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Bertrand Roiné va vivre une aventure peu commune dimanche en finale du Mondial messieurs de handball, où il défendra les couleurs du Qatar contre ses anciens coéquipiers de l'équipe de France.
Sacré au Mondial-2011 sous le maillot tricolore, l'ancien arrière de Dunkerque et de Chambéry pourrait devenir le premier joueur de l'histoire champion du monde avec deux sélections différentes.
La carrière de Roiné (1,98 m, 33 ans, 20 sélections en équipe de France) a pris un tour inattendu à l'été 2012, quand Chambéry a décidé de ne pas renouveler son contrat.
Contacté par Lakhwiya, l'un des clubs de Doha, il décide de franchir le pas, d'abord pour assurer son avenir financier, et sachant pertinemment qu'il vient de tirer un trait sur l'équipe de France.
"En jouant au Qatar, c'est sûr que Claude (Onesta, le sélectionneur tricolore, Ndlr) ne m'aurait pas pris, ce qui est normal aussi", explique le natif du Maine-et-Loire.
"C'est sûr que ce n'est pas un Championnat qui est attrayant comme en France, en Allemagne, voire en Espagne", reconnaît-il. "Donc je savais très bien que l'aventure était finie avec l'équipe de France."
Mais une opportunité nouvelle se fait jour. Le Qatar cherche à bâtir une équipe compétitive, sous les ordres de l'entraîneur espagnol Valero Rivera, pour le Mondial-2015 qu'il va organiser.
En vertu des règlements de la Fédération internationale, qui stipulent qu'un joueur n'ayant plus joué depuis trois ans dans sa sélection nationale peut évoluer sous le maillot d'un nouveau pays, il rejoint l'équipe du Qatar.
Son ambition, assure-t-il avec une réelle conviction, est sportive et non pas financière. Il rêve de conclure sa carrière sur une participation aux jeux Olympiques de Rio en 2016.
Le joueur du club d'Al Ahli dispute d'abord un premier match amical avec le Qatar, puis en janvier 2014 une étape de la Golden League, au cours de laquelle les Qataris rencontrent la France.
- 'On joue avec le coeur" -
Dimanche, il honorera sa 20e sélection sous la maillot qatari, non sans un gros pincement au coeur. "Je ne sais pas comment je vais réagir", dit-il. "Ca avait été dur à la Golden League, je vous avouerais. Quand j'entends la Marseillaise, ça fait quelque chose".
Assailli tout au long de la quinzaine par les nombreux journalistes français, Roiné a courageusement fait front à des questions évoquant inlassablement les conditions financières accordées aux joueurs par le Qatar.
Il ne s'est pas défilé, quand l'encadrement qatari s'attachait à verrouiller la communication de tous les autres joueurs.
"C'est beaucoup d'émotions. Il y a six mois, si on m'avait dit que je jouerais la finale avec le Qatar, je ne l'aurais jamais cru", avouait-il vendredi soir après la victoire en demi-finale sur la Pologne (31-29).
"Je prends beaucoup de plaisir", affirmait-il. "J'entends parler de mercenaires, mais on n'est pas du tout ça, on joue avec le coeur. On donne tout ce qu'on a, on est une vraie équipe. Ce n'est pas par hasard si on est en finale."
L'équipe qatarie ne compte dans ses rangs que deux joueurs nés sur le sol national, les autres étant d'origine bosnienne, cubaine, égyptienne, espagnole, française, iranienne, monténégrine, syrienne ou tunisienne.
"Je pense qu'on ne fera jamais taire les critiques", estime Roiné. "Après chaque match, je regarde les réseaux sociaux ou les sites. A chaque fois, les gens parlent et parlent mal. Que voulez-vous dire ? Moi, j'ai ma vie, j'ai mes amis. Ils peuvent dire ce qu'ils veulent. Pour moi, ça ne change rien."
"On a une équipe qui est géniale", répète-t-il. "On prend plaisir, ça fait un an qu'on est ensemble. On est solidaire. Après, les gens peuvent penser ce qu'ils veulent, ça ne n'empêchera pas de vivre ce moment à fond."