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La Ligue contre la Fédération, Thiriez contre Le Graët, les gros contre les petits, la L1 contre la L2 : la crise qui secoue le football français est née de l'addition d'une série d'antagonismes.
. Une fracture L1-L2
Les clubs de Ligue 1 ne cachent plus leur volonté de s'émanciper de la Ligue 2 et des voix, parmi les présidents les plus influents, militent ouvertement pour un système "à l'anglaise" afin que la LFP soit dirigée sur le modèle d'une société commerciale.
L'enjeu est surtout financier, la L1 voulant profiter de cette éventuelle autonomie pour gérer elle-même ses droits TV (607 millions d'euros annuels actuellement, 726,5 millions pour la période 2016-2020) et ne plus avoir à en reverser une partie à la L2. A l'issue de la dernière saison, celle-ci a touché plus de 85 millions d'euros alors que les diffuseurs ne versent que 18 millions d'euros (22 millions d'euros pour la période 2016-2020) pour retransmettre ses rencontres.
"Il y a un ras-le-bol. Il y a maintenant une volonté de se séparer de la Ligue 2 pour faire comme en Premier League (Angleterre, ndlr) ou en Serie A (Italie, ndlr). On est dans des mondes différents et on est tiré vers le bas par la Ligue 2", a estimé vendredi dans les colonnes de L'Equipe Bernard Caïazzo, le président de Saint-Etienne.
Ces changements passeront fatalement par une réforme du mode de gouvernance de la LFP, qui sera le grand chantier de la rentrée. Dans cette bataille, son patron Frédéric Thiriez a clairement pris fait et cause pour la L1, au risque d'accentuer encore un peu plus la division. Mais même des patrons de L2 militent pour une évolution des structures, à l'image de Jacques Rousselot, président de Nancy, qui estime qu"'il faut repenser le fondement de la Ligue, chercher des ressources, du business".
. Une fracture amateurs-pros
"Il n'y a pas deux grandes instances, il n'y en a qu'une seule, la FFF. Une seule." Rarement Noël Le Graët s'était montré aussi virulent pour affirmer la prééminence de la Fédération sur la Ligue. Mais c'est précisément cette tutelle, renforcée par le veto sans précédent de la FFF sur la question des montées et relégations entre L1 et L2, qui passe de plus en plus mal auprès des professionnels.
Jean-Louis Triaud, président de Bordeaux, dénonce un système "presque soviétique", son homologue de Lorient Loïc Fery a évoqué jeudi "un abus de pouvoir" de la Fédération, alors que Toulouse s'est dit "choqué".
Dans l'autre sens, les amateurs, déjà échaudés par "l'affaire Luzenac" (refus d'accession du club ariégeois en L2 en raison d'un stade non conforme), sont vent debout contre les velléités d'indépendance de la Ligue 1.
Les positions paraissent ainsi irréconciliables, mais l'autorité exercée par la FFF sur la LFP est sanctuarisée par la loi et un schisme est juridiquement impossible.
. Une fracture Le Graët-Thiriez
La guerre au sommet du football français est également une querelle d'egos entre le président de la FFF et celui de la LFP.
Les deux hommes, dont les mandats respectifs se terminent fin 2016, se sont certes opposés sur plusieurs dossiers brûlants (taxe à 75%, statut fiscal de Monaco, Bastia) mais leurs points de vue ne sont pas si éloignés sur la nécessité de revoir le fonctionnement des instances. D'où cette impression de rivalité personnelle, alimentée par les spéculations sur des visées de Thiriez sur la présidence de la FFF.
"C'est une guerre des chefs entre deux présidents légitimes pour défendre leurs positions", a d'ailleurs résumé dans L'Equipe le ministre des Sports Patrick Kanner.
Mais si Noël Le Graët, aidé par la réforme de la gouvernance de la FFF décidée en 2011, règne en maître à la Fédération, Frédéric Thiriez navigue à vue et doit jongler à la LFP avec les intérêts contradictoires des clubs de L1 et L2.
Sa gestion contestée des différentes affaires qui ont secoué le football français la saison dernière (Luzenac, Monaco, suspensions d'Ibrahimovic et de Payet, arbitrage) l'ont aussi fragilisé malgré ses succès dans les appels d'offres pour les droits TV.