Happy Birthday : |
© AFP/LUKAS BARTH
Richard McLaren (g), Dick Pound (c) et Günter Younger, lors de la présentation du 1er volet du rapport sur le dopage à Munich, le 14 janvier 2016
Jusqu'où remontaient les responsabilités ? Comment la triche s'est-elle organisée ? Le juriste canadien Richard McLaren dévoile, vendredi à Londres, la suite et la fin de son rapport explosif sur le dopage systématique et étatisé en Russie, notamment autour des Jeux d'hiver de Sotchi-2014.
Cinq mois après la publication de la première salve, que peut attendre la communauté sportive internationale d'une nouvelle série de révélations ?
Q: Quelle était la teneur de la première partie du rapport ?
R: Le 18 juillet, Richard McLaren avait lâché une bombe à quelques jours de l'ouverture des jeux Olympiques de Rio. Chargé deux mois plus tôt par l'Agence mondiale antidopage (AMA) d'enquêter sur les dires de l'ancien patron du laboratoire de Moscou, Grigori Rodtchenkov, le juriste canadien avait mis au jour un système de dopage d'Etat instauré avant les Jeux de Sotchi, en 2011, et poursuivi jusqu'en 2015, reposant sur la manipulation et/ou la falsification d'échantillons en amont et à l'intérieur du laboratoire russe. Déléguées par le Comité international olympique (CIO) aux fédérations internationales, les sanctions individuelles avaient frappé plus d'une centaine de Russes, impliqués de près ou de loin dans le rapport McLaren, interdits de participer aux Jeux de Rio.
Q: Que peut-on attendre du second volet du rapport présenté vendredi ?
R: La suite du dossier devrait apporter de nouvelles preuves de la récurrence et du systématisme des tricheries russes et renforcer le premier volet. Mille sportifs seraient, d'après une source proche du dossier, concernés par les cas de manipulation d'échantillons et de nouveaux noms devraient être rendus public. "Je ne sais pas ce qu'il y aura dans le rapport, mais il faut se souvenir qu'il s'agira du quatrième rapport concernant la Russie. Ce qui est clair, c'est que le sport en Russie est pourri jusqu'à l'os", a estimé Travis Tygart dans une interview à l'AFP. Même ton chez Dick Pound, membre du CIO et ancien président de l'AMA, également interrogé par l'AFP: "Je ne sais pas ce qu'il y aura dans le rapport (...) mais je m'attends à ce qu'il soit très, très accablant pour la Russie. Procéder à des échanges d'échantillons en pleins JO est une attaque grave contre les jeux Olympiques." Même du côté russe on s'attend au pire. En l?occurrence "une violente attaque contre le sport russe", prédit Vitaly Moutko, ministre des sports russe au moment des faits, promu vice-premier ministre en charge des sports.
Q: Quelles peuvent être les conséquences de nouvelles révélations ?
R: C'est là que le bât blesse. Le CIO, dont la prochaine grande échéance, les Jeux d'hiver de Pyeongchang (Corée du Sud), ne pointe que dans quatorze mois, a plutôt fait preuve de laxisme jusqu'à présent, notamment en refusant de céder aux appels de l'AMA en punissant collectivement la Russie. "Si le Guatemala était concerné, la réponse aurait été différente et plus rapide. Le mouvement olympique va devoir réagir avec fermeté, sous peine de voir sa crédibilité encore plus entamée", poursuit Dick Pound. En cas de preuves massives sur un sport, rien n'empêchera cependant une fédération internationale de prendre des sanctions collectives, comme l'ont fait les fédérations d'athlétisme (IAAF) et d'haltérophilie (IWF) avant Rio. Mais déjà les signes inquiétants se multiplient comme la tenue des prochains Mondiaux de bobsleigh, en février 2017 à Sotchi. En juillet dernier, le CIO avait précisé qu'il n'organiserait ni n'accorderait "son patronage à aucune rencontre ou événement sportifs en Russie". Mais avait laissé les fédérations internationales olympiques libres de suivre son exemple.
Q: La Russie a-t-elle sérieusement réformé son système antidopage ?
R: La Russie fait étalage de sa bonne foi depuis juillet dernier. Le 1er décembre, Vladimir Poutine en personne a annoncé le lancement en février 2017 d'un vaste programme national antidopage, censé devenir le "plus moderne" de tous ceux en vigueur. Juridiquement, la Russie s'appuie désormais sur une loi sanctionnant de peines de prison les entraîneurs et médecins reconnus coupables d'avoir poussé des sportifs à se doper. En revanche, alors que plusieurs responsables sportifs mis en cause dans la première partie du rapport McLaren ont été limogés ou démissionnés, le ministre des Sports Vitaly Moutko, cité nommément dans ces pages, a été lui promu fin octobre vice-Premier ministre chargé des Sports.
Comme l'IAAF avant lui, le CIO a ainsi décidé de prolonger jusqu'à "nouvel avis" les mesures provisoires prises à l'encontre de la Russie en juillet.