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© AFP/David Alexander
Un ballon de rugby
Le rugby, pointé du doigt mercredi par l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD), possède le profil de sport engendrant des pratiques dopantes mais reste très contrôlé dans son volet professionnel avec toutefois des risques de dérive.
QUE DIT L'AFLD ?
La directrice du département des analyses de l'AFLD, Françoise Lasne, a mis le feu aux poudres mercredi soir en pointant, devant une commission d'enquête du Sénat, le rugby comme le sport le plus touché par le dopage en proportion des contrôles effectués.
"Si nous tenons compte de toutes les molécules interdites présentes sur la liste de l'Agence mondiale antidopage, le sport qui donne le plus haut pourcentage (de cas positifs) est le rugby", a-t-elle souligné.
Mme Lasne a précisé que le cyclisme a représenté 14,9% des résultats anormaux enregistrés par l'AFLD en 2012, devant l'athlétisme (12,6%) et le rugby (10,4%).
Le directeur de l'AFLD Bruno Genevois a tenu à remettre en perspective les propos de sa collaboratrice. "En proportion, c'est exact, mais il faut relativiser, a-t-il souligné à l'AFP. Il faudrait s'appuyer sur des données plus vastes et sur des durées plus longues". Il a toutefois demandé "qu'il y ait davantage de contrôles sur les matches du Tournoi des six nations se déroulant sur le territoire français car le nombre de joueurs contrôlés est faible" et pointé un "effort de contrôle sur les pôles Espoirs".
Alors que l'AFLD ne communique pas sur le nombre de résultats anormaux recensés par sport, la Fédération de rugby (FFR) a immédiatement dévoilé ses chiffres à l'AFP: 22 cas positifs en 2012 ont été suivis de procédures pour au final deux cas avérés de dopage lourd, un joueur d'Albi (Pro D2) suspendu 18 mois et un joueur de Beaune, club de Fédérale 2 (4e division), suspendu trois ans.
UN DOPAGE RÉPANDU ?
Les "résultats anormaux" de joueurs issus de clubs de premier plan cristallisent l'attention du public. Les arrière-ailier du Stade Français, Djibril Camara en 2012, et de Bayonne (aujourd'hui au Stade Toulousain) Yoann Huget en 2011 ont été lourdement suspendus pour avoir manqué à trois reprises à leurs obligations de localisation pour des contrôles inopinés. Deux joueurs de Toulon, le pilier Eifion Lewis-Roberts et le troisième ligne Steffon Armitage ont été contrôlés positif à l'issue de la dernière finale du Top 14, avant d'être blanchis car ils avaient prouvé avoir pris des médicaments codéinés. D'autres joueurs ont également été suspendus pour l'usage de cannabis (Lorée alors au Racing-Métro en 2010, Caminati de Brive en 2012).
Soumis à des dispositifs de contrôle contraignants (suivi longitudinal, groupe cible, contrôles d'après-match...), le rugby professionnel n'a recensé que peu de cas de dopage avérés. Mais le sujet est latent dans ce sport de contact violent avec des calendriers de compétition souvent chargés. L'ancien international et entraîneur Pierre Berbizier a été un des rares à pointer sans détour, dès 2001, "une politique française de l'autruche".
"Nous avons été bien heureux de pointer du doigt l'hémisphère Sud lorsque certains problèmes sont apparus. Mais nous devrions plutôt balayer devant notre porte, déclarait-il à l'époque dans L'Equipe Magazine. Le dopage est une réalité dans le championnat." Sans parler de filière organisée, Berbizier avait assuré que "des joueurs s'automédicamentent" et "c'est normal, on leur demande d'être performants douze mois sur douze".
LES ZONES D'OMBRE DU RUGBY AMATEUR
Les cas graves de dopage l'ont été principalement dans le rugby amateur ou chez les jeunes. Plusieurs affaires secouent régulièrement les catégories de jeunes, où certains ont recours à ces pratiques -souvent individuellement en achetant des produits via internet- en espérant décrocher une place dans un centre de formation, tremplin vers une carrière professionnelle.
Un pilier Espoirs de Perpignan, Davy Galand, a ainsi été suspendu quatre ans en 2011 après que les services des Douanes ont trouvé des stéroïdes à son domicile. En mars 2012, des cas de cancers suspects chez des jeunes joueurs de Sarlat (Dordogne) ont également amené la justice à enquêter après qu'un médecin eut précédemment relevé deux décès sur des cas similaires avec pour dénominateur commun la prise de créatine. Le journal Sud Ouest a fait état le 20 mars d'un troisième décès suspect.
La créatine n'est pas illégale mais pose problème car elle est souvent mélangée avec des stéroïdes, parfois à l'insu des consommateurs. Les compléments alimentaires, très utilisés pour développer la musculature et dont la composition est parfois douteuse, suscitent aussi l'inquiétude.