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Le XV de France a perdu depuis quelques années la maîtrise des airs sous les ballons hauts, comme l'a cruellement illustré sa dernière sortie au pays de Galles (10-19), résultat d'une politique de formation défaillante dans ce secteur.
Étonnamment familière, la petite musique jouée par Guy Novès dans les coursives du Millennium Stadium il y a dix jours: "Sur les chandelles, ils ont vraiment été supérieurs à nous. On n'a pas été à la hauteur à ce niveau", a déploré le sélectionneur des Bleus.
Avant lui, son prédécesseur Philippe Saint-André avait souvent constaté, impuissant, la domination de leurs adversaires en l'air: ici l'arrière irlandais Rob Kearney , là celui de l'Ecosse Stuart Hogg, que les Bleus retrouveront dimanche, en passant par l'ouvreur gallois Dan Biggar...
Un mal profond qui puise ses racines dans le peu d'appétence culturelle du rugby français pour le jeu au pied de pression. Ce qui ne favorise pas l'émergence de spécialistes des chandelles, ni de récupérateurs sous les ballons hauts, même si quelques figures surnagent parfois (Dulin, Huget, Médard...).
"Ce n'est pas qu'on n'ose pas jouer au pied par romantisme latin, c'est carrément que, pendant un moment, on l'a interdit dans beaucoup d'écoles de rugby", décrypte auprès de l'AFP Didier Retière, le Directeur technique national. "Il y a eu un courant en France contre le jeu au pied, amplifié par le fait qu'on joue (entre 6 et 14 ans, ndlr) sur des terrains réduits."
- Affaire culturelle -
"On essaie de faire passer des consignes (aux écoles de rugby) car le mauvais jeu au pied est problématique", poursuit Retière. "Dans les pôles (à partir de 15 ans, ndlr), on travaille beaucoup sur la technique individuelle et on essaie de rétablir ce déséquilibre. Mais cela doit être fait plus tôt pour qu'il soit bien maîtrisé."
Ainsi, les équipes de France jeunes n'ont que 70% de réussite sous les chandelles, "alors que les Anglo-Saxons sont vers 90%", relève Retière.
Ce secteur du jeu est bien mieux enseigné Outre-Manche car on considère "qu'on peut gagner autant de mètres en récupérant la balle au pied qu'en la jouant à la main", explique l'entraîneur du Stade Français Gonzalo Quesada . Dans des conditions climatiques difficiles, la chandelle peut devenir une arme redoutable.
Du coup, les clubs français cherchent tous à gommer tant bien que mal ces lacunes par un travail spécifique, à la fois pour le botteur et le réceptionneur.
Les trois-quarts sont ainsi invités à s'exercer en récupérant des ballons hauts, tout en étant perturbés dans leurs sauts par un vis-à-vis muni d'un bouclier.
- Timing et placement -
"Mais ça n'a rien à voir avec l'impact qu'il peut y avoir en l'air en match", tempère l'arrière du Racing 92 Brice Dulin. "Il faut être assez spontané, monter et ne pas se poser de question."
"Tout est important, le timing, le placement, l'anticipation, mais ça, c'est comme pour un grand buteur: certains, dès petits, ont +enquillé+. Moi, c'est quelque chose que je fais depuis tout jeune", poursuit l'ancien Agenais, de taille modeste (1,76 m) mais servi par sa détente et son peu d'appréhension dans les duels.
"Il faut s'approcher du ballon sans jamais le quitter des yeux, pour se mettre dans l'axe d'où le ballon va tomber et, ensuite, une fois dans cette position de confort, enclencher le saut au bon moment", détaille de son côté Quesada qui, dans l'encadrement du XV de France entre 2008 et 2011, avait animé des sessions sur ce thème.
Mais ces ateliers restent des palliatifs en attendant qu'une nouvelle génération, mieux formée, fasse surface.
"On sent que ça commence à s'améliorer, mais il y a encore du gros boulot", convient Didier Retière, qui n'attend pas de résultats tangibles "avant longtemps". D'ici là, le XV de France devra faire avec les moyens du bord, en comptant sur un ou deux cas isolés naturellement doués.