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Après quatre ans de recherches et d'infortunes, le manager du XV de France Philippe Saint-André peine encore à pourvoir convenablement ses ailes, un poste en pleine mutation dont le réservoir est faible.
Ce n'est pas faute d'avoir essayé: avec 17 joueurs titularisés en N.11 ou N.14 depuis le Tournoi des six nations 2012, Philippe Saint-André a effectué une large revue d'effectif. Pourtant, il abordera le choc de Coupe du monde dimanche face à l'Irlande avec un élément peu aguerri, Noa Nakaitaci (25 ans, 6 sél), et un arrière (très) contrarié, Brice Dulin, sur les côtés.
Si une ossature s'est désormais dégagée aux autres postes, l'incertitude règne toujours à l'aile, surtout après la blessure lors de l'entrée en lice en Coupe du monde de Yoann Huget, un joueur incontournable du mandat Saint-André. De quoi se poser la question: où sont les ailiers français, ceux capables de débloquer des situations face à des défenses resserrées ?
"Il n'y a pas d'inquiétude particulière", tempère auprès de l'AFP le Directeur technique national Didier Retière. "C'est assez cyclique et globalement dans les équipes de France de jeunes on a pas mal d'ailiers assez intéressants et rapides comme Lucas Blanc (Bordeaux-Bègles), Martin Laveau (Bayonne) ou encore Arthur Bonneval (Toulouse)", poursuit-il.
"Mais c'est vrai qu'on a aussi ce problème en France de ne pas faire beaucoup jouer ces jeunes en championnat", regrette aussitôt Retière.
- Moins de 50% de sélectionnables en Top 14 -
C'est bien le noeud du problème. Selon un décompte de l'AFP, en moyenne sur les 26 journées de la saison régulière du Top 14 2014-2015, seulement 46,4% des ailiers alignés au coup d'envoi des rencontres étaient sélectionnables en Bleu.
"J'aurais aimé et dû essayer plus d'ailiers", regrette ainsi Saint-André en évoquant "60-70% de Fidjiens" sur les ailes du Top 14. Une exagération, même si une bonne douzaine d'îliens sévit régulièrement. Du coup, difficile de trouver des joueurs capables de soutenir le rythme international quand ils ne disposent que de peu de temps de jeu durant l'année.
C'est aussi pour cela que des non spécialistes du poste sont testés sur le côté, comme les centres Wesley Fofana et Gaël Fickou, ou encore l'arrière Brice Dulin. Et cette polyvalence, parfois mal vécue par les intéressés, s'inscrit dans une tendance moderne.
"Etre arrière-ailier, c'est intéressant pour le jeu aérien qui est une donnée prépondérante à très haut niveau, tout comme la versatilité centre-ailier pour la présence dans les rucks", souligne Didier Retière.
"Il y a donc peut-être moins d'ailier spécifique en ce moment", appuie-t-il encore.
"C'est tout de même un paradoxe terrible: Saint-André était un formidable ailier, (son adjoint) Patrice Lagisquet aussi et (le prochain sélectionneur) Guy Novès était un pur ailier", en rigole Christian Darrouy, une des gloires françaises du poste avec 40 sélections entre 1957 et 1967 et 23 essais au compteur.
- "Un poste de défi" -
"Mais maintenant on demande beaucoup de choses aux ailiers", remarque l'ancien international âgé de 78 ans. "On retrouve régulièrement des ailiers dans les regroupements et des talonneurs en bout de ligne. De mon temps, d'abord j'avais peur d'aller dans les regroupements et si j'y allais, il y avait toujours un avant pour m'attraper et me dire: +casse-toi de là+", sourit-il encore.
Mais l'ancien capitaine des Bleus souligne aussi que le poste demande "des réflexes" particuliers, comme "le sens de l'anticipation", "la capacité à sentir le coup", "de la vitesse", ou encore d'être "très attentif en défense".
"La difficulté pour un non spécialiste, c'est de rentrer dans l'organisation défensive car la défense en bout de ligne est peut-être ce qui a de plus complexe", abonde Didier Retière, pour qui le poste demande aussi "un profil psychologique particulier".
"On s'est aperçu que les ailiers avaient une mentalité très proche de celles des piliers. C'est un poste de défi où il faut avoir un esprit dominant par rapport à son adversaire direct", développe-t-il.
En pénurie d'ailiers purs, le XV de France est aussi frappé de stérilité offensive (1,7 essai par match en moyenne depuis le Tournoi 2012). Difficile de ne pas faire le lien.