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© AFP/GAIZKA IROZ
Le président de la Fédération française de rugby Pierre Camou, le 2 juillet 2016 au Palais Beaumont
L'affaire de la revente frauduleuse de billets, qui a entraîné la démission d'un des vice-présidents de la Fédération française de rugby (FFR), survient au plus mauvais moment pour son président Pierre Camou, qui vise une réélection le 3 décembre.
.Que dit Mediapart?
Vendredi, Mediapart publie un article intitulé "La double billetterie, machine à cash de la fédération de rugby". Le site d'investigation affirme que "des milliers de places échappent au marché officiel pour alimenter des réseaux frauduleux de hauts dirigeants du rugby français". Il vise particulièrement le vice-président de la FFR Bernard Godet, en charge du marketing et du commercial, et donc du contrôle de la billetterie.
Selon le site d'information, Gérald Martinez, ancien joueur du XV de France, membre du comité directeur de la FFR jusqu'en 2012, et président de l'Amicale des anciens internationaux, a signé en 2001 un partenariat avec une société qui revend des billets (Impact Sport).
Celle-ci n'est pourtant pas agréée par la FFR pour vendre des "hospitalités" (forfaits comprenant place au stade, restaurant, hôtel, transport) pour les matches du XV de France.
Malgré cela, Martinez fournissait quand même à Impact Sport 200 places par rencontre, obtenues de la FFR via l'Amicale des anciens internationaux, contre 7% du "produit des ventes", soit près de 15.000 euros par rencontre.
Une partie des bénéfices étaient ensuite redirigée vers une société jumelle, Impact Club, dont Martinez était actionnaire et Bernard Godet "l'expert comptable". Toujours selon Mediapart, Godet est même devenu actionnaire en 2008 d'Impact Club, "à qui la FFR a attribué des marchés d'impression d'affiches ou de documents".
Le conflit d'intérêts était alors à son paroxysme, toujours selon Mediapart, puisque Bernard Godet avait été chargé par la FFR cette même année "d'auditer les comptes de l'Amicale".
.Que répondent les accusés?
"La billetterie de la Fédération est contrôlée par les douanes, il y a une série de contrôles comme partout. Il n'y a pas de double billetterie à la Fédération", rétorque samedi Pierre Camou à l'occasion d'une rencontre avec la presse prévue avant la publication de Mediapart.
"Depuis que je suis président (décembre 2008, NDLR), on a dû mener plus de soixante actions (en justice) contre les différentes agences ou revendeurs de billets, dû obtenir 21 condamnations, et une trentaine de transactions et actions sont en cours", s'est également félicité le président. En effet, la FFR, après avoir mis en demeure Impact Sport à quatre reprises, l'a assigné en justice en 2008 puis 2014 pour faire cesser son activité frauduleuse. Impact Sport a été condamné à payer 45.000 euros de dommages et intérêts (plus 3.000 euros de frais de procédure) à la FFR en avril 2016.
Godet, de son côté, se contente de "réfuter absolument toutes les accusations de Mediapart".
Mais dimanche, devant les démentis, le site enfonce le clou en présentant de nouveaux documents selon lesquels Impact Club aurait touché, en 2008 et 2009, 99.709 euros provenant de la revente frauduleuse de billets.
Peu après, le vice-président démissionne alors pour "être libre de (se) défendre" et protéger la FFR face aux "révélations totalement infondées et mensongères".
Gérald Martinez n'avait, lui, pu être joint lundi.
.La réélection de Camou est-elle compromise?
Ces révélations surviennent au plus mauvais moment pour Camou, deux semaines avant l'assemblée générale de la fédération, le 3 décembre, au cours de laquelle il briguera un troisième mandat.
© AFP/MEHDI FEDOUACH
Bernard Laporte
expose son programme devant la presse à l'issue du match de Toulon contre Bordeaux-Bègles, le 14 avril 2016
En poste depuis 2008, le président doit faire face à deux sérieux opposants: Bernard Laporte , ancien sélectionneur du XV de France, directeur sportif de Toulon et secrétaire d'Etat aux Sports, et Alain Doucet, secrétaire général de la FFR jusqu'en juillet dernier.
Deux sujets ont déjà cristallisé la campagne: le Grand Stade de Ris-Orangis (Essonne), porté par Camou et auquel Laporte s'oppose, et le vote décentralisé, réclamé par les deux outsiders et finalement rejeté par le comité directeur de la FFR pour une question de calendrier.
Laporte et Doucet vont-ils s'engouffrer dans la brèche ? A la question de savoir si des membres de la Fédération avaient pu se rendre coupables de pratiques frauduleuses, Pierre Camou a eu cette réponse ambiguë: "Je n'en sais rien. Je ne suis pas derrière tout le monde à la Fédération, je n'ai pas un service de police."