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"Coupe du Peuple": c'est le nom qu'ont donné des milliers de mal logés à une favela en cours d'installation, à quelques encablures de l'Arena Corinthians, le stade de Sao Paulo qui accueillera le match d'ouverture du Mondial-2014 le 12 juin.
C'est un terrain poussiéreux, plein de pierres et de broussailles, parsemé de quelques arbres. La preuve que malgré les investissements massifs dans les projets dédiés à la Coupe du monde, la pauvreté surgit toujours à n'importe quel coin de rue au Brésil.
"Ca fait 40 ans que ce terrain est vide. Et nous, on est venu l'occuper pour que chaque famille ait un foyer. Voilà les grands contrastes du Brésil, qui veut se montrer comme un pays parfait", dit à l'AFP Maria Siqueira, 44 ans.
"Mais ce n'est pas comme ça, parce qu'il nous manque ici de la santé, de l'éducation et des logements", ajoute cette militante du Mouvement des travailleurs sans toit (MTST), qui dirige l'occupation commencée samedi matin.
Ce lundi, quelque 1.500 familles étaient déjà recensées et les organisateurs espèrent en augmenter le nombre.
Il fait chaud en ce début d'après-midi, dans ce secteur de l'est de Sao Paulo, à plus d'une heure de route du centre de cette mégapole de 11 millions d'habitants engorgée par le trafic automobile.
- Puits et tentes -
Un peu partout, des enfants qui jouent. Des groupes d'hommes et de femmes creusent des puits dans la terre et montent de petites tentes faites de bouts de bois, de tapis et de plastique.
"C'est dans ce stade qu'on devrait aller vivre, là on aurait au moins une salle de bains", lance, en ne plaisantant qu'à moitié, José Ferreira, qui attend comme tant d'autres son tour dans la queue pour la distribution de nourriture.
Cet homme de 50 ans, qui ne peut plus travailler après un accident vasculaire, résume le sentiment de beaucoup de personnes rencontrées par l'AFP dans cette occupation illégale: elles aiment le football et vont suivre la Coupe du monde, mais estiment que l'Etat brésilien aurait dû investir ses fonds d'une autre manière.
"C'est pour ça qu'on a choisi le nom de +Coupe du Peuple+, parce qu'on voulait mettre en évidence les inégalités sociales au Brésil. Et parce que la Coupe n'est pas la nôtre, et celle-là, si", raconte Maria Siqueira en désignant la nouvelle favela.
A quatre kilomètres seulement s'érige l'Itaquerao, surnom de l'Arena Corinthians, stade encore inachevé et qui devrait être prêt "au dernier moment", selon le secrétaire général de la Fifa, Jérôme Valcke.
Le stade privé appartenant au club de Corinthians coûtera finalement entre 411 et 424 millions de dollars, dont les deux tiers financés par les pouvoirs publics.
Les investissements publics pour le Mondial ont été la cible des centaines de milliers de manifestants lors du vaste mouvement social de juin 2013, en pleine Coupe des Confédérations.
- Loyers trop élevés -
A l'entrée de la favela, sur un terrain privé de quelque 200.000 mètres carrés, une énorme pancarte demande: "Pour des logements dignes".Les familles qui s'installent dans la "Coupe du Peuple" viennent de la zone est de Sao Paulo. La plupart habitaient chez des parents ou payaient des loyers trop élevés pour leurs revenus.
C'est le cas de Patricia Alves. Cette mère de quatre enfants, qui gagne 410 dollars par mois, devait en payer 350 de loyer. "Je suis venue ici avec ma soeur et ses enfants", explique cette quadragénaire. "C'est notre seule manière de faire pression pour avoir une maison, et donc nous entrons ici dans la lutte".
Les baraques ne sont pas définitives. Les habitants disent se réunir en assemblées et négocier avec la mairie pour construire des maisons.
Sao Paulo est la ville la plus peuplée et riche du Brésil, mais ses habitants subissent une hausse des prix immobiliers provoquée notamment par l'organisation de la Coupe du monde. Et c'est aussi la ville qui connaît le plus de demandes de logement: il en manquerait 700.000 selon la municipalité.