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© AFP/Franck Fife
Pierre Camou, président de la Fédération française de rugby, le 1er février 2013 à Marcoussis
"Choqué" et "stupéfait", le rugby français a d'une seule voix défendu son honneur jeudi, après avoir été épinglé par l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) qui a de son côté joué l'apaisement.
Fédération (FFR), Ligue (LNR) et joueurs (syndicat Provale) ont protesté de concert contre les conclusions présentées mercredi par Françoise Lasne, directrice du département des contrôles à l'AFLD, lors de son audition au Sénat sur l'efficacité de la lutte contre le dopage.
Avec 22 résultats anormaux sur 588 échantillons prélevés en 2012, le rugby est le sport donnant "le plus haut pourcentage (de résultats anormaux)", avait expliqué Mme Lasne. Un chiffre à comparer par exemple avec celui de l'athlétisme, qui a enregistré autant de résultats anormaux - selon des données fournies à l'AFP par la Fédération française (FFA) - pour 1164 échantillons.
Dès mercredi soir, la Fédération était montée au créneau en détaillant les 22 résultats en question, affirmant qu'entre cannabis (9), gouttes pour le nez (3) ou autres dérivés codéinés (2) seuls deux cas au final avaient donné lieu à de lourdes sanctions.
"Sur un sujet aussi grave, tous les acteurs se doivent d'adopter une communication précise, qui ne jette pas de façon injustifiée la suspicion sur un sport", ont souligné jeudi la FFR, la LNR et Provale dans un communiqué commun, rappelant que le rugby français avait "mis en oeuvre depuis 13 ans un suivi biologique longitudinal" qui s'est peu à peu étendu à tout le haut niveau.
"On triture les chiffres dans tous les sens pour arriver à faire passer le rugby en premier", a déploré jeudi auprès de l'AFP Serge Simon, président du syndicat des joueurs (Provale).
"Si avec deux sportifs dopés le rugby est le sport le plus concerné par le dopage, c'est plutôt une bonne nouvelle pour le sport français", a-t-il encore ironisé.
Se disant "stupéfait" par la "violence de l'attaque" - "c'est fait devant une commission d'enquête sénatoriale, pas au bar du coin", a-t-il souligné - Serge Simon y a vu un "lien" avec les négociations en cours entre l'AFLD et la Fédération nationale des Associations et des syndicats de sportifs (FNASS) concernant la localisation des sportifs.
"Je ne crois pas au hasard du calendrier", a-t-il ajouté, laissant entendre que l'AFLD trouverait profit à pointer du doigt le rugby qui, plus que d'autres sports, a souvent critiqué l'exigence du système de localisation.
Apaisement à l'AFLD
Cette accusation a été "catégoriquement" balayée jeudi par le président de l'AFLD Bruno Genevois. "Il n'y a absolument aucun lien", a-t-il martelé à l'AFP.
Abattant la carte de l'apaisement, M. Genevois a appelé à la "prudence" quant aux "interprétations" faites à partir des chiffres cités par Mme Lasne, sans les remettre en cause.
"Il y a eu une extrapolation et des commentaires à partir de données brutes sans tenir compte d'éléments destinés à les interpréter correctement", a-t-il assuré. M. Genevois a notamment demandé de bien faire le distinguo entre "les substances interdites aussi bien à l'entraînement qu'en compétition, c'est à dire le dopage lourd (...) et les substances qui sont uniquement interdites en compétition et qui présentent a priori moins de danger sur la santé publique".
"L'AFLD n'entend stigmatiser aucun sport par rapport à d'autres", a-t-il encore tempéré.
Tous les acteurs de cette controverse se sont en tout cas entendus sur un point: le souhait de renforcer les contrôles.
"Mais il faudrait que l'AFLD déploie tout autant d'énergie à traquer les joueurs qu'à encadrer les dirigeants sportifs qui créent des calendriers à risque, a ajouté Serge Simon. On a fini par dire du Tour de France qu'on ne pouvait pas monter l'Alpe d'Huez à ce rythme à l'eau claire, je ne veux pas que l'on dise cela un jour du rugby."