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Claude Onesta, le sélectionneur de l'équipe de France messieurs de handball, sacrée championne du monde dimanche à Doha, explique comment il structure ses messages à ses joueurs et quel rôle la parole tient dans l'harmonie d'une équipe.
. Les bases du relationnel avec les joueurs :
"Rien n'est programmé. Mon rôle, c'est de rester dans un environnement général, de prendre des éléments de contexte. Ce qui veut dire que je n'interviens plus dans tout ce qui est le jeu, la stratégie. Ca, c'est dirigé par d'autres, c'est un échange avec les joueurs qui est bien établi. J'écoute, parce que ça m'apporte pas mal d'éléments, mais je n'interviens plus. Donc mes interventions n'ont d'effet que sur les comportements, que sur l'intensité. Va-t-on trop vite ? Doit-on ralentir ? Doit-on au contraire se secouer un peu ? C'est un peu le tempo et l'harmonie."
. Des discours dictés par le contexte :
"C'est quelque chose qui me vient, parce que ce sont les éléments et l'atmosphère qui me le donnent. Des fois ça me réveille le matin et pendant une heure je vais mûrir le truc. Je commence à construire et à structurer. Et là, je sais que dans l'heure ou les deux heures qui suivent, ça va tomber. C'est vraiment le contexte qui décide. Il ne faut pas laisser quelque chose déraper ou dériver, car ça va vite. Le mal-être de l'un se propage très vite, comme on vit en vase clos. Ou à l'inverse, un effet de sérénité trop grande peut devenir de la perte de vigilance."
. Des interventions pour quelle utilité concrète ?
"Je ne sais pas quel est l'utilité. Je le fais parce que je pense que c'est mon rôle de le faire. Après, je n'analyse pas ça en me disant : +S'ils ont bien joué ce soir, c'est grâce à moi+. Mais ce sont des éléments qui de temps en temps, à mon avis, réajustent, recadrent, permettent aux gens de reconstruire sur des bases plus solides. A un moment donné, il faut secouer le cocotier, de manière virulente. Comme je ne gueule pas en permanence, quand je viens hausser le ton, tout le monde prend la mesure que ce n'est plus pareil."
. La causerie d'une carrière :
"Celle qui est peut-être la plus marquante, c'est celle avant la finale à Zagreb (au Mondial-2009 face à la Croatie, Ndlr). Ou je leur dis presque comment le match va se dérouler. Je leur dis qu'il ne faut pas qu'on domine, qu'il faut qu'on fasse le dos rond, qu'on soit au contact, que cette pression derrière leur mollet va finir par les faire craquer. Le match se déroule pratiquement comme on l'a décidé. C'est vraiment quelque chose que je ressentais comme ça, parce que ça me paraissait logique."
. Le discours à tenir pour contre l'Espagne en demi-finale :
"Il n'y a pas besoin de grand discours avant l'Espagne. Chacun a compris que le danger était là, que l'équipe adverse est valeureuse, qu'elle a du talent. Chacun sait qu'il va devoir être à son meilleur niveau. On est concentré sur la réalisation des consignes. Il fallait aussi éviter que les jeunes joueurs rentrent trop dans l'inquiétude. Donc amener la notion de plénitude, de privilège de vivre des moments qui sont des moments merveilleux."
. Peu d'images extérieures à l'appui des discours :
"Pas trop, car il faut se recentrer. Pour la finale, on aurait pu lui donner une portée, un message sur peut-être les dérives d'une certaine forme de sport spectacle, de sport argent. Mais ce n'est pas ma fonction. Je ne sais pas ce qu'en pensent mes joueurs. Peut-être que ça ne les choque pas du tout. Il faut accepter l'idée que quand on a affaire à un groupe d'individus, ils ne vivent pas tous la même chose. Donc c'est pour ça qu'on reste très centré sur l'essentiel, qui est le match, le rapport de force, le vis-à-vis, la stratégie."