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Le XV de France est apparu bien démuni dimanche face à l'Irlande, enferré dans un stérile défi physique qui pose la question de sa capacité à adapter sa stratégie samedi face aux All Blacks, en quarts de finale de Coupe du monde.
Avec ces armes-là, les Bleus peuvent-ils le faire ? En asseyant l'essentiel de son jeu sur la puissance, avec des gros bras dans toutes les lignes, le XV de France affiche des ambitions de jeu volontairement restrictives mais centrées sur un leitmotiv: "faire bien des choses simples".
Contre l'Irlande qui a confisqué le ballon et répondu d'un bout à l'autre dans le défi physique pour l'emporter 24 à 9, les partenaires de Thierry Dusautoir ont touché du doigt les limites de la méthode. Leur inaptitude à changer de registre a aussi été frappante, accentuant ainsi le contraste avec l'impressionnante maîtrise collective du XV du Trèfle durant cette partie sous haute tension.
- Trop prévisible -
Contraint par ses résultats médiocres, le profil de son réservoir de joueurs et l'impossibilité d'appliquer sa philosophie "d'adaptation dans le désordre", l'encadrement du XV de France avait choisi d'adopter un jeu plus simple et plus programmé, adossé au défi physique et à la réussite des buteurs, en vue des tests de novembre 2014. En même temps, il avait fait voeu d'efficacité et d'un pragmatisme qui n'a pas toujours été l'apanage français.
L'objectif était "d'avancer et de réussir à conserver la vitesse du jeu", dixit Yannick Bru, l'entraîneur des avants. "Quand une équipe avance et garde sa vitesse, ça devient plus facile de gagner les duels et on a des joueurs derrière pour être bon dans ces situations-là", expliquait-il encore.
Si, grâce à une bonne préparation, cette stratégie a permis de marcher sur les trois premiers adversaires en Coupe du monde (Italie, Roumanie, Canada), elle a donc été trop prévisible pour surprendre des Irlandais bien équipés, notamment dans le jeu au sol où ils ont perturbé les sorties rapides françaises. Est-ce avec cela que les Bleus étrilleront les All Blacks ?
Mardi, l'arrière Brice Dulin explorait une première piste. "Il faudra être sûr des choses qu'on fait. Ce sera peut-être moins ambitieux sur les premiers temps de jeu. Mais après, il faut qu'au niveau du jeu, sur les ballons de récupération, on tente des coups".
"Ce n'est pas en étant minimaliste, en rendant le ballon et en passant notre temps à défendre comme contre l'Irlande qu'on va s'en sortir", prêche-t-il encore. "Moi, je préfère attaquer. Alors, il faut se prendre en main."
Mais n'est-ce pas se bercer d'illusions que de croire à un changement subit, en quelques jours seulement ?
"Je penche plutôt sur une stratégie +hormonale+ que tactico-tactique car sur l'intensité, l'engagement, les All Blacks poseront au moins autant si ce n'est plus de problèmes que l'Irlande", répond à l'AFP l'ancien sélectionneur des Bleus (1991-95) Pierre Berbizier, qui commente la compétition pour Canal +.
- Pas de matches-références -
"On voit qu'on a du mal à animer le jeu. Tactiquement, je ne vois pas comment on va régler en une semaine des problèmes récurrents depuis quatre ans", appuie-t-il en déplorant le manque de matches-références sur lesquels se baser.
"On ressort sans cesse les exploits face aux Néo-Zélandais de 1999 et de 2007. Mais ces équipes avaient des matches sur lesquels s'appuyer", souligne encore Pierre Berbizier, qui avait mené le XV de France en demi-finales du Mondial-1995.
Le manager Philippe Saint-André devra s'assurer que son équipe laissera toutes ses forces sur la pelouse, dans le sillage de quelques leaders ou caractères bien trempés. En ce sens, il devrait y avoir du changement à l'orchestration du jeu, avec les entrées de Morgan Parra voire de Rory Kockott à la mêlée, au détriment de Sébastien Tillous-Borde.
Saint-André sera sans doute tenté de battre le rappel de quelques anciens, comme Nicolas Mas ou Yannick Nyanga, peut-être même osera-t-il déplacer le centre Wesley Fofana à l'aile pour fluidifier un peu le jeu des Bleus. Ensuite, il ne restera plus qu'à croiser les doigts et attendre un miracle.