Happy Birthday : |
© AFP/Lionel BONAVENTURE
le président sortant de la Fédération française de football (FFF), Noël Le Graët, en conférence de presse, le 24 février 2017 à Paris
Noël Le Graët brigue sa propre succession à la tête de la Fédération (FFF) samedi avec un bilan reconnu de toutes parts et un profil d'homme politique aussi madré que tranchant, voire cassant.
"Je n'ai peur de rien" et "je suis confiant. Même, très confiant". Devant l'AFP cette semaine, le Breton de 75 ans s'est montré fidèle à son image granitique, modelée au long de décennies à la confluence de la politique, du football et des affaires. Et quand il s'engage quelque part, c'est pour commander.
Tombé dans la marmite du foot "à l'âge de 7 ans", il devient très jeune, à la trentaine seulement, le président d'un petit club, En-Avant Guingamp (1972-1991 et 2002-2011), qu'il propulse du monde amateur à la coupe d'Europe.
Il prend aussi la tête de la Ligue professionnelle dans les années 1990, où il crée la DNCG, le gendarme financier du foot pro.
Cet homme à la silhouette de notaire de province, crâne dégarni et sourire carnassier, a aussi longtemps été maire de Guingamp (1995-2008) et cultive des sympathies dans les allées du pouvoir.
Élu sous l'étiquette du Parti socialiste, soutien de François Hollande à l'élection présidentielle en 2012, il aime parler foot avec Nicolas Sarkozy et compte en Jean-Yves Le Drian un "ami breton".
- Promesse oubliée -
Et comme les politiques, il lui arrive de revenir sur ses promesses: en novembre, il s'est porté candidat à sa succession alors qu'il avait déclaré en mai 2014 qu'il était en train d'honorer son "dernier mandat"... Il avait promis de passer le témoin à Jacques Rousselot qui, s'estimant trahi, l'affronte dans les urnes.
Dans son mode de fonctionnement, "NLG" serait plutôt droit dans ses crampons. D'ailleurs, personne n'attaque son bilan à la tête de la Fédération depuis 2011, pas même Rousselot, mais bien sa pratique du pouvoir, jugée "autoritaire" par ses détracteurs.
"Quand on confond l'autoritarisme avec le charisme, on se trompe d'analyse", rétorque le puissant patron de Lyon Jean-Michel Aulas, nouvel allié de "NLG", qui s'occupera de la formation au niveau national et de Clairefontaine en cas d'élection.
"Le Graët a pris tous les pouvoirs. Le foot, c'est lui. Désormais, le pouvoir est globalement confisqué aux élus", l'a taclé son prédécesseur Fernand Duchaussoy (2010-2011) récemment dans France Football.
Or, "NLG" cultive aussi ses inimitiés à coups de formules assassines. "Il a été battu ce gentil monsieur, a-t-il confié à l'AFP. J'ai beaucoup d'estime pour lui mais il sort d'où là? De la naphtaline un petit peu, non? Il y a des gens rancuniers, qui ont un peu de mal à digérer. J'ai de l'Alka Seltzer en réserve en cas de besoin."
Sa meilleure tête de Turc fut Frédéric Thiriez, président de la LFP (2002-2016). Les relations furent fraîches, jusqu'à la rupture fin 2015 lorsque le patron de la FFF assena que celui de la Ligue n'y connaissait "rien en football".
- Ticket NLG-DD -
C'était sur fond d'affaire de sex-tape: Le Graët a toujours réfusé d'enfoncer Karim Benzema . Le Breton s'inscrit dans la "défense du minoritaire", du fait notamment d'une enfance dans la précarité. "A 6 ans, il y a des maisons où on ne me laissait pas entrer. On jouait dans la rue et, à l'heure du goûter, on ne me recevait pas. Question de classe sociale. Cela m'a bouffé", avait dit le natif de Bourbriac (Côtes d'Armor) à Ouest-France en 2001.
Mais il aime aussi les grands joueurs, dont dépendent les Bleus, et donc la FFF. Et c'est à contre-coeur qu'il avait finalement décrété Benzema "non sélectionnable" pour l'Euro-2016.
S'il a mis Aulas de son côté, il a depuis 2012 construit une relation au beau fixe avec Didier Deschamps . NLG-DD, c'est un binôme habile et à poigne: l'un tient la Fédération, l'autre les Bleus, et rien ne dépasse.
Et si son bilan est respecté, c'est aussi grâce à son sens des affaires: celui qui a réussi dans l'agroalimentaire fut le principal artisan des juteux contrats avec l'équipementier Nike (42 millions d'euros annuels pour la FFF sur 2010-2018, puis 50,5 M d'euros annuels sur 2018-2026).