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© AFP/David Alexander
Un ballon de rugby
L'ancien pilier international Laurent Bénézech affirme dans une interview au Monde que "les preuves (du dopage dans le rugby) sont sous nos yeux mais ça n'intéresse personne" et que "le rugby est exactement dans la même situation que le cyclisme avant l'affaire Festina".
"On est passé de vingt minutes de jeu effectif à trente minutes à la fin des années 1990, évolution normale due à la professionnalisation des joueurs. Mais on est en train de nous expliquer, alors qu'on est déjà à quarante minutes, qu'on peut passer à cinquante et donc, pourquoi pas, à soixante. C'est ce qui se passait dans le vélo à la fin des années 1990 où la logique poussait à allonger les étapes du Tour de France et à multiplier les difficultés sans que cela pose de problèmes physiques aux coureurs", estime l'ancien joueur, aujourd'hui consultant auprès des médias, dans Le Monde daté de samedi.
Evoquant un "récent courrier" de la Ligue nationale de rugby (LNR) mettant les clubs en garde contre l'usage croissant de corticoïdes, il affirme: "Les preuves sont sous nos yeux mais apparemment, ça n'intéresse personne. Le rugby est exactement dans la même situation que le cyclisme avant l'affaire Festina".
Bénézech (15 sélections entre 1994 et 1995) ne se montre pas étonné par les propos de la directrice du département des analyses de l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD), Françoise Lasne, qui a pointé le 28 mars devant une commission d'enquête du Sénat le rugby comme le sport le plus touché par le dopage en proportion des contrôles effectués.
"Dans ce qu'elle dit, il y a deux informations importantes. D'une part que la préparation des joueurs de rugby est fortement médicalisée. Je n'ai pas été surpris (...) Ce qui m'a interpellé, c'est la seconde information contenue dans ses affirmations qui met au jour la complicité des organismes du rugby, notamment des clubs, au travers de la pratique des autorisations d'usage à des fins thérapeutiques (AUT)", souligne-t-il.
"Dans certains clubs, il y a une légalisation du suivi médicalisé à travers les autorisations données par les médecins, les fameuses AUT, sinon les joueurs seraient déclarés positifs lors des contrôles", poursuit-il.
Interrogé sur un éventuel dopage organisé, Bénézech répond: "La déclaration de Françoise Lasne ne laisse planer aucun doute sur la réponse. C'est oui, car il y a une pratique développée des AUT, c'est-à-dire la justification par le médecin d'une prise médicamenteuse dont il est évident qu'elle sert à la recherche de la performance."
La vive indignation du monde du rugby relève selon lui d'"un mélange de politique de l'autruche et de réaction d'une bande de gamins pris la main dans le pot de confiture qui tentent d'expliquer que ce n'est pas de la confiture".
"Tant qu'on restera dans cet obscurantisme et ce refus de transparence, on ne pourra aboutir qu'à la mise en danger de la santé des sportifs", conclut-il.