubiales, après une séance de négociation organisée par surprise mercredi soir par le secrétaire d'Etat aux Sports, Miguel Cardenal.
Les négociations devaient reprendre à midi entre gouvernement, LFP et syndicat des joueurs, signe de l'intérêt donné par Madrid au conflit qui survient en pleine campagne électorale pour des régionales et municipales. Mais l'heure tourne.
Si la grève est déclenchée, le FC Barcelone ne pourra pas jouer dimanche contre l'Atletico de Madrid qui lutte pour la troisième place du championnat. Et si elle continue, c'est la dernière journée du Championnat, le 23 mai, qui sera menacée.
- Un pactole qui divise -
A l'origine du conflit, une réforme du mode de négociation des droits de télévision des matchs espagnols pour en tirer plus d'argent. Les clubs négociaient jusqu'à présent chacun de leur côté. Les grands comme le FC Barcelone et le Real de Madrid s'en tiraient bien, les clubs moins connus, beaucoup moins.
Ils craignaient de voir des ligues plus riches, comme la Premier League britannique ou la Bundesliga allemande venir débaucher leurs meilleurs joueurs.
Le gouvernement a donc adopté fin avril un décret réclamé par tout le secteur du football permettant la vente centralisée des droits.
Il espérait qu'après avoir rapporté 800 millions en 2013-2014, ils allaient bondir à 1 milliard.
Mais à peine publié, le décret a été contesté: la répartition du pactole pose problème.
La Fédération espagnole du football (RFEF) a décrété le 6 mai un arrêt des matchs à compter du 16 mai. Le lendemain, le syndicat des joueurs lui emboitait le pas et annonçait la grève. Tous deux demandaient une modification du décret pour changer les clés de répartition, les joueurs réclamant notamment un partage plus équilibré entre première et deuxième division par rapport au 90%-10% prévu dans le décret.
Pour les spécialistes du secteur, le conflit vient d'abord de l'inimitié patente entre Javier Tebas et Angel Maria Villar, président de la Fédération depuis 27 ans.
Tebas accuse Villar, qui l'aurait un jour traité de "connard", de se comporter comme "un seigneur féodal". "Les relations ne pourraient pas être pires", relève Alberto Palomar, professeur de droit spécialisé dans le sport à l'université Carlos III de Madrid.
Villar et la Fédération n'ont d'ailleurs pas été invités à la tentative de médiation entre la Liga et les joueurs lancée par le gouvernement.
D'après l'avocat de la LFP, le syndicat a déposé le préavis de grève pour réclamer des avantages salariaux qui n'ont rien à voir avec le décret. L'AFE soutient que sa grève au contraire est légale et dénonce des pressions exercées sur des footballeurs.
Le décret doit être entériné jeudi. Ni la Fédération, ni les joueurs n'auront obtenu d'amendement. La négociation porte désormais sur une possible amélioration de la convention collective des joueurs.