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Un drapeau bleu flanqué de six étoiles entre dans le stade olympique des Jeux européens de Bakou: le Kosovo vit un rêve pour la première fois après avoir bravé pendant plus deux décennies violences et menaces serbes.
"C'était un long rêve depuis plus de 20 ans, être un jour membre de la famille olympique. Alors quand vous touchez votre rêve, c'est merveilleux, c'est quelque chose d'impossible à décrire. Je me suis dit: je peux mourir demain", raconte Besim Hasani dans un entretien à l'AFP.
C'est une quête ardente qui a animé et continue de faire vibrer le président du comité olympique kosovar, ému aux larmes en revivant la cérémonie d'ouverture des Jeux européens.
Depuis le 9 décembre, le Comité national olympique du Kosovo est membre du Comité international olympique (CIO), le 50e européen. Les Kosovars ont attendu 22 ans.
Le comité a été créé en 1992, l'année où a été élu Ibrahim Rugova président de la république auto-proclamée du Kosovo, alors province méridionale de la Serbie peuplée majoritairement par des Albanais. Seule l'Albanie reconnaît alors le Kosovo comme Etat.
Hasani est à l'époque président de la Fédération kosovare de karaté. Frustré de voir ses athlètes ne pas pouvoir combattre hors du pays et convaincu de perdre des talents, il décide de se rendre sur des championnats d'Europe de karaté pour plaider la cause de ses sportifs.
"On a fait des pin's, des stylos, des cartes de visite. On s'est présenté du Kosovo et on a dit: on veut participer aux compétitions internationales", se souvient-il.
Hasani a convaincu un homme: le secrétaire général de la Fédération internationale de karaté, le Hongrois George Popper, qui les a invités à un tournoi open en Hongrie.
- Kelmendi, la pionnière -
"Vous imaginez! On a participé à une coupe du monde en tant que Kosovo! Même pour nous, ça paraissait si étrange mais on l'a fait. Et toutes les années qui ont suivi, on y a participé. Les gens étaient surpris au Kosovo. Tous les enfants ont voulu faire du karaté et le karaté est devenu la plus grande fédération", se félicite Hasani.
Et c'est en 1996 qu'il prend les commandes du comité olympique. L'Armée de libération du Kosovo (UCK) se lance dans une guérilla antiserbe. En 1998 et 1999, la guerre fera plus de 13.000 morts. Hasani, lui, a combattu pacifiquement en faisant reconnaître le Kosovo sur le terrain du sport.
"J'ai tout affronté. Bien sûr de la part de la Serbie. Les Serbes étaient au courant de mes activités. Mais j'étais préparé à tout, à être condamné, à être battu, à être tué. Ma famille était au courant. C'était à l'époque où beaucoup de gens se faisaient tuer, y compris des victimes innocentes", dit-il, "chanceux" que rien ne lui soit arrivé.
"On a organisé des championnats de football, de basket-ball, dans des sports individuels, au nez du régime serbe, devant les forces de police. Ils sont venus stopper les compétitions, ils ont battu les gens, ils en ont envoyé en prison. Et peu importe si c'était des enfants", souligne ce père de famille.
Le 10 juin 1999, les forces serbes se retirent après des frappes de l'Otan contre la Serbie et le Kosovo est placé sous protection internationale.
Hasani n'a jamais baissé les bras. "Après la guerre, je me suis rendu sur les endroits où il y avait des membres du CIO, du CEO (Comité européen), des fédérations internationales qui se rencontraient. Je n'avais pas d'accréditation. Ce n'était pas facile mais j'ai trouvé toutes sortes de solutions, y compris de passer par la fenêtre !"
Le président du comité olympique d'un pays de près de deux millions d'habitants extrêmement pauvres, a distribué des "petits présents" et martelé son message: "nos athlètes attendent et attendent depuis une décennie pour jouer avec les autres".
En 2013, Majlinda Kelmendi est devenue la première Kosovare à monter sur un podium mondial en décrochant l'or en judo (-52 kg), un titre qu'elle a conservé en 2014.
"Majlinda est la personne la plus importante dans notre pays".
"Et moi, je suis maintenant vraiment le président du comité olympique du Kosovo", se réjouit Hasani.