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Après sept ans de soubresauts et de préparation troublée, le Brésil donne enfin jeudi le coup d'envoi de "son Mondial" de football, sous un ciel toujours menacé par les grèves et manifestations.
"A tous les Brésiliens, je veux dire que l'heure est arrivée. Nous sommes tous ensemble. C'est notre Coupe du monde", a lancé sur un ton churchilien l'entraîneur brésilien Luiz Felipe Scolari, à quelques heures du match d'ouverture Brésil-Croatie à Sao Paulo.
La rencontre se jouera devant plus de 61.000 spectateurs, 12 chefs d'Etat, le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon, et un milliard de téléspectateurs.
"Le monde sait que vous êtes les meilleurs", a affirmé sans ambages la présidente brésilienne Dilma Rousseff dans une lettre adressée aux auriverde, vantant à la fois "la joie exprimée par leurs jambes", "la souplesse de leurs mouvements" et leur capacité d'"improvisation déconcertante".
Ces encouragements ne seront pas de trop pour la Seleçao, sur laquelle pèse une énorme double-pression : celle d'effacer pour toujours le traumatisme national de la défaite de 1950 au Maracana face à l'Uruguay et de redonner le sourire, ne serait-ce qu'un mois, à des Brésiliens moroses.
Le Mondial s'ouvre, en effet, dans un contexte social tendu et sous la menace de manifestations qui dégénèrent souvent en affrontements violents avec une police militaire au méthodes musclées.
Au grand soulagement des autorités, le front social s'est toutefois nettement dégagé à Sao Paulo quelques heures avant l'entrée en piste de Neymar et des siens, avec l'annonce mercredi soir de la non reconduction de la grève des employés du métro, dont le mouvement avait semé le chaos dans la capitale économique pendant cinq jours en fin de semaine dernière.
- Les aéroports de Rio en grève -
En revanche, l'intersyndicale du personnel au sol des trois aéroports de Rio de Janeiro a annoncé mercredi soir le lancement d'une grève de 24 heures qui concernera 20% du personnel à partir de mercredi soir à minuit.
Même s'il reste limité, ce mouvement pourrait provoquer de fortes perturbations alors que des milliers de touristes des quatre coins du monde rejoignent chaque jour la "ville merveilleuse", où le premier match (Argentine-Bosnie) est prévu dimanche.
A Natal (nord-est), une des 12 villes hôtes, ce sont les chauffeurs de bus, unique moyen de transport en commun de la ville, qui ont décidé d'entrer en grève dès jeudi, en promettant un service minimum de 30%. Natal doit notamment accueillir les matches Mexique-Cameroun vendredi et Ghana-USA lundi, auquel assistera le vice-président américain, Joe Biden.
Parallèlement aux mouvements sociaux, le front anti-Mondial va tenter jeudi de trouver un nouveau souffle avec des manifestations convoquées dans 9 des 12 villes hôtes de la compétition.
Deux sont convoquées à Sao Paulo dont une à 10H00 (13H00 GMT) à la station de métro Carrao, sur la ligne qui mène au stade. Deux autres manifestations sont prévues à Rio de Janeiro, l'une dans le centre le matin, l'autre sur la plage de Copacabana dans l'après-midi, non loin du fan-fest de la Fifa.
Depuis la fronde sociale historique de juin 2013 contre les 11 milliards de dollars engloutis dans l'organisation chaotique du Mondial, le mouvement s?essouffle peu à peu, mais perturbations et débordements d'éléments radicaux sont à craindre pour les autorités.
Dilma Rousseff a averti mercredi qu'aucun débordement ne serait toléré pendant la Coupe.
"La Coupe est un événement national (...) Nous sommes un pays démocratique et nous allons respecter le droit des personnes à manifester. Cependant, nous n'aurons pas la moindre tolérance envers ceux qui commettent des actes de vandalisme ou empêchent le droit de la majorité de profiter de la Coupe du monde", a dit la présidente brésilienne.
L'Etat brésilien a déployé quelque 157.000 policiers et militaires pour assurer la sécurité des joueurs, des autorités et des supporteurs pendant la compétition.
A quelques heures du début de cette compétition qui pourrait enfin permettre à la Seleçao de fêter un titre mondial à domicile, l'euphorie n'est pas encore palpable. Même si chaque jour, rues, balcons et voitures se parent de drapeaux du Brésil toujours plus nombreux.
Antonio Carlos Rodrigues, un marchand ambulant installé à un carrefour fréquenté de Sao Paulo, confie qu'il ne vend qu'une dizaine de drapeaux brésiliens par jour au lieu de 30 lors des précédentes Coupes du monde.
Témoignant de l'imminence du coup d'envoi initial, les 32 équipes sont désormais toutes présentes sur le territoire du Brésil, après les arrivées mercredi du Ghana, de la Corée du Sud et du Portugal.
En marge de ces préparatifs, le président de la Fifa Joseph Blatter a déclaré à Sao Paulo qu'il était "prêt", à 78 ans, à briguer un cinquième mandat à la tête de la Fifa, en clôture du congrès de l'instance. Il avait admis dans la matinée que la Fifa, ébranlée par les accusations de corruption sur l'attribution du Mondial-2022 au Qatar, avait besoin de "changer".
"Le foot n'est pas seulement un jeu, c'est devenu, qu'on le veuille ou non, une entreprise qui pèse plusieurs milliards de dollars et génère parfois des controverses et des situations compliquées. Je dois reconnaître, dans ces temps importants pour le football et pour la Fifa, que le monde change, le jeu change et le jeu de notre organisation doit changer", a-t-il déclaré.
Mercredi soir, le Christ Rédempteur, qui veille sur la magnifique baie de Rio de Janeiro, s'est illuminé alternativement aux couleurs des 32 pays engagés pendant une demi-heure. Il s'est ensuite figé en vert et jaune, jusqu'à l'aube du coup d'envoi du Mondial au pays du roi Pelé et des artistes du foot-samba.