Happy Birthday : |
Fidèle au principe du tout ou rien qui l'a guidé durant sa carrière, Bode Miller a failli réussir un énième exploit dans le super-G des Mondiaux-2015 jeudi, avant de devoir écourter sur blessure son dernier grand rendez-vous.
La saison 2014-15 de Miller aura en tout et pour tout duré moins d'une minute.
En 55 petites secondes, "le boss du ski" a réussi à condenser son incroyable et flamboyante carrière et justifier sa réputation de phénomène sans équivalent dans l'histoire de son sport.
Parti avec le dossard 9, sans avoir participé à une seule course de l'hiver, l'Américain de 37 ans -opéré d'une hernie discale en novembre !- se joue d'abord comme aucun autre des difficultés de la partie haute de la "Birds of Prey".
En tête après le premier intermédiaire, le champion olympique 2010 de super-combiné est redevenu l'équilibriste capable de gestes uniques, comme de skier sur les bâches de protection de la descente de Kizbühel en 2008.
Dans la portion de glisse, il accroît encore son avance, pour compter 56/100e d'avantage sur l'Autrichien Georg Streitberger , alors en tête. Mais, comme souvent dans sa carrière débutée en 1998, ses prises de risques le conduisent à la faute.
- Tendon sectionné -
Cherchant la ligne la plus rapide, "Bode" percute une porte avec son bras gauche, à plus de 100 km/h: déséquilibré par la banderole qui est resté accrochée aux deux piquets, le skieur aux 33 succès en Coupe du Monde et aux deux globes de N.1 mondial (2005, 2008) est projeté dans la pente.
Après une cabriole où il perd l'un de ses skis, il continue en rouler-bouler, déchaussant son deuxième ski avant de s'immobiliser une trentaine de mètres plus bas.
Pour rassurer son fils Samuel, deux ans, et sa femme, l'ancien joueuse professionnelle de beach-volley Morgan Beck, enceinte, qui l'attendent dans l'aire d'arrivée, Miller leur adresse un signe de la main. Et il les rejoint ensuite sous les applaudissements des spectateurs, comme si de rien n'était.
Mais les images de télévision montrent aussitôt sa combinaison déchirée et une profonde entaille derrière son genou droit.
Transporté dans une clinique de Vail, Miller a dû être opéré en urgence, l'un des tendons de son mollet ayant été sectionné par un ski durant sa chute.
"Je me sens chanceux, car les choses auraient pu être pires", écrit ensuite le casse-cou américain sur son compte Twitter, au-dessus d'un photo le montrant dans un lit d'hôpital, le pouce levé.
Ses entraîneurs ont ensuite confirmé la nouvelle redoutée par beaucoup: ses Mondiaux-2015, les 8e de sa carrière et peut-être les derniers, sont terminés.
- Eleveur de pur-sangs-
"C'est impossible qu'il recourt à nouveau durant ces Championnats", a expliqué Alexander Hödelmoser, l'entraîneur autrichien des descendeurs américains. Et "il est aussi très probable que sa saison soit terminée", a-t-il poursuivi.
Cette chute laisse bien des regrets: personne, pas même le champion du monde 2015 l'Autrichien Hannes Reichelt , n'avait été plus rapide que Miller sur les deux premiers temps intermédiaires.
"Il était parti pour une médaille, on a toujours su qu'il pouvait monter sur le podium, c'est dommage mais c'est le ski alpin", a résumé Hödelmoser.
Reverra-t-on Miller, l'ancien rebelle du cirque blanc, l'ex grande gueule, coureur de jupons et noctambule invétéré, en compétition l'hiver prochain ? Son entraîneur lui même ne le sait pas.
A 37 ans et 115 jours, il aurait pu devenir le champion du monde le plus âgé de l'histoire, un énième record pour l'homme aux six médailles olympiques et quatre titres mondiaux. Mais les statistiques et l'histoire ne sont pas la préoccupation de Miller, qui a besoin de passion.
Il l'a trouvée ailleurs que dans le ski: le gamin qui a grandi dans une famille hippie veut devenir entraîneur de chevaux de course et s'est acheté un haras dans le Kentucky, au coeur de l'élevage américain.