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Ye Wocheng lors d'un entraînement au Lion Lake Country Club de Guangzhou, le 11 novembre 2013
La Chine ne rechigne plus à investir dans le golf comme dans bien d'autres sports, mais l'avenir de la discipline repose aussi sur l'ambition des parents, déterminés à faire de leur progéniture une star des greens.
Le sport, un temps honni car classé parmi les passe-temps de la grande bourgeoisie par le régime communiste, a été réhabilité. Pour les Jeux de Pékin en 2008, un complexe d'entraînement de 80 millions de dollars a même été construit dans la capitale.
Alors que les pouvoirs publics s'appliquent à satisfaire leur soif de titres en défendant des jeunes golfeurs aussi talentueux que patriotiques, une nouvelle génération de prodiges émerge, poussée par des parents riches, ambitieux et stricts.
Ye Wocheng, 13 ans, est ainsi entré dans l'histoire en s'alignant sur l'Open de Chine à l'âge de 12 ans et 242 jours. Il a pulvérisé le record de son compatriote Guan Tianlang.
Or, aucun des deux ne sort de la filière officielle. Un signe, affirment certains, qu'une vraie motivation est plus efficace qu'une usine à champions comme le complexe d'entraînement de la province du Shandong, qui vise les Jeux de Tokyo 2020.
50 Chinois dans le top 100 ?
Ye, qui porte encore un appareil dentaire, revendique les vertus du travail.
"Il y aura beaucoup de grands joueurs chinois dans l'avenir", assure-t-il. Et de pronostiquer que la moitié du top 100 sera chinois d'ici 20 ans, alors qu'ils ne sont aujourd'hui que six dans le top 1000 du circuit américain PGA. Le premier, Liang Wenchong, est 107e.
"Beaucoup d'enfants jouent au golf en Chine et ils sont tous consciencieux et travailleurs. Ils s'entraînent dur et leurs parents sont très stricts", assure le jeune garçon.
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Chen Geyi lors d'un entraînement au Mission Hills golf resort de Shenzhen, le 10 novembre 2013
"Parfois, s'ils ne jouent pas bien, leurs parents leur hurlent dessus, voire les frappent", ajoute-t-il, l'air grave.
Cette approche spartiate, retrouvée parfois dans la sphère scolaire, a été vantée par Amy Chua, une mère de famille sino-américaine et professeur de droit à la prestigieuse université américaine de Yale.
En 2011, elle avait déclenché de vifs débats après avoir écrit un ouvrage, "L'hymne de bataille de la mère tigre", dans lequel elle louait les vertus de la coercition et de la discipline éducative.
Et certains petits Chinois évoquent Tiger Woods , enfant prodige étroitement chaperonné par ses parents, avant de devenir le champion que l'on connaît. L'Américain a d'ailleurs souvent rendu hommage aux exigences de son père, un ancien militaire, et de sa mère, une Thaïlandaise, pour expliquer son exceptionnelle carrière.
Le père de Ye n'a lui même pas hésité à dépenser des centaines de milliers de dollars pour l'entraînement de son fils, recrutant le Britannique David Watson, coach de Lee Westwood et Justin Rose lorsqu'ils étaient encore amateurs.
Aujourd'hui résident de la ville de Dongguan (sud), il est prêt à partir aux Etats-Unis si ça permet de doper la carrière de son prodige de fils.
En attendant, Ye s'entraîne au très luxueux Lion Lake Country Club tout comme Guan, dont les photos trônent un peu partout sur les murs du restaurant.
"Nous avons un green exclusivement pour Guan, affirme, très fier, le président Zheng Jingfen. Il ne paye rien pour jouer, car les jeunes ont besoin d'un environnement pour développer leurs talents."
A quelques heures de là, on accède à l'immense Mission Hills de Dongguan, le plus grand golf du monde et ses 12 parcours.
C'est là que Ye a remporté un tournoi chez les moins de 18 ans, en juin, avec une carte de deux en dessous du par, sur un parcours dessiné par le légendaire Jack Nicklaus , destiné aux jeunes à partir de neuf ans.
Il a attiré Chen Geyi, 14 ans, né dans la capitale et venu s'installer à proximité parce qu'on "ne peut pas jouer au golf en hiver à Pékin".
Son père, Chen Daxin, a déménagé "pour raisons professionnelles" mais avoue investir des sommes colossales pour son fils.
"Globalement, les parents se fichent des coûts lorsqu'il est question des intérêts des enfants", dit cet homme de 43 ans.
Certains "abandonnent leur carrière pour tout miser sur l'avenir de leur enfant", ajoute-t-il. Avant de partir la démarche assurée, le sac de son fils sur le dos.