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Parce que les enjeux sont énormes, parce que l'analyse des équipes est poussée à son paroxysme et parce que les niveaux sont resserrés, la Coupe du Monde de rugby ne devrait guère laisser de place à un jeu spectaculaire dans les matches-clés.
Ce sera la question qui obsèdera toutes les grandes équipes: quelle stratégie permettra de soulever le trophée Webb-Ellis à Twickenham le 31 octobre ?
Avec 11 essais inscrits seulement en 7 finales de Coupe de monde, deux épilogues ponctués uniquement de coups de pied (1995, 2007) et une édition 2003 débloquée sur un drop de Jonny Wilkinson en prolongation, la réponse semble claire: pour le spectacle, notamment à partir des quarts de finale, il faudra sans doute repasser.
"Aujourd'hui, tu joues pour gagner, pas pour produire du beau jeu et un spectacle. Donc si tu arrives à gagner sans faire du beau jeu, beaucoup d'équipes partiront là-dessus", résume le demi de mêlée du XV de France Morgan Parra .
Sans doute observera-t-on deux tendances durant la compétition qui s'ouvre le 18 septembre. Il y aura des parties débridées car déséquilibrées, avec quelques scores-fleuve en vue (Nouvelle-Zélande - Namibie, Australie - Uruguay...). Et des parties probablement fermées car sous tension, en poules (Angleterre-pays de Galles, Irlande-France...) ou en phase finale.
- Parole à la défense -
Ces chocs si prometteurs sur le papier se joueront probablement à de minuscules détails: avant tout un buteur en forme, un geste d'exception, une pénalité récoltée dans une zone de marque, une touche volée au bon moment... Et la prise de risque sera forcément limitée.
"Il faut avoir de l'ambition de jeu c'est sûr, mais l'ambition de jeu ce n'est pas faire n'importe quoi", appuie l'ouvreur des Bleus Frédéric Michalak, au diapason de l'encadrement qui exhorte les joueurs à "faire des choses simples, mais à bien les faire". "Une équipe a forcément des faiblesses quelque part et on va s'y adapter", poursuit le N.10 des Bleus.
"Et puis, le jeu... Ca me rappelle ce que dit Bernard (Laporte, son entraîneur à Toulon et ancien sélectionneur): +c'est quoi le jeu ? Le jeu c'est d'abord une bonne défense+. Et il a raison", assure encore Michalak.
"On sait qu'on arrive souvent à très bien construire de grosses défenses", abonde l'entraîneur des arrières Patrice Lagisquet . "A la Coupe du Monde, on ne va pas échapper au triptyque classique: conquête, défense, occupation. Si on a des lacunes sur un de ces trois domaines, on sera en difficulté."
"Il faudra quelque chose en plus si on veut ambitionner d'être compétitif dans le dernier carré", nuance l'ancien ailier du XV de France. "On ne peut pas tenir un autre discours. Mais ce qui se passe souvent, c'est qu'après un mois et demi de compétition, les équipes sont tellement en place et tu as tellement décrypté le jeu adverse que les finales se jouent à pas grand-chose."
- Le mythe des 50 minutes de jeu effectif -
Ce "pas grand-chose" résidera sans doute dans l'habileté technique et tactique des demis et trois-quarts à créer à partir de rien ou presque des situations de marque, un domaine dans lequel excellent évidemment les All Blacks, plus pragmatiques que l'idée romantique qu'ils véhiculent.
"Regardez leur jeu dans les 40 mètres", exhorte Michalak. "C'est d'abord un jeu de pression, au pied. Ils ont une très bonne défense et ensuite ils exploitent à la perfection les ballons de récupération. Il y a une intelligence derrière qu'il faut avoir."
Arrivera-t-on donc un jour au niveau international à ces 50 minutes de temps de jeu effectif promis par les observateurs, alors que la moyenne actuelle tourne autour de 40-45 minutes ? Pas en Coupe du Monde a priori, même si l'intensité des séquences et la violence des collisions se sont accrues.
"La tendance et l'envie de tous est toujours au développement du jeu", souligne l'entraîneur des avants Yannick Bru .
"Je m'attends donc quand même, si les conditions météo le permettent, à une recherche de jeu rapide", dit-il. "A la fois les diffuseurs et le corps arbitral mettent l'accent sur la lutte contre le jeu déloyal, l'accélération du jeu en mêlée par exemple. Je pense que les équipes qui auront la capacité d'être très bonnes dans le désordre, sur les ballons de récupération, seront celles qui gagneront les matches." Et souvent, une seule occasion suffira.