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© AFP/Fabrice Coffrini
Le Français Jason-Lamy-Chappuis, champion olympique de combiné nordique, lors d'essais en soufflerie au laboratoire de l'HEPIA, l'école d'ingénieurs de Genève, le 1er novembre 2013
Avant le coup d'envoi de la saison de combiné nordique samedi, Jason Lamy-Chappuis (entretien) a fait des essais en soufflerie à Genève pour valider scientifiquement les petits détails qui pourront faire une grosse différence dans sa quête d'or olympique à Sotchi.
Il a l'impression de s'envoler du tremplin enneigé de Chaux-Neuve ou Seefeld, mais le champion olympique 2010 ne décolle en fait que de quelques centimètres, harnaché dans une veine d'essai, au fond d'un laboratoire de l'HEPIA, l'école d'ingénieurs de Genève.
Des lunettes sur son nez lui envoient des images prises en caméra embarquée sur différents tremplins de la Coupe du monde et le vent propulsé donne la sensation de vitesse. "On a vraiment l'impression d'y être. Quand on ajoute avec les lunettes cette contrainte visuelle, c'est assez impressionnant", raconte le quadruple champion du monde.
Des sauts, il peut en enchaîner ainsi une dizaine en une demi-heure, en s'épargnant la longue remontée au sommet du tremplin. Et ajuster ses positions en tentant de trouver la bonne formule dans la dynamique des fluides, avec les données objectives mesurées par des capteurs.
"La force de portance permet au sauteur de voler et la force de résistance de l'air le freine jusqu'à finalement l'arrêter, explique Flavio Noca, professeur de mécanique des fluides. C'est toujours un compromis entre cette force de portance qui le tient en l'air et cette force de traînée qui le ralentit."
"La position en vol est évidemment importante, mais l'impulsion est la phase la plus critique car c'est là qu'il va gagner les quelques mètres", souligne le chercheur de cet institut, partenaire depuis six ans de la Fédération française de ski (FFS).
'Exagérer les sensations'
Savoir utiliser le vent comme une rampe de lancement, voilà l'enjeu selon Nicolas Coulmy, directeur du département sportif et scientifique de la FFS: "Tout l'intérêt du travail réalisé ici est de reproduire des perceptions visuelles, au niveau du mouvement du corps... etc, pour voir comment les skieurs peuvent faire évoluer la technique derrière".
"C'est un travail pour exagérer les sensations", renchérit Jérôme Laheurte, entraîneur saut de l'équipe de France de combiné nordique. "Au tremplin, on est à plus de 90 km/h, tout va très vite. Quand on parle d'un point technique à modifier, les gars ont parfois du mal à le sentir. En soufflerie, ils arrivent plus facilement à coupler les appuis aérodynamiques à leurs sensations".
Les forces de portance ou de traînée ne sont pas des notions abstraites pour Jason Lamy-Chappuis, qui a un brevet de pilote d'avion.
"Ces séances en soufflerie sont importantes, car on peut valider rapidement des choses qu'on ressent à l'entraînement avec des données concrètes. Cela permet aussi de faire des exercices avec des sensations un petit peu différentes, travailler des nouvelles choses qu'on ne peut pas forcément travailler au tremplin", souligne le triple vainqueur de la Coupe du monde.
Le porte-drapeau de la délégation française aux JO de Sotchi a pu ainsi faire le bon choix entre deux modèles de combinaison. Pour viser un deuxième titre olympique en Russie en février, le Jurassien sait qu'il ne doit rien laisser au hasard.
"Il faut constamment chercher des choses nouvelles. Grappiller des centimètres au saut et quelques secondes en ski de fond, cela passe par la soufflerie, des nouveaux tissus pour les combinaisons de saut, une technique irréprochable et savoir s'adapter à toutes les conditions possibles. Qu'il pleuve, qu'il neige, qu'il vente, il faut être là le jour J".
Dans la soufflerie de l'HEPIA en novembre, Lamy-Chappuis a mis les voyants au vert comme jamais. "Cela va permettre de gagner des mètres", souffle son entraîneur.