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L'Autorité de la concurrence, saisie par la chaîne beIN Sports, a infligé un camouflet à la Ligue nationale de rugby (LNR) et Canal+, en suspendant mercredi l'accord historique entre les deux parties sur la diffusion du Top 14.
Le calme n'aura duré que quelques mois: après avoir attribué le 14 janvier à Canal+ l'exclusivité de la retransmission du championnat de France de rugby pour les cinq prochaines saisons, la LNR est sommée de remettre en jeu ces droits.
Soupçonnée "d'entente anticoncurrentielle", la Ligue devra effectuer "une nouvelle procédure de mise en concurrence" avant le 31 janvier 2015.
D'ores et déjà, dans deux communiqués laconiques, la chaîne cryptée qui a tenu à exprimer "son profond désaccord" et la LNR ont annoncé leur volonté de déposer un recours devant la Cour d'appel de Paris, dans le délai légal de 10 jours.
Selon des estimations concordantes, la juridiction devrait pouvoir trancher d'ici à mi-septembre.
Contacté par l'AFP, le président de la LNR Paul Goze a de son côté qualifié cette décision d'"injustifiée, particulièrement inappropriée et très critiquable sur un certain nombre de points". Il faut dire que ce dossier est vital pour l'économie du rugby professionnel français, puisque les droits TV représentent dorénavant plus de 60% du budget de la Ligue.
Au moins la LNR pourra se satisfaire d'avoir préservé l'exercice 2014-2015, car l'Autorité de la concurrence n'a pas souhaité "porter une atteinte disproportionnée aux intérêts des clubs, des diffuseurs et des téléspectateurs", alors que le Top 14 reprendra le 15 août.
Mais l'accord historique de 355 millions sur cinq saisons courant de 2014 à 2019 est bien remis en cause à partir de 2015-2016, offrant un nouvel épisode à ce feuilleton à rebondissements, l'un des nombreux avatars de la guerre féroce que se livrent le groupe Canal+ et beIN Sports sur le terrain des droits sportifs.
La LNR comptait bien profiter de ce contexte hyper-concurrentiel en dénonçant en cours de route en 2013 son contrat avec la chaîne cryptée, dont le montant s'élevait à 31,7 millions d'euros annuels.
L'affaire avait alors vite pris la tournure d'un bras de fer entre le diffuseur emblématique de la compétition et la Ligue.
Les deux parties ont d'abord tenté de négocier de gré à gré avant que la LNR ne provoque un appel d'offres, contesté en référé devant la justice par Canal+.
- Une nouvelle dimension -
Mais les deux partenaires se sont vite réconciliés quand la LNR a brutalement interrompu la procédure, à la veille même de l'échéance du dépôt des dossiers, pour signer un nouveau bail avec Canal+. Et décrocher un joli pactole: 71 millions d'euros en moyenne par exercice.
Cela avait provoqué la fureur de beIN Sports, qui comptait se positionner mais s'est senti flouée: la chaîne qatarie a saisi en mars l'Autorité de la concurrence qui lui a finalement donné raison.
Par cette décision, l'Autorité souligne également que le Top 14 est entré dans une autre dimension économique et doit se conformer scrupuleusement aux règles de la concurrence en mettant en place une procédure "transparente et non discriminatoire".
"L'Autorité de la concurrence a considéré que les droits du Top 14 étaient devenus particulièrement attractifs en considération de l'intérêt manifesté par les abonnés pour cette compétition et des audiences importantes qu'elle réalise", martèle l'instance dans un communiqué.
"La situation est également préjudiciable au développement de beIN Sports, seul nouvel entrant susceptible d'animer la compétition sur les programmes sportifs de diffusion payante", poursuit encore l'Autorité.
De son côté, la chaîne qatarie a salué la décision. "L?Autorité (...) tient compte des dommages que cet accord pouvait impliquer pour les téléspectateurs et pour le développement d?un secteur dynamique de la télévision payante", se félicite beIn Sports qui remporte ainsi une nouvelle manche sur le terrain judiciaire face à Canal+.
Il y a un mois, le tribunal de commerce de Nanterre avait en effet estimé que la chaîne à péage, attaquée sur le montant de ses abonnements par Canal+, n'exerçait pas de "concurrence déloyale" à l'encontre de la filiale de Vivendi.
Les coulisses des stades, de rugby ou autre, n'ont en tous cas pas fini de trembler.
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