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Champions internationaux de surf ou simples amateurs de glisse sont entrés en guerre contre la municipalité de Lima, déterminée à élargir une autoroute longeant la côte Pacifique au détriment de spots emblématiques de ce sport en plein essor au Pérou.
"C'est une véritable catastrophe pour le surf mondial (...). Si les travaux se poursuivent, on ne pourra plus surfer ici", se lamente Karin Sierralta, le directeur de la Fédération de surf du Pérou, également vice-président de la Fédération internationale.
Les manifestations contre les travaux, un projet de l'ancienne maire de gauche de Lima, ont commencé en novembre dernier, forçant la municipalité à geler le chantier.
Mais la situation s'est à nouveau tendue ces derniers jours après la reprise des opérations d'élargissement sous la houlette du nouvel édile de la capitale péruvienne Luis Castañeda (centre droit), qui a pris ses fonctions en janvier.
La municipalité assure que la création d'une troisième voie de l'autoroute longeant la bande côtière de la capitale appelée "Costa Verde" permettra d'augmenter de 30% sa capacité face à une circulation infernale, actuellement estimée à 20.000 véhicules par jour.
Mais ces travaux réduiraient d'autant certaines plages de la capitale baignées par des courants océaniques puissants.
"Les travaux vont altérer les vagues qui vont rebondir sur le mur de soutènement et se déformer", estime Roberto Meza, un des manifestants, directeur d'une école de surf et ancien champion panaméricain, entraîneur depuis 1992.
"Les vagues n'auront plus la même formation pour la compétition, qui est actuellement d'un excellent niveau, et deviendront des ondulations médiocres et imparfaites", déplore M. Meza auprès de l'AFP.
La situation a empiré cette semaine lorsque le maire a ordonné de placer d'énormes rochers sur la plage de La Pampilla en guise de barrière de protection du chantier contre la forte houle.
Surfeurs et policiers en sont venus aux mains tandis que le département de la Marine a donné une amende à la municipalité. Le maire qui dénonce la "politisation" de l'affaire a pour sa part été convoqué pour s'expliquer devant le Congrès.
- Berceau du surf sud-américain -
Livio Ciriani est l'un des surfeurs qui s'est interposé physiquement entre les vagues et les forces de l'ordre avant d'être emmené manu militari par la police.
"Je n'en peux plus, cela me fait mal au coeur de voir combien les gens sont indolents et laissent détruire les plages", dit, au bord des larmes, ce surfeur assidu des vagues de La Pampilla depuis 45 ans, responsable du mouvement "Sauvons la Costa Verde".
"Je demande au monde entier de nous aider", plaide-t-il.
C'est sur la plage de La Pampilla, un des berceaux du surf péruvien, que se sont formés plusieurs champions mondiaux, dont Felipe Pomar (1965), Sofia Mulanovich (2004), Magoo de la Rosa (2006), Javier Huarcaya (2012) et Piccolo Clemente (champion du monde de Longboard en 2013).
"C'est ici qu'est né le surf sud-américain en 1942", raconte pour sa part Karin Sierralta.
"Si l'on faisait une comparaison avec le football, ce serait comme détruire le plus grand stade du pays", affirme-t-il.
Ces derniers incidents indignent l'ex-championne du monde Sofia Mulanovich . "Cela me met en rage de voir comment on détruit notre terrain", lance-t-elle sur sa page Facebook.
"Les études techniques indiquent qu'il est nécessaire de renforcer cet endroit de l'autoroute pour éviter un effondrement majeur", insiste pour sa part Francisco Gaviria, un responsable de la municipalité.
Une des rares mégapoles baignées par l'océan, Lima compte une quarantaine d'écoles de surf, un sport en plein essor dans le pays andin, avec 100.000 pratiquants contre 60.000 il y a cinq ans.
Le Pérou aux 2.500 km de côte, entre courants chaud d'Equateur et froid de Humboldt, est réputé pour ses vagues parmi les plus régulières du monde, selon les spécialistes.