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Le Brésil s'est réveillé partagé entre honte et colère mercredi matin, au lendemain de la déroute historique (7-1) face à l'Allemagne, en demi-finale de la Coupe du monde.
Le choc de cette première demi-finale du Mondial est tel qu'on en oublierait presque qu'un autre finaliste sera désigné mercredi soir (coup d'envoi 20h00 GMT), entre l'Argentine de "Leo" Messi et les Pays-Bas de Van Persie et Robben.
Les journaux brésiliens hésitent entre blanc et noir pour fustiger la prestation de la Seleçao.
La Une du quotidien sportif Lance! est restée désespérément blanche, à l'exception de ces quelques lignes en bas de page, à l'adresse du lecteur: "Indignation, révolte, douleur, frustration, irritation, honte, peine, désillusion... Dis ce que tu ressens et fais, toi-même, la Une de Lance!".
"HONTE, VEXATION, HUMILIATION": les mêmes adjectifs reviennent en énormes caractères gras en Une du quotidien O'Globo.
Le journal gratuit Métro affiche sur toute sa couverture une photo presque totalement noire, à l'exception, tout en bas de la page, du tableau d'affichage illuminé en vert du stade Mineirao de Belo Horizonte avec ce score inoubliable: Brésil 1, Allemagne 7.
Première page toute noire aussi pour le journal populaire Meia Hora avec ce titre en lettres blanches: "Nao Vai Ter Capa" (Il n'y aura pas de Une), un détournement du slogan "Nao Vai ter Copa" (la Coupe n'aura pas lieu, Ndlr) des manifestants anti-Mondial brésiliens.
- Quelles conséquences pour Dilma Rousseff? -
La presse traduit le sentiment général des quelque 200 millions de supporteurs brésiliens et même des membres de la Seleçao. Le sélectionneur Luiz Felipe Scolari a assuré avoir vécu "la pire journée de (sa) vie". Dans l'heure suivant le coup de sifflet final, la présidente Dilma Rousseff s'était déclarée "très, très triste", demandant à ses compatriotes de ne pas "se laisser abattre".
Avant cette défaite humiliante, la pire de l'histoire de la Seleçao, la présidente surfait sur la vague du succès du Mondial, une compétition finalement sans accroc majeur malgré les craintes initiales.
Candidate à un second mandat à l'élection présidentielle du 5 octobre, Dilma Rousseff, qui promettait depuis des mois que le Brésil organiserait la "Coupe des coupes", a même gagné quatre points pendant le Mondial, avec 38% d'intention de vote et une solide avance sur ses adversaires politiques.
Reste à voir, après le choc de mardi, si Mme Rousseff, favorite des sondages, pourra continuer à dissocier son destin politique de celui de la Seleçao.
Même si l'organisation du Mondial a finalement été un grand succès, avec cette défaite, les critiques pourraient ressurgir contre le gouvernement sur la facture publique très élevée du Mondial (11 milliards de dollars) et les problèmes chroniques du pays: éducation, santé et transports publics défaillants, croissance en berne, inflation au-dessus de la cote d'alerte.
Soixante-quatre ans après le "Maracanazo", le drame national qu'avait été cette défaite 2-1 face à l'Uruguay en 1950, au Maracana, synonyme de perte d'un premier titre mondial promis, le Brésil a vécu son "Mineirazo" mardi soir à Belo Horizonte.
- Euphorie en Allemagne -
A l'inverse, l'Allemagne, trois fois championne du monde (1954, 1974, 1990), baigne dans l'euphorie et rêve de mettre un terme à 18 ans sans succès dans une compétition majeure, depuis l'Euro-96.
Avec 32,57 millions de téléspectateurs en moyenne, cette demi-finale Allemagne-Brésil a battu des records d'audience à la télévision allemande. Et les 25 millions de tweets générés lors du 48e Super Bowl (football américain) le 2 février ont été balayés par les 35,6 millions de messages émis pendant la correction infligée à la Seleçao, soit un nouveau record sur le réseau social, tous sports confondus.
L'allégresse a gagné la presse. "7:1 pas de mots !", titrait ainsi en Une le quotidien populaire Bild, avec une photo de Kroos (double buteur mardi) porté à bout de bras par Khedira. Et le journal de consacrer quasiment une page par but, photo à l'appui, pour faire encore durer ce rêve allemand.
Le Brésil et Neymar partis, il reste encore des matchs et des joueurs. Et l'Argentin Lionel Messi, quadruple Ballon d'Or, qui dispute sa troisième Coupe du monde. En cas de victoire face aux Pays-Bas mercredi soir à Sao Paulo, il retrouvera l'Allemagne, sa bête noire, en finale du Mondial dimanche au Maracana.
La Mannschaft, bien avant la correction infligée au Brésil, était déjà le cauchemar de Messi...
Flashback. En 2006 à Berlin, "Leo", qui venait d'avoir 19 ans, assiste, effondré, depuis le banc des remplaçants de l'Albiceleste, à la séance de tirs au but fatale à sa sélection en quarts de finale face à l'Allemagne, pays organisateur (1-1 a.p.; 4 t.a.b à 2)
Quatre ans plus tard, à la Coupe du monde en Afrique du Sud, c'est un Messi devenu pièce centrale de l'équipe, à 23 ans, couvé par le coach de l'époque, Maradona, qui retrouve l'Allemagne, à nouveau en quart de finale. L'humiliation est plus grande encore au Cap. La Mannschaft dévore la formation argentine (4-0). Et c'est un Messi en pleurs, inconsolable, qui quitte la pelouse.
Cette fois "La Pulga" a enfin franchi le seuil des quarts et n'est plus qu'à une marche de la finale de ses rêves dimanche au Maracana, enceinte de légende.
Dans quatre ans, en revanche, ce sera à nouveau le Brésil, assurait dès mardi soir le "roi" Pelé, qui voit déjà la Seleçao décrocher sa sixième étoile en Russie au Mondial-2018.