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© AFP/Tim Warner
Combat féminin de MMA, le 4 février 2017à Houston
Le MMA (Mixed martial arts), interdit en France, est confronté à des adversaires redoutables: les autres fédérations, jalouses de son succès, et surtout le ministère des Sports, qui s'oppose toujours à la tenue de compétitions dans le pays.
Ce constat intervient après la présentation mercredi au Sénat par le député Patrick Vignal (PS) et le sénateur Jacques Grosperrin (LR) de l'observatoire chargé d'accompagner le développement de cette discipline. Un sport de combat associant plusieurs disciplines comme le Muay Thaï, la boxe anglaise, le jiu-jitsu ou le sambo.
Fin octobre, un arrêté ministériel d'interdiction a préventivement sapé les conclusions du rapport que les deux parlementaires s'apprêtaient à remettre aux autorités. Il a en plus fragilisé leur observatoire qui commencera ses travaux en mars.
"Nous avons été choqués par cet arrêté car le MMA n'est pas un phénomène de mode, c'est un sport qui va s'inscrire dans la durée", a expliqué mercredi Jacques Grosperrin, qui siègera comme son collègue dans l'observatoire.
Leur rapport remis malgré tout le 8 novembre au Premier ministre d'alors, Manuel Valls, prônait la légalisation progressive de cette discipline, et dans ce but la création préalable d'une commission chargée d'accompagner la structuration du MMA dans l'Hexagone.
Si le secrétaire d'Etat aux sports Thierry Braillard a consenti à sa mise en place, il a réaffirmé l'opposition du gouvernement à la légalisation des combats de MMA qui autorisent les frappes au sol, des coups portés avec les coudes et se déroulent dans un ring fermé appelé octogone.
- Le judo farouche opposant -
"Il est donc fondamental de trouver des solutions sur l'encadrement, la santé publique et l'éthique pour rassurer les pratiquants, les entraîneurs et les présidents de clubs", a rappelé M. Grosperrin.
Le sénateur écarte toutefois l'idée de légiférer sur ce sujet "trop sensible", souhaitant privilégier le dialogue au sein de l'observatoire du MMA.
Celui-ci est adossé à la Confédération française des arts martiaux et des sports de combat (CFAMSC) regroupant de nombreuses fédérations délégataires.
C'est d'ailleurs son président Alain Bertholom, président de la fédération française de lutte, qui le chapeautera.
Or, les différentes fédérations ont des intérêts contradictoires, y compris financiers. Si certaines comme le karaté ou la lutte, souhaiteraient récupérer le MMA sous forme de filiale, d'autres comme le judo refusent toute reconnaissance.
Le président de la puissante Fédération française de judo, Jean-Luc Rougé, a ainsi mis en garde à nouveau mercredi contre les risques de troubles à l'ordre public comme "le trafic de drogue".
Les acteurs du MMA sont eux partagés entre la satisfaction de voir la pratique être encadrée mais sont dubitatifs, voire inquiets, sur la capacité réelle de l'observatoire à légaliser les compétitions.
"C'est la première fois qu'il se passe quelque chose de vraiment concret", préfère résumer Bertrand Amoussou, qui dirige la Commission française de MMA, à l'origine d'un recours auprès du Conseil d'Etat pour faire tomber l'arrêté ministériel.
La France est l'un des rares pays à interdire les compétitions de cette discipline au nom de la "dignité humaine", mais elle tolère la pratique d'environ 40.000 pratiquants dans des centaines de clubs sur son territoire.
- Une fédération dans trois ans -
Souvent présente dans des salles de sport sous une autre appellation, elle est encadrée par des professeurs d'autres arts martiaux et sports de combat ou par des individus n'ayant aucune formation.
"Il faut à tout prix qu'il n'y ait plus de gens qui puissent enseigner sans les compétences", souligne Patrick Vignal, favorable à "un diplôme spécifique qui reprendrait des éléments d'autres disciplines" et à ce que "d'anciens combattants français puissent valider des acquis d'expérience".
"Les clubs qui ne respecteront pas le cahier des charges que nous allons mettre en place seront fermés", affirme-t-il par ailleurs.
Pour Patrick Vignal, les travaux de l'observatoire pourraient déboucher "dans trois ou quatre ans" sur la création d'une fédération indépendante de MMA.
Ce qui, selon certains, permettrait de contourner l'arrêté ministériel, qui ne concerne que les disciplines non associées à une fédération délégataire.
"Mais avant de demander une délégation de service public, il faut avoir déjà organisé des compétitions", relève un patron de salle, déjà peu confiant en raison de la probable alternance politique après l'élection présidentielle.
"Si le prochain ministre des Sports décide de tout arrêter, on ne pourra rien faire", assure cette même source.