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Un point d'interrogation entoure à terme la suite de la carrière de l'ouvreur vedette de l'Irlande Jonathan Sexton , victime de plusieurs commotions cérébrales, autant parce qu'il est une cible privilégiée qu'en raison d'une technique de plaquage plutôt risquée.
La scène agite l'Irlande depuis un peu plus de deux semaines. 8e minute de Wasps-Leinster, le 23 janvier en Coupe d'Europe: Sexton, percuté à la tête, est pris en charge au sol par un soigneur de son équipe... avant de quasiment le congédier sèchement quelque 30 secondes plus tard, voyant le jeu revenu dans sa zone, pour défendre.
L'ouvreur (30 ans, 57 sél) du XV du Trèfle, opposé à la France samedi, sera remplacé dans la foulée, laissant supposer qu'il avait subi une commotion cérébrale. Une version démentie deux jours plus tard par l'encadrement médical de la Fédération irlandaise, évoquant une "mesure de précaution" et le déclarant apte pour le premier match du Tournoi, contre le pays de Galles dimanche dernier (16-16).
Ce nouveau choc à la tête a en tout cas relancé le débat en Irlande autour de la suite de la carrière de Sexton, forcé de s'arrêter trois mois fin 2014-début 2015 en raison de commotions à répétition avec le Racing-Métro et le XV du Trèfle.
"Quel prix est-il prêt à payer pour sa santé future ? Combien d'autres chocs à la tête est-il prêt à encaisser au nom du professionnalisme ? Peut-être est-il temps pour lui de quitter le rugby tant que ses facultés (intellectuelles) sont intactes", a ainsi écrit George Hook, chroniqueur vedette du journal "Irish Independent".
- 'S'il refait une commotion dans les trois mois...' -
Cette question est prématurée, selon le neurologue Jean-François Chermann, interrogé par l'AFP. Pour le médecin, qui avait "arrêté" Sexton à l'automne 2014, il faut en effet davantage "s'inquiéter des commotions à répétition rapprochées dans le temps" que du "nombre total de commotions".
"Après cette période de repos et une reprise par palier, tout s?est bien passé et il n?a pas refait de commotions", rappelle-t-il. "A l'époque, je lui avais dit qu'il faudrait davantage s'inquiéter s'il refaisait une commotion dans les trois mois après son retour et alors envisager la fin de sa pratique rugbystique."
Tout choc à la tête subi par Sexton devient donc source de préoccupation car un deuxième impact reçu dans un laps rapproché pourrait lui être très préjudiciable, comme l'explique le Dr Chermann qui évoque "le risque de voir le syndrome post-commotionnel persister longtemps".
Une éventualité possible, tant Sexton est exposé.
La grande majorité des équipes ciblent ainsi la zone de l'ouvreur adverse, mais sans doute encore davantage face à l'Irlande, car "elle ne propose pas toujours une défense glissée, mais peut évoluer en cours de match vers une défense +rush+ (les ailiers montent vite vers les extérieurs, NDLR)", souligne l'Irlandais Bernard Jackman, entraîneur de la défense de Grenoble.
"Donc les équipes adverses, sachant qu'elles ne pourront pas forcément attaquer +milieu+ ou +large+, ont tendance à viser systématiquement la zone de l'ouvreur", développe Jackman.
- 'Trop de fierté' pour se cacher -
Sans doute encore plus lorsque c'est Sexton (1,88 m, 92 kg) qui occupe ce poste: en octobre à la Coupe du Monde, les Français avaient prévenu sans détour qu'ils viseraient Sexton. L'Irlandais était sorti blessé, mais pas à la tête, après 26 minutes.
Et dimanche, les Gallois ont plusieurs fois envoyé leurs bulldozers Jamie Roberts et Toby Faletau percuter Sexton, finalement touché à une épaule en fin de match.
La technique même de plaquage de Sexton semble l'exposer davantage aux commotions cérébrales: comme la plupart des Irlandais, Sexton privilégie le "choke tackle", où l'attaquant, maintenu debout, est empêché de libérer le ballon, au plaquage dit classique (le défenseur se baisse pour faire tomber le porteur de balle).
Si l'entraîneur adjoint irlandais Richie Murphy a balayé mardi cet argument, la légende Brian O'Driscoll a appelé Sexton à "adapter sa technique de plaquage, tête et buste trop en avant".
L'autre solution serait de le positionner au large en défense. Mais, d'après Jackman, Sexton a "trop de fierté" pour accepter ça: "Ce n'est pas le genre d'ouvreur à se cacher. Il veut être un leader en défense, montrer l'exemple."