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Ils traversent des océans à la rame, des déserts de glace en solitaire et font le tour du monde à pied, mais pour les aventuriers et globe-trotters de l'extrême, le vrai parcours du combattant est de monter le financement de leurs expéditions.
Cette difficulté n'est pas nouvelle mais la crise économique a aggravé les choses depuis 2008, témoignent plusieurs d'entre eux auprès de l'AFP.
"Un projet d'expédition, c'est toujours un saut dans l'inconnu, donc une prise de risque. A la fois pour ses acteurs et pour ceux qui le financent", explique Jean-Louis Etienne, qui a derrière lui de nombreuses expéditions au pôle Nord et au pôle Sud.
Malgré sa célébrité, le médecin-explorateur n'est toujours pas parvenu en 4 ans à boucler un budget de 10 millions d'euros pour construire son "Polar Pod". Il s'agit d'une sorte de phare dérivant habité et bardé de technologie pour étudier l'écosystème autour du continent Antarctique.
"Lorsque j'ai débuté en 1986, nos interlocuteurs dans les entreprises se limitaient aux responsables de la communication qui prenaient la décision", se souvient Etienne. Et de soupirer: "Maintenant, les financiers sont beaucoup plus présents dans l'examen des dossiers, avec une question: +Quel est votre business plan+?"
- Mécénat -
Le plus souvent, ces aventuriers font appel à des mécènes privés ou d'entreprise (via des fondations ou des fonds de dotation) plutôt qu'au sponsoring, qui relève d'une démarche publicitaire et est davantage tourné vers les sports classiques.
Le fossé est d'ailleurs important entre ces sports bien établis et l'aventure au sens large: "Le budget d'une participation au Vendée Globe, avec un bateau pour gagner, tourne autour de 7 à 8 millions d'euros. Ca équivaut à 3 années d'expédition pour Tara", assure Romain Troublé, l'un des responsables de Tara Expéditions, la goélette océanographique aux nombreuses missions scientifiques.
La fondation Air Liquide, géant français du gaz, participe au financement de plusieurs expéditions à coloration scientifique et environnementale. Parmi elles, "Under the pole" (Sous le pôle), l'expédition française de plongée dans les abysses arctiques au Groenland.
La fondation a octroyé un budget de 100.000 euros ainsi que 20.000 euros d'équipement à cette exploration sous-marine de 21 mois. Elle n'en attend pas un retour sur investissement mais un bénéfice en termes d'image.
"C'est un +plus+ pour la communication d'entreprise, un élément de motivation et de fierté pour les salariés, les clients et les actionnaires", souligne le délégué général de la fondation Air Liquide, Xavier Drago.
Le mécénat fait bénéficier les donateurs particuliers d'une réduction d'impôts sur le revenu de 66% du montant des versements, dans la limite des 20% du revenu imposable. Pour les donateurs d'entreprise, l'abattement est limité à 60% des versements dans la limite de 0,5% du CA.
- Artisans -
Loin des grandes entreprises, la navigatrice Anne Quéméré fait partie des modestes artisans de l'aventure, avec des budgets avoisinant la vingtaine de milliers d'euros. Elle a signé des transatlantiques à la rame et une transpacifique en kite-boat (canot tracté par une voile de cerf-volant).
"Je tricote mon réseau de partenaires moi-même, dans ma Bretagne natale: équipementiers, succursales régionales de banques... Et c'est de plus en plus difficile", raconte-t-elle.
Jean-Gabriel Chelala a bouclé en 2010 un tour du monde "à la force humaine", sans voile ni moteur. Il lui en coûtera environ 30.000 euros pour mener à bien son projet de transméditerranéenne entre la France et le Liban à bord d'une embarcation prototype, un canot à pédales doté d'un cerf-volant stabilisateur.
Ce jeune entrepreneur a créé sa propre fondation pour récolter des fonds. Elle est abondée par son entreprise de bâtiment et d'isolation et d'autres PME.
"Notre meilleur atout, c'est le public, veut croire Jean-Louis Etienne. Il raffole de ce genre d'histoires, avec tous les ingrédients qui font rêver".